Qui est celui qui a triomphé du monde, sinon celui qui croit que Jésus est le Fils de Dieu 1Jean 5:4
Qui est celui qui a triomphé du monde, sinon celui qui croit que Jésus est le Fils de Dieu? 1 Jean 5:4. Celui qui est né de Dieu, qui a mis sa foi en Jésus-Christ, qui reconnaît en Dieu son Père et qui l’aime, considère les commandements de Dieu d’une tout autre manière que le monde : pour lui ils ne sont pas pénibles (verset 3). Car, par l’obéissance et grâce à l’assistance divine, il peut avoir part à la victoire de Christ sur le péché qui conduit le monde (verset 5).
Que veut dire : ‘triomphe du monde ?
Jean évoque ici la victoire sur le péché qui mène le monde : une autre manière de parler de l’obéissance aux commandements (v. 3) rendue possible par la nouvelle naissance et l’habitation intérieure du Saint-Esprit qui donne la force de vaincre le péché. Jean évoque la victoire sur le monde sous deux aspects : passé (avons triomphé) ; l’acte de foi par lequel nous avons tourné le dos au système corrompu du monde ; présent (triomphe) : la victoire quotidienne sur le péché.
Suivant la ponctuation, nous pouvons comprendre ce verset : « Si nous aimons Dieu, ses commandements ne sont pas pénibles » : l’amour nous empêche de les éprouver comme des fardeaux. Ou bien : « Les commandements de Dieu ne sont pas pénibles car tout ce qui est né de Dieu triomphe du monde » : la nouvelle naissance – et l’œuvre de l’Esprit qu’elle a initiée en nous – rendent l’accomplissement des commandements divins possible et nous empêchent de les éprouver comme « pénibles ». Les deux idées sont justes, comme le dit Ramsay : « L’amour rend l’obéissance aisée et la vie de Dieu dans l’âme la rend possible » (p. 316).
Remarquons que Jean ne dit pas : « tous ceux qui sont nés de Dieu triomphent du monde », mais « tout ce qui est né de Dieu ». Il emploie le pronom neutre : « c’est la vie divine, qui doit sa naissance en nous à Dieu, qui remporte la victoire sur le monde. Le verbe « triomphe » est au présent, ce qui suggère
– que le conflit entre le chrétien et le monde est permanent, mais
– qu’une victoire permanente est aussi possible.
La victoire qui triomphe du monde, c’est notre foi ». Jean semble personnifier la victoire. En effet, il emploie le mot nike ; or, en Grèce, nike était le nom de la déesse de la victoire. A cette déesse, Jean substitue notre foi.
Jean a déjà fait allusion à la vérité qu’il déclare ici dans 4.4 lorsqu’il a dit : « Celui qui est en vous est plus grand que celui qui est dans le monde ». Finalement, le conflit se ramène à celui de deux êtres : le Christ et le prince de ce monde. Mais le Christ est en nous, son Esprit nous a fait naître de nouveau. C’est pourquoi nous pouvons, grâce à lui, triompher du monde.
Par ce pronom neutre (ce), l’apôtre attire l’attention non sur la personne victorieuse, mais sur « le pouvoir victorieux » en celui qui est « né de Dieu » : le participe passé passif précédé d’un article (ho gegennèmenon : ce qui a été engendré) « présente ce pouvoir comme un résultat permanent de la nouvelle naissance. La forme passive détourne l’attention du croyant lui-même sur Dieu qui a opéré en lui cette nouvelle naissance. Ce pouvoir implanté par Dieu est la véritable dynamique qui ‘triomphe du monde’. Le temps présent du verbe représente cette victoire comme une expérience constante remportée par une lutte continuelle contre le monde… Etait incluse dans cette victoire la lutte victorieuse des croyants contre les hérétiques qui s’étaient levés parmi eux (2.18-29). Jean identifie ce pouvoir victorieux : c’est ‘notre foi’ (5.4b) » (E. Hiebert BSa 4.-6. 1990 p. 220-221).
Tenant compte du neutre (tout), Jackman dit que ce qui remporte la victoire, c’est notre nouvelle naissance. Le temps aoriste du v. 4b (a triomphé) parle d’une victoire remportée une fois pour toutes. Elle l’a été à la croix et par la résurrection. Tel est l’objet de notre foi ; seule cette foi centrée sur ce Christ est victorieuse. Elle doit s’exercer quotidiennement en saisissant la victoire. (The Message of John’s Letters p. 143).
Quelle est cette victoire ? Celle du Christ ou celle des croyants ? Certains interprètes voient ici une référence à la victoire remportée une fois pour toutes sur Satan (Jean 12.31-32 ; 14.30) et le monde (16.33) par son œuvre à la croix. Le croyant est victorieux lorsqu’il s’approprie par la foi cette victoire déjà remportée par le Christ. D’autres rapportent cette victoire au croyant puisque Jean parle de ‘notre foi’. Les croyants ont remporté la victoire sur les hérétiques puisque ceux-ci se sont retirés de l’Eglise (2.18-19). Hiebert pense qu’il est plus naturel de voir dans cette victoire une référence à la conversion individuelle du croyant, à sa confession de Jésus comme Fils de Dieu. Le croyant exerce une foi personnelle agressive en triomphant du monde. « Mais cette foi tire son pouvoir de l’union avec le Christ victorieux. Chaque victoire gagnée sur le vieux Moi, sur le monde et sur Satan est réalisée par une appropriation de la puissance du Christ » (Id. p. 221).
I.H. Marshall s’étonne que Jean dise que « nous avons vaincu le monde ». « Peut-être pense-t-il à la complète victoire de Jésus (Jean 16.33) qui se répète dans la vie du chrétien. Ou peut-être devrions-nous comprendre ce sens ainsi : ‘Voici le moyen de remporter la victoire : c’est que nous croyions que Jésus a déjà vaincu le monde’ (l’aoriste nikèsasa peut se référer à la victoire une fois pour toutes de Jésus). Croire que Jésus a été victorieux, c’est avoir la force qui nous rend capables de triompher dans la bataille, car nous savons que notre ennemi est d’ores et déjà vaincu, et, par conséquent, il est sans pouvoir. Or, c’est précisément de la foi dont nous avons besoin. Pour l’homme naturel, le pouvoir du mal semble incontrôlable, et au chrétien faible, la tentation paraît irrésistible. Il faut une ferme foi en Jésus pour nous rendre capables de refuser cette apparence du caractère irrésistible et incontrôlable du mal comme étant purement une apparence. Cette foi n’est pas un moyen d’échapper au conflit ; au contraire : c’est en plein milieu du déploiement de la puissance du mal que le croyant est capable d’appeler cela du bluff et de proclamer le pouvoir supérieur de Jésus » (I.H. Marshall 1 John p. 229).
« Pour les enfants de Dieu, les commandements ne sont pas pénibles parce que tout ce qui est né de Dieu triomphe du monde. Par l’utilisation du neutre tout ce qui, Jean affirme le principe sous sa forme la plus générale et la plus abstraite. Il ne souligne pas ainsi ‘la personne victorieuse’ mais ‘la puissance victorieuse’ (Plummer). ‘Ce n’est pas l’homme, mais sa naissance d’origine divine qui triomphe’ (Id.). La nouvelle naissance est un événement surnaturel qui nous arrache à la sphère du monde, où règne Satan, pour nous introduire dans la famille de Dieu. Nous avons été délivrés de la domination des ténèbres et transportés dans le royaume du bien-aimé Fils de Dieu (Colossiens 1.13). L’attirance de l’ancienne vie a été brisée. La fascination du monde a perdu son attrait » (J. Stott Ep. Jean p. 159).
« Le chrétien, né de Dieu, triomphe du monde : la cause qui lui a procuré cette victoire, et cela dès sa profession chrétienne, est l’acte qui l’a incorporé à Jésus-Christ : sa foi ; comme toujours en cette lettre, la foi dont il s’agit est une foi vivante, impliquant l’union à Dieu. Néanmoins, la foi a aussi un contenu intellectuel, elle exige la profession publique d’un credo : ce credo est ramené ici à l’article essentiel qui entraîne tous les autres : Jésus, fils de Dieu (3.23 ; 4.15) » (J. Bonsirven Ep. St Jean p. 228-229).
« Cette accumulation de mots désignant la victoire met l’accent sur le triomphe garanti au croyant et la phrase sonne comme l’appel des clairons qui annonce la déroute de l’adversaire. Que l’on traduise au v. 4 ‘la foi qui a vaincu’ ou ‘la foi qui vainc’ – la forme grecque autorise les deux versions – la victoire n’est pas seulement promise pour un avenir lointain et incertain : elle est accordée au croyant qui maintenant déjà y participe. Pour s’en convaincre, il suffit de se souvenir des deux passages (2. 13-14 et 4.4) où le triomphe chrétien était mentionné ; or, chaque fois, le verbe vaincre était employé au parfait : ‘Vous avez vaincu’.
« Les présents versets offrent la particularité de parler de la victoire – la seule fois, dans le NT où se trouve la forme niké – et de la foi – le seul endroit dans l’Evangile et dans les épîtres de Jean où est employé ce substantif. Mais l’usage des noms – destiné à souligner la valeur universelle de la vérité ainsi exprimée – ne doit à aucun prix nous inciter à détacher cette victoire de celui qui l’a acquise, Jésus-Christ, pour l’attribuer à la foi. Comme le dit G. Eichholz dans un de ses articles : ‘Cela est vrai du chrétien parce que c’est vrai de Christ’. Notre foi dépend de Christ. Notre foi, c’est Christ lui-même » (M. Kohler Cœur et mains p. 172).