Joutes à l’Assemblée avant un match de football caritatif
PARIS (Reuters) – Un match de football caritatif programmé ce mercredi a fait l’objet de joutes parlementaires, des députés de gauche refusant de « banaliser » le Rassemblement national (RN) en jouant avec ses élus, qui crient au « sectarisme ».
Le match prévu au stade Emile-Anthoine, près de la Tour Eiffel, doit opposer l’équipe de France parlementaire à un groupe d’artistes et de sportifs afin de récolter des dons contre le harcèlement scolaire et le cyber-harcèlement.
Les groupes socialiste (PS), La France insoumise (LFI) et Europe-Ecologie-Les Verts (EELV) de l’Assemblée ont annoncé mardi qu’il boycottaient la rencontre, pourtant programmée de longue date.
« Nous ne voulons pas participer à un exercice de récupération politique par le Rassemblement national pour se banaliser », a dit à la presse la députée insoumise Mathilde Panot.
Comme cette dernière, le premier secrétaire du PS Olivier Faure a évoqué la récente victoire électorale de l’extrême droite italienne.
« On le voit en Italie : la banalisation conduit à des alliances entre la droite et l’extrême droite et c’est ainsi que l’extrême droite peut ensuite gouverner », a-t-il estimé.
« Plutôt que des faux-semblants, de se passer la main dans le dos, de rigoler ensemble dans les vestiaires, le terrain d’affrontement doit être l’hémicycle », a renchéri le président du groupe socialiste à l’Assemblée, Boris Vallaud.
Pas de consigne en revanche au sein du groupe communiste. « Est-ce que les milliers d’amateurs qui jouent au football le week-end se demandent ce qu’à voté celui qui se trouve en face ? », s’est interrogé l’élu PCF Sébastien Jumel. « Moi si je vois un élu FN dans l’équipe adverse, mes tacles seront peut-être un peu plus appuyés… »
« NOUS NE JOUONS PAS DANS LA MÊME ÉQUIPE »
Les députés Rassemblement national ont fait part de leur « déception », dénonçant le « sectarisme » de la gauche.
« On a été élus par le peuple français. Comme eux », a dit Emmanuel Blairy, l’un des 89 députés RN du Palais-Bourbon.
« Je me désole que la gauche et l’extrême gauche ne soient pas capables de passer au-dessus de ces clivages », a ajouté son collègue Alexandre Sabatou. « Il serait temps de comprendre qu’on fait partie du paysage politique et qu’on est là pour rester. »
La présidente du groupe Renaissance, Aurore Bergé, a conseillé à ses troupes de ne pas participer au match. « Nous ne jouons pas dans la même équipe. Ni extrême droite, ni extrême gauche », conclut-elle dans ce message envoyé dans la soirée et consulté par Reuters.
Malgré cette mise en garde, le député Renaissance Karl Olive, co-capitaine de l’équipe parlementaire, devrait être présent, de même qu’Eric Woerth, ex-député LR passé sous la bannière présidentielle. « Nous avons toujours sur le terrain dépassé les différences politiques, il faut continuer ainsi. Tout politiser médiocrement est insupportable », a écrit ce dernier sur Twitter.
Même « consternation » chez son collègue Les Républicains Pierre-Henri Dumont, co-capitaine de l’équipe, pour qui le boycott de la gauche est un « contre-feu » aux récentes affaires Adrien Quatennens et Julien Bayou, du nom des députés LFI et EELV en retrait de leurs fonctions après des soupçons de violences conjugales.
« Cela rend service au RN car ça les victimise. Donc ils ont tort sur toute la ligne », a-t-il dit à Reuters, rappelant que le député LFI Alexis Corbière a participé par le passé à un match de rugby aux côtés du Front national Louis Aliot.
Selon lui, une dizaine d’élus manqueront in fine à l’appel sur la trentaine de membres que compte l’équipe parlementaire, ce qui permettra au match d’avoir lieu.
(Reportage Elizabeth Pineau, édité par Jean-Stéphane Brosse)