France: Le Sénat a réécrit l’article 24 de la loi « sécurité globale »
À l'heure de l'intelligence artificielle, l'accès à des faits vérifiables est crucial. Soutenez le Journal Chrétien en cliquant ici.Le Sénat a entièrement réécrit l’article le plus controversé de la proposition de loi « sécurité globale » relative à la protection des forces de l’ordre qui avait jeté des milliers de personnes dans la rue l’automne dernier pour la défense des libertés, de la presse notamment.
Adopté en novembre en première lecture à l’Assemblée nationale, ce texte défendu par le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, entend renforcer les pouvoirs de la police, l’accès aux images des caméras-piétons et la captation d’images par les drones.
Jugé liberticide par ses détracteurs, hostiles à la limitation de la diffusion d’images des membres des forces de l’ordre, il a fait l’objet d’importantes manifestations et suscité les réserves d’instances telles que la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil).
« Nous sommes partis d’une page blanche, nous avons complètement réécrit l’article 24 », a déclaré jeudi devant la presse le sénateur Les Républicains (LR) Marc-Philippe Daubresse au lendemain de la réunion de la commission des Lois actant la révision du texte.
Selon lui, l’article revu « n’entrave en rien la liberté de la presse ni la loi de 1881 sur la liberté de la presse, et il ne parle absolument pas d’image. Ce qui permet aux journalistes et aux reporters de filmer et de diffuser en toute conscience, en fonction de leur déontologie. »
DÉLIT DE « PROVOCATION À L’IDENTIFICATION »
La nouvelle version ne fait plus référence à la loi sur la liberté de la presse de 1881 et crée un délit de « provocation à l’identification » puni par le Code pénal. Les peines sont alourdies par rapport à la version héritée des députés.
« La provocation, dans le but manifeste qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique, à l’identification d’un agent de la police nationale, d’un militaire de la gendarmerie nationale ou d’un agent de la police municipale lorsque ces personnels agissent dans le cadre d’une opération de police est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 75.000 euros d’amende », peut-on lire dans le nouveau texte.
Le Sénat, à majorité à droite, doit examiner la proposition de loi en séance du 16 au 18 mars. Les deux chambres tenteront ensuite de s’entendre lors d’une commission mixte paritaire sans doute organisée début avril.
Un accord semble possible, le Sénat qualifiant pour l’heure de « constructifs » les travaux menés avec l’Assemblée. Mardi devant des sénateurs, Gérald Darmanin a dit que le gouvernement émettrait « un avis de sagesse » pour l’article 24, laissant entendre que la majorité approuverait cette nouvelle version.
Revenant devant Reuters sur les mois de troubles créés par ce projet, le sénateur centriste Loïc Hervé, rapporteur du texte, a jugé que l’Elysée avait « totalement laissé les mains libres au ministre de l’Intérieur sur le fond et sur la stratégie ».
Interrogé par Reuters, l’entourage de Gérald Darmanin a dit n’avoir « aucun commentaire à faire à ce stade » sur les travaux du Sénat.
Le président LR de la Commission des Lois du Sénat, François-Noël Buffet, a qualifié l’épisode de « malheureux ».
« Lorsqu’on touche à des sujets comme la sécurité, les libertés individuelles ou collectives, c’est à manier avec précaution, ce qui passe par un respect des procédures. Donc, à ne pas refaire », a-t-il dit en conférence de presse.
(Elizabeth Pineau)