La Russie ferme sur ses exigences sur l’Ukraine face aux Etats-Unis
par Humeyra Pamuk et Pesha Magid
RIYAD (Reuters) – Les Etats-Unis et la Russie sont convenus mardi à l’issue d’une réunion de plusieurs heures en Arabie saoudite entre leurs plus hauts diplomates de poursuivre leurs efforts en vue de mettre fin à la guerre en Ukraine, laquelle, tout comme les pays européens, a été réduite au rang de spectatrice des négociations sur son avenir.
Cette rencontre était la première entre Américains et Russes pour discuter des moyens de mettre un terme au conflit déclenché par l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie en février 2022, le plus meurtrier sur le sol européen depuis la Seconde Guerre mondiale.
L’Ukraine a prévenu qu’elle n’accepterait aucun accord conclu sans son consentement. Son président Volodimir Zelensky, qui devait se rendre en Arabie saoudite mercredi, a annoncé le report de cette visite au 10 mars. Deux sources ont déclaré à Reuters que le président ukrainien entendait ainsi ne pas donner de « légitimité » aux discussions russo-américaines.
Avant même la tenue de cette première réunion à Riyad, des responsables européens ont exprimé leur crainte de voir le président américain Donald Trump, au nom de sa promesse de campagne de régler au plus vite ce conflit, conclure à la hâte un accord mettant en péril la sécurité en Europe en permettant à la Russie de tirer des bénéfices de l’invasion de son voisin, ce qui pourrait en outre l’inciter à continuer de menacer l’Ukraine et d’autres pays à l’avenir.
Des membres de la nouvelle administration américaine ont ainsi déjà exclu la semaine dernière une adhésion de l’Ukraine à l’Otan et jugé illusoire pour ce pays de croire qu’il pourrait récupérer les 20% de son territoire actuellement contrôlés par la Russie.
Mike Waltz, conseiller à la sécurité nationale de la Maison blanche, a déclaré aux journalistes à Riyad que la guerre devait prendre fin de manière définitive et que cela impliquait des négociations territoriales.
« La simple réalité pratique est qu’il va y avoir des discussions sur les territoires et qu’il va y avoir des discussions sur les garanties de sécurité », a-t-il dit.
MOSCOU EXIGE DE L’OTAN DE RENIER SA PROMESSE À L’UKRAINE
Evoquant les inquiétudes ukrainiennes et européennes, le secrétaire d’Etat, Marco Rubio, qui dirigeait la délégation américaine, a assuré que personne ne serait tenu à l’écart de ces pourparlers, que l’Union européenne aurait à être impliquée le moment venu et que toute solution devait être acceptable aux yeux de toutes les parties.
Alors même que la réunion était en cours dans la capitale saoudienne, la Russie a paru durcir ses exigences.
La porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, a déclaré aux journalistes à Moscou que la Russie ne se contenterait pas d’une non-adhésion de l’Ukraine à l’Otan. Elle a ajouté que l’alliance militaire transatlantique devait renier sa promesse faite à l’Ukraine en 2008 lors d’un sommet à Bucarest d’une intégration à terme à l’Otan.
« Sinon, ce problème continuera à empoisonner l’atmosphère sur le continent européen », a dit Maria Zakharova.
Volodimir Zelensky ne cesse pour sa part d’affirmer qu’une adhésion à l’Otan est la seule manière de garantir la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine vis-à-vis de son puissant voisin russe, alors que Kyiv a accepté en 1994 de renoncer à son vaste arsenal nucléaire datant de l’époque soviétique en échange de garanties sur le respect de ses frontières de la part de la Russie, des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne.
CONTRASTE D’EXPÉRIENCE
Alors que des pays européens, dont certains dirigeants se sont réunis lundi soir en urgence à Paris, évoquent la possibilité de déployer une force de maintien de la paix en Ukraine en cas d’accord, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a répété mardi à Riyad que Moscou n’accepterait pas la présence de soldats de l’Otan chez son voisin, quelle que soit leur bannière. « Bien sûr, c’est inacceptable pour nous », a-t-il dit.
La France organisera mercredi une deuxième réunion sur l’Ukraine et la sécurité en Europe avec des pays européens qui n’étaient pas invités lundi et le Canada, autre allié au sein de l’Otan, a-t-on appris de sources diplomatiques.
Le contraste en termes d’expérience autour de la table de discussion à Riyad était saisissant, Sergueï Lavrov et Iouri Ouchakov, conseiller en politique étrangère du président russe Vladimir Poutine, cumulant 34 années de présence à leurs postes quand leurs trois interlocuteurs américains n’étaient pas encore en fonction il y a un mois.
Cette séance de pourparlers prolonge la séquence diplomatique ouverte par un premier entretien téléphonique entre Donald Trump et Vladimir Poutine mercredi dernier. Les deux dirigeants ont exprimé la volonté de se rencontrer mais les délégations américaines et russes à Riyad ont dit qu’aucune date n’avait été fixée pour un tel sommet.
Américains et Russes se sont entendus pour nommer des « délégations respectives de haut niveau pour commencer à oeuvrer à un chemin pour mettre fin au conflit en Ukraine aussi vite que possible de manière durable, viable et acceptable par toutes les parties », a dit Tammy Bruce, porte-parole du département d’Etat américain.
Iouri Ouchakov a pour sa part déclaré aux journalistes à l’issue de ces quatre heures et demie de discussions: « Cela a été une conversation très sérieuse sur tous les sujets que nous souhaitions aborder. »
Marco Rubio a dit sortir de cet entretien avec la conviction que la Russie est « désireuse de commencer à engager un processus sérieux pour déterminer à quel rythme et selon quel mécanisme une issue peut être trouvée à cette guerre ».
Sergueï Lavrov a fait état d’un « intérêt élevé » dans la levée des barrières économiques entre les deux pays, alors que les Etats-Unis et leurs alliés occidentaux ont multiplié les sanctions contre la Russie depuis février 2022.
Marco Rubio est resté évasif sur ce point.
« Il y a d’autres parties prenantes qui ont des sanctions. L’Union européenne devra être à la table à un moment donné, parce qu’ils ont aussi imposé des sanctions », a-t-il dit.
(Humeyra Pamuk à Riyad et Dmitry Antonov à Moscou, rédigé par Mark Trevelyan; version française Jean Terzian, Benjamin Mallet et Bertrand Boucey, édité par Blandine Hénault et Kate Entringer)
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