Israël : Netanyahu brièvement hospitalisé alors que la crise sur la réforme judiciaire s’aggrave
par Dan Williams
JERUSALEM (Reuters) – Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, hospitalisé pour la pose d’un stimulateur cardiaque, a déclaré dimanche aller « très bien » et devrait être présent lundi au Parlement pour un vote crucial sur la réforme de la justice, un projet qui a provoqué un vaste mouvement de contestation nationale.
Alors qu’Israël est plongé dans sa plus grave crise politique depuis des décennies, le président Isaac Herzog s’est entretenu à l’hôpital avec Benjamin Netanyahu dans l’espoir de parvenir à mettre fin à la querelle entre sa coalition gouvernementale ultra-conservatrice et les partis d’opposition.
« Il y a urgence. Un accord doit être trouvé », a déclaré dans un communiqué le chef de l’Etat, qui a chapeauté entre mars et juin des tentatives infructueuses de médiation.
La Knesset, où Benjamin Netanyahu dispose d’une majorité confortable, doit se réunir lundi pour se prononcer sur la ratification d’un texte limitant la capacité de la Cour suprême à annuler certaines décisions gouvernementales.
Cela aboutirait le cas échéant à la promulgation de l’une des mesures phare du projet de réforme judiciaire porté par la coalition ultra-conservatrice, une réforme dénoncée par ses détracteurs comme une atteinte à la démocratie.
Benjamin Netanyahu, qui est jugé pour des accusations de corruption qu’il rejette, insiste sur le fait que la réforme est indispensable pour rééquilibrer les pouvoirs, déplorant une politisation et un trop grand interventionnisme de la Cour suprême.
Le Premier ministre, âgé de 73 ans, a été transporté d’urgence samedi au centre médical de Sheba, près de Tel-Aviv, samedi, à la suite de la détection d’une « arythmie temporaire », ont déclaré ses médecins.
La pose d’un « pacemaker » s’est déroulée sans problème et Benjamin Netanyahu devrait sortir lundi de l’hôpital.
« Comme vous pouvez le voir, je vais très bien », a-t-il déclaré dans une vidéo le montrant souriant, assis, vêtu d’une veste. « Nous poursuivons les efforts pour finaliser la loi, de même que les efforts pour faire cela via un consensus (…). Demain matin, je me joindrai à mes collègues à la Knesset ».
PEUR ET COLÈRE
Les parlementaires ont commencé dimanche à débattre du texte, avant un vote prévu lundi dont le résultat pourrait être connu le soir même.
Des dizaines de milliers de personnes opposées au projet de réforme judiciaire ont défilé à Jérusalem tout du long du week-end, arborant des drapeaux et tapant sur des tambours en dépit de la canicule. Beaucoup ont planté des tentes dans un parc près de la Knesset.
« Nous sommes inquiets, nous avons peur, nous sommes en colère. Nous sommes en colère parce que des gens essaient de changer ce pays, de provoquer un recul démocratique. Mais nous avons aussi beaucoup, beaucoup d’espoir », a déclaré Tzivia Guggenheim, une étudiante âgée de 24 ans.
Pendant ce temps-là, les partisans de la réforme se sont massés à Tel-Aviv. « Je suis 100% en faveur. Mon pays en a besoin. Nous devons absolument boucler (cette réforme) », a déclaré Aviya Cohen, une autre étudiante de 24 ans, qui a indiqué être dans la rue pour envoyer un message au gouvernement en faveur duquel elle a voté.
La crise s’est étendue à l’armée. Selon les chefs de file des manifestations, des milliers de réservistes volontaires menacent de ne pas se présenter au service si le gouvernement persiste dans ses projets. D’anciens cadres de l’armée ont prévenu que les capacités de défense d’Israël pourraient être affectées et à risque.
Benjamin Netanyahu a dit voir dans cette menace d’insubordination une tentative de nuire au gouvernement élu démocratiquement.
La crise en Israël a contribué à tendre les relations avec les Etats-Unis, de même que l’escalade des violences en Cisjordanie et les avancées du programme nucléaire de l’Iran. Washington a exhorté Benjamin Netanyahu à obtenir un consensus pour un quelconque projet de réforme de la justice.
En raison de son hospitalisation, les déplacements de Benjamin Netanyahu à Chypre et en Turquie ont été reportés, ont indiqué ses services, sans fournir pour l’heure un nouveau calendrier.
(Reportage Maayan Lubell, Ari Rabinovitch, Emily Rose, Rami Amichay et Ilan Rosenberg; version française Claude Chendjou, édité par Jean Terzian)