Chine: Des manifestants contre les restrictions sanitaires recherchés
par Martin Quin Pollard et Eduardo Baptista
PEKIN (Reuters) – Les autorités chinoises ont ouvert des enquêtes sur certains des manifestants du week-end contre les restrictions sanitaires, ont déclaré à Reuters trois personnes ayant participé à des rassemblements à Pékin, et les forces de l’ordre restaient très présentes dans les rues de la capitale mardi.
Dans l’un des cas, une personne se présentant comme un policier a demandé au manifestant de se présenter au poste de police dans la journée pour faire une déposition sur ses activités de dimanche soir.
Dans un autre, un étudiant a été contacté par son université qui lui a demandé s’il se trouvait dans le quartier où a eu lieu la manifestation.
« Nous sommes tous en train d’effacer en urgence notre historique de conversations », a déclaré à Reuters un manifestant qui a requis l’anonymat.
Le Bureau de la sécurité publique de Pékin n’a pas répondu à une demande de commentaire. De son côté, le ministère des Affaires étrangères a déclaré que l’exercice des droits et des libertés devait rester dans le cadre de la loi.
La colère et l’impatience suscitées par le maintien de restrictions sanitaires très strictes trois ans après le début de la pandémie ont donné naissance au plus important mouvement de désobéissance civile en Chine depuis l’arrivée au pouvoir du président Xi Jinping il y a dix ans.
Et ce mouvement risque de se prolonger puisque les autorités doivent faire face à une recrudescence de l’épidémie de COVID-19, le nombre de nouveaux cas quotidiens atteignant des niveaux sans précédent et des quartiers entiers de plusieurs métropoles restant confinés.
LE QUOTIDIEN DU PEUPLE APPELLE À « SERRER LES DENTS »
Selon un responsable des services de santé, le mécontentement actuel est surtout le résultat d’une application extrêmement rigide des mesures en vigueur.
« Les problèmes soulignés par le public ne concernent pas la prévention et le contrôle de l’épidémie en soi mais se concentrent sur la simplification des mesures de prévention et de contrôle », a dit Cheng Youquan.
Reste qu’à Shanghaï comme à Pékin, des patrouilles de police continuent de circuler dans les quartiers où certains groupes de la messagerie en ligne Telegram avaient suggéré des rassemblements. Lundi soir, cette présence policière a empêché toute nouvelle manifestation.
Des habitants ont déclaré que dans ces quartiers, des policiers arrêtaient des passants pour vérifier la présence éventuelle sur leur téléphone portable de VPN (réseaux privés virtuels) et de l’application Telegram.
Les VPN, qui permettent d’empêcher sa localisation sur internet, sont interdits à la majeure partie des Chinois et Telegram est bloquée en Chine.
Parallèlement à ce volet répressif, les autorités ont annoncé mardi une accélération de la campagne de vaccination des personnes âgées contre le COVID-19, ainsi qu’une réduction à trois mois de la période séparant la première vaccination des rappels.
Dans un éditorial qui ne mentionne pas les récentes manifestations, le Quotidien du peuple, organe officiel du Parti communiste chinois, appelle la population à « appliquer sans trembler » la politique sanitaire.
« Plus c’est dur, plus il vous faut serrer les dents », ajoute le journal.
(Reportage Eduardo Baptista, Martin Quin Pollard, Yew Lun Tian et Albee Zhang à Pékin, Casey Hall à Shanghaï; version française Marc Angrand, édité par Blandine Hénault)