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Syrie: Des alaouites ont aussi été arrêtés et tués à Damas, selon des habitants

par Maya Gebeily, Timour Azhari et Feras Dalatey

DAMAS (Reuters) – Damas, le 6 mars, aux alentours de minuit : alors que l’ouest de la Syrie était le théâtre de violences sectaires, des hommes cagoulés prenaient d’assaut les maisons de familles alaouites et arrêtaient une vingtaine d’hommes, selon les dires d’une douzaine de témoins.

Parmi les personnes arrêtées figuraient notamment un enseignant à la retraite, un étudiant en ingénierie et un mécanicien, tous alaouites – groupe ethnoreligieux auquel appartenait le président déchu Bachar al Assad, renversé le 8 décembre par une coalition islamiste menée par le groupe Hayat Tahrir Al-Cham (HTC).

Quelques heures auparavant, à 320 km au nord-ouest, près de la côte méditerranéenne, un groupe d’alaouites fidèles à l’ex-dirigeant syrien se soulevait, déclenchant des représailles sanglantes des forces de sécurité qui ont fait des centaines de morts au sein de la communauté.

Le président syrien par intérim, Ahmed al Charaa, déclarait à Reuters après le massacre qu’il avait dépêché des forces gouvernementales dans la région pour mettre un terme aux violences.

Selon ses déclarations, les hommes armés qui sont intervenus dans la région en réponse à l’insurrection alaouite n’avaient pas reçu d’autorisation du ministère de la Défense.

Son administration, qui a chargé une commission d’enquête d’éclaircir « les événements survenus sur la côte », s’était alors efforcée de souligner que les meurtres et exactions étaient géographiquement limités aux régions côtières.

Le récit des témoins ayant assisté aux arrestations d’alaouites à Damas contredit cette affirmation, signe que les violences sectaires se sont étendues jusque dans les faubourgs de la capitale, à quelques kilomètres seulement du palais présidentiel.

Cet évènement présumé, qui s’est déroulé dans le quartier d’al-Qadam, n’a pas été rapporté auparavant.

Toutes les personnes dont Reuters a recueilli les témoignages ont requis l’anonymat par crainte de représailles.

« Dans toutes les maisons alaouites, ils enfoncent la porte et enlèvent les hommes qui s’y trouvent », raconte un habitant dont l’un de ses proches a été enlevé à l’aube du 7 mars.

« Ils l’ont enlevé uniquement parce qu’il est alaouite.

Selon les témoins, au moins 25 hommes ont été capturés.

Au moins huit d’entre eux sont morts, selon leurs proches et voisins, qui ont déclaré avoir trouvé leurs corps à proximité ou avoir vu des photographies de leurs dépouilles.

On ignore ce qu’il est advenu des autres hommes.

Selon quatre des témoins, certains des hommes armés se sont présentés comme des membres du Service de sécurité générale (GSS), une nouvelle agence syrienne composée d’anciens rebelles.

Un porte-parole du ministère de l’Intérieur, dont dépend le GSS, a déclaré à Reuters que cette agence « ne visait pas directement les alaouites », mais qu’elle était chargée de confisquer les armes de toutes les sectes et minorités.

Le porte-parole n’a pas répondu aux questions concernant la capture d’hommes non armés lors d’une opération dans le quartier d’al-Qadam.

Yasser Farhan, le porte-parole de la commission chargée d’enquêter sur les massacres du début du mois, a déclaré que son travail était géographiquement circonscrit aux événements survenus près de la côte.

« Mais il est possible que le comité délibère ultérieurement pour élargir ses travaux », a-t-il toutefois déclaré à Reuters.

Il a précisé mardi à des journalistes que les membres de la commission d’enquête avaient interrogé des témoins dans plusieurs districts côtiers, et qu’il leur restait deux villes à visiter. Il n’a cependant pas mentionné Damas.

Les témoins des arrestations du quartier d’al-Qadam ont dit qu’ils n’avaient pas été contactés par la commission d’enquête.

Les alaouites, qui représentent environ 10% de la population syrienne, sont concentrés principalement dans les régions côtières de Lattaquié et de Tartous, mais sont également présents à Damas et dans de grandes villes telles que Homs et Hama.

LE CYCLE DE LA VIOLENCE ET DE L’IMPUNITÉ

Hiba Zayadin, membre de l’organisation non-gouvernementale Human Rights Watch, a demandé qu’une enquête approfondie sur les raids présumés du quartier d’al-Qadam soit menée.

« Les familles méritent des réponses et les autorités doivent veiller à ce que les responsables soient tenus de rendre des comptes, quelle que soit leur affiliation », a-t-elle déclaré.

« Tant que cela ne sera pas fait, le cycle de la violence et de l’impunité se poursuivra. »

En raison de la dissolution des groupes rebelles ordonnée par Ahmed al Charaa pour une intégration prévue dans un ministère de la Défense restructuré, il peut être difficile pour les autorités d’exercer un contrôle total sur les différentes factions, parfois rivales.

Selon les témoins des arrestations d’al-Qadam, nombre d’entre eux ont subi des pressions pour quitter le quartier en raison de leur appartenance à la communauté alaouite. Certains l’ont par ailleurs déjà fait.

Un habitant a relevé que des hommes armés sont venus chez lui à plusieurs reprises dans les semaines qui ont suivi l’éviction de Bachar al Assad.

Ils exigeaient la preuve que lui et sa famille étaient propriétaires de la maison et qu’elle n’était pas affiliée au clan Assad.

Il a déclaré avoir fui avec sa famille et avoir demandé à des voisins musulmans sunnites de s’occuper de la maison.

D’autres membres de la communauté alaouite du quartier ont déclaré avoir cessé d’aller travailler, se déplaçant parfois uniquement pendant la journée pour éviter une éventuelle arrestation.

Une femme d’une soixantaine d’années a déclaré qu’elle cherchait à vendre sa maison à al-Qadam, inquiète des risques pour son mari ou ses fils.

« Après ce qui s’est passé, tout ce que je veux, c’est quitter la région. »

À LA RECHERCHE DES CORPS

Quatre des hommes dont la mort a été confirmée à Damas appartenaient à la même famille élargie, selon un parent qui a échappé aux arrestations en se cachant avec les jeunes enfants de la famille.

Partis à leur recherche, leurs proches ont été orientés vers la branche du GSS à al-Qadam, où ils ont pu voir des photos des quatre hommes morts.

Aucune cause de décès n’a été donnée et n’a pu être déterminée à partir des images, a déclaré un des proches.

« Nous n’avons pas été en mesure de les trouver et nous avons trop peur de demander à qui que ce soit », a-t-il déclaré au sujet des dépouilles.

Mohammad Halbouni, directeur de l’hôpital Mujtahid, a déclaré à Reuters que les corps provenant d’al-Qadam étaient emmenés au service de médecine légale situé à côté. Son personnel a déclaré qu’il n’avait aucune information à communiquer.

Une proche de l’une des victimes a également déclaré que sa famille n’avait trouvé aucune information sur le lieu où se trouvait le corps du défunt, après s’être renseigné auprès du poste de police local et d’agences de sécurité.

Elle a ainsi établi un parallèle avec les évictions forcées sous le régime Assad, lorsque les disparitions de milliers de personnes, souvent déclarées mortes après plusieurs années, restaient sans réponse.

Quatre hommes capturés la nuit du 6 mars ont été retrouvés morts dans un verger près d’al-Qadam. Tous présentaient des blessures par balles indiquant une exécution, selon un habitant du quartier qui a déclaré à Reuters que la famille avait rapidement enterré les corps.

Reuters n’a pas été en mesure de confirmer de manière indépendante les détails de son récit.

(Reportage Maya Gebeily, Timour Azhari et Feras Dalatey ; version française Etienne Breban ; édité par Sophie Louet)

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