75e anniversaire d’Israël
Israël célèbre cette semaine son 75e anniversaire dans un temps de doute et de divisions provoquées par le projet de réforme de la justice du Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui a plongé le pays dans l’une de ses pires crises internes depuis 1948.
La Journée du souvenir des soldats israéliens tombés au combat et des victimes du terrorisme, ce mardi, et le Jour de l’indépendance, mercredi, sont traditionnellement des marqueurs d’unité de la société israélienne face aux menaces extérieures.
Mais l’ambiance est différente cette année.
« Je suis convaincu qu’il n’y a pas de plus grande menace existentielle pour notre peuple que celle qui vient de l’intérieur : notre propre polarisation et notre aliénation mutuelle », a déclaré le président Isaac Herzog lundi devant l’assemblée générale des Jewish Federations of North America (JFNA) à Tel Aviv.
Des centaines de milliers d’Israéliens ont manifesté sans relâche depuis le début de l’année contre le projet de réforme du système judiciaire de Benjamin Netanyahu, perçu comme une menace directe contre la démocratie en plaçant la Cour suprême sous la coupe du gouvernement.
Le Premier ministre a annoncé le mois dernier une « pause » le temps de mener de nouvelles consultations, mais son gouvernement de coalition constitué de partis nationalistes et religieux, le plus à droite de l’histoire d’Israël, continue à défendre la nécessité de cette réforme.
Les manifestations ont par conséquent continué et beaucoup d’Israéliens s’interrogent désormais sur l’avenir de leur pays, au-delà de la question de la Cour suprême.
« Quel genre de pays va-t-on devenir ? », s’interroge Uzy Zwebner, un entrepreneur de Tel Aviv qui se définit comme patriote, issu d’une famille sioniste ayant émigré en Palestine dès le XIXe siècle. « Est-ce qu’on va être une démocratie, un pays moderne ? Ou bien est-ce qu’on va devenir comme tous les pays qui nous entourent ? »
Vétéran de la guerre du Kippour en 1973, pendant laquelle il a été blessé au combat et a perdu un frère tué dans le Sinaï égyptien, Uzy Zwebner fait partie de ces Israéliens qui sont en rupture totale avec l’actuel gouvernement.
Les tensions actuelles font ressurgir des divisions profondes au sein de la société israélienne : celle entre Ashkénazes, les juifs venus d’Europe de l’Est, et Séfarades, ceux qui ont émigré d’Afrique du Nord et du Proche-Orient ; celle entre la Jérusalem religieuse et la Tel Aviv laïque ; ou encore celle entre colons d’extrême-droite et urbains aux idées plus libérales.
Les Arabes israéliens, qui représentent un cinquième de la population, se tiennent largement à l’écart de ce questionnement existentiel, jugeant qu’il ne fait en rien avancer la résolution de la question de la création d’un Etat palestinien et de la colonisation.
Selon un sondage diffusé la semaine dernière par la chaîne télévisée Canal 12, 51% des Israéliens se disent pessimistes pour l’avenir de leur pays.
(Version française Tangi Salaün, édité par Kate Entringer)