Marian Kocner jugé pour le meurtre de Jan Kuciak
par Robert Muller
PEZINOK, Slovaquie (Reuters) – Un homme d’affaires et trois autres suspects accusés du meurtre du journaliste d’investigation Jan Kuciak et de sa compagne ont comparu pour la première jeudi devant la justice en Slovaquie, où ce double assassinat en février 2018 avait déclenché de vastes manifestations contre la corruption.
Jan Kuciak et Martina Kusnirova, tous deux alors âgés de 27 ans, ont été tués par balles chez eux, en périphérie de Bratislava.
Le parquet accuse l’entrepreneur Marian Kocner, dont le nom apparaissait dans des enquêtes menées par Jan Kuciak sur des réseaux mêlant milieux d’affaires et responsables politiques, d’avoir commandité l’assassinat du journaliste.
Ce double meurtre a alimenté au sein de la population slovaque des soupçons de corruption parmi les élites du pays, qui a alors connu ses plus grandes manifestations depuis la chute du régime communiste près de 30 ans auparavant.
Ce mouvement de colère a contraint le Premier ministre Robert Fico à la démission.
A son arrivée au tribunal, la mère de Martina Kusnirova a lancé un appel pour que les enquêtes inachevées de Jan Kuciak soient reprises.
« Nous ne serons satisfaits que lorsque toutes les affaires sur lesquelles écrivait Jan auront été résolues. Alors leur mort prendra au moins un peu de sens. Cela ne suffit pas de condamner les meurtriers », a dit Zlatica Kusnirova aux journalistes en pénétrant dans la salle d’audience à Pezinok, près de Bratislava.
Des gardes encagoulés et armés de fusils d’assaut ont amené les accusés menottés dans cette salle spécialement aménagée pour accueillir la presse et le public présents en grand nombre.
Au début de l’audience, tous les accusés, notamment deux hommes soupçonnés d’avoir commis le double assassinat et une femme présentée comme une intermédiaire, ont répondu négativement à une question du juge leur demandant s’ils souhaitaient conclure un accord leur permettant de bénéficier d’une réduction de peine en échange d’aveux.
D’après les médias et l’avocat de la famille de Jan Kuciak, l’un des accusés a avoué au cours de l’enquête être le tireur.
Les accusés risquent la prison à perpétuité.
Un cinquième homme a reconnu avoir participé à l’organisation des meurtres et a conclu un accord de culpabilité avec le parquet pour comparaître comme témoin.
Le parquet a annoncé en août avoir extrait des dizaines de milliers de messages du téléphone de Marian Kocner contenant des communications avec « des représentants d’institutions de l’Etat et du système judiciaire ».
Ces révélations ont entraîné la démission de plusieurs responsables, notamment un vice-président du parlement, un membre du gouvernement, deux procureurs et un juge. Tous démentent le moindre lien avec l’assassinat du journaliste et de sa compagne.
L’ancien procureur général de Slovaquie a été inculpé cette semaine d’abus de pouvoir pour avoir dissimulé des enregistrements provenant d’une opération des services secrets impliquant aussi Marian Kocner.
(version française Bertrand Boucey, édité par Henri-Pierre André)
Faites un don au Journal Chrétien avant le 31 décembre et bénéficiez de 66% de déduction fiscale