Rechercher sur le site

Entrez les mots-clés dans la boîte ci-dessous :

Vous aimez nous lire?

Soutenez-nous !

Khamenei avait prévenu Nasrallah d’un complot pour le tuer, lui conseillant de fuir le Liban-sources

Vous aimez le contenu du Journal Chrétien ? Aidez-nous à couvrir les frais de production des articles que vous lisez en faisant un don ici.

par Samia Nakhoul et Laila Bassam

DUBAI/BEYROUTH (Reuters) – Le guide suprême de la Révolution iranienne, l’ayatollah Ali Khamenei, avait conseillé à Hassan Nasrallah de fuir le Liban, quelques jours à peine avant que le chef du Hezbollah soit tué à Beyrouth dans une frappe israélienne, et il est désormais très préoccupé par une possible infiltration par Israël de l’administration iranienne, a-t-on appris de trois sources iraniennes au fait de la question.

Dans la foulée de l’explosion simultanée au Liban de centaines de bipeurs considérés comme appartenant au Hezbollah – une attaque imputée au Mossad, le service israélien du renseignement extérieur -, le 17 septembre, Ali Khamenei a envoyé via un émissaire un message à Hassan Nasrallah pour implorer ce dernier de quitter le Liban pour l’Iran, a déclaré à Reuters l’une des sources.

Ali Khamenei a cité des renseignements selon lesquels Israël disposait d’agents au sein du Hezbollah et prévoyait d’abattre l’emblématique dirigeant du mouvement chiite armé, a ajouté la source – un représentant iranien de haut rang.

Cet émissaire était un commandant des Gardiens de la révolution iranienne, a précisé la source: Abbas Nilforoushan, qui se trouvait dans un bunker avec Hassan Nasrallah au moment des puissants bombardements effectués en fin de semaine dernière par l’armée israélienne contre des bâtiments situés en périphérie de Beyrouth.

Réfugié depuis samedi dans un lieu sécurisé en Iran, Ali Khamenei, qui dispose à Téhéran du dernier mot dans des domaines clés comme la politique étrangère et le nucléaire, a personnellement ordonné qu’un barrage d’environ 200 missiles soit tiré mardi contre Israël, a déclaré un autre représentant iranien de haut rang.

Cette attaque a été décrite dans un communiqué des Gardiens de la révolution iranienne comme une réponse aux assassinats de Hassan Nasrallah et d’Abbas Nilforoushan, ainsi que d’Ismaïl Haniyeh, le chef du bureau politique du Hamas palestinien, quand celui-ci se trouvait à Téhéran fin juillet. Israël n’a pas revendiqué l’assassinat de Haniyeh.

Les missiles iraniens ont été lancés alors qu’Israël avait annoncé plus tôt mardi avoir lancé des « assauts terrestres limités » dans le sud du Liban pour cibler des infrastructures du Hezbollah.

Aucun commentaire n’a été obtenu auprès du ministère iranien des Affaires étrangères. Les services du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, qui supervise le Mossad, n’ont pas répondu dans l’immédiat à une demande de commentaire.

TEHERAN A « PERDU SON PLUS IMPORTANT INVESTISSEMENT »

L’assassinat de Hassan Nasrallah a été mené après deux semaines de bombardements de l’armée israélienne à travers le Liban pour, selon Tsahal, détruire des sites d’armes et éliminer plusieurs membres du directoire et des hauts commandants du Hezbollah.

Plus de 1.000 personnes ont été tuées et plusieurs milliers d’autres blessées dans ces bombardements israéliens, selon les autorités libanaises. Un million de Libanais ont été déplacés.

Les craintes à Téhéran à propos de la sécurité d’Ali Khamenei et la défiance qui s’est installée aussi bien au sein du Hezbollah que de l’administration iranienne, et dans les relations entre les deux, ont émergé dans des conversations avec dix sources en préparation de cette dépêche.

Ces sources ont décrit une situation à même de compliquer le fonctionnement de l' »Axe de la Résistance » composé par l’Iran et des milices alliées dans la région.

Fondé dans les années 1980 avec le soutien de l’Iran à la suite de l’occupation du Liban par Israël, le Hezbollah est de longue date le groupe armé le plus puissant allié à Téhéran.

D’après quatre sources libanaises, le désarroi actuel complique aussi les efforts du Hezbollah pour nommer un secrétaire général en remplacement de Hassan Nasrallah, avec la crainte que l' »infiltration » du mouvement chiite mette son nouveau chef en danger.

« Grosso modo, l’Iran a perdu son plus important investissement de ces dernières décennies », a commenté Magnus Ranstorp, expert à propos du Hezbollah à l’Université suédoise de la Défense, ajoutant que les lourdes pertes infligées par Israël au Hezbollah ont réduit les capacités de l’Iran à frapper les frontières de l’Etat hébreu.

« L’Iran a été ébranlé. Cela montre aussi comment l’Iran est profondément infiltré: non seulement (les Israéliens) ont tué Nasrallah, ils ont tué Nilforoushan », que consultait Ali Khamenei sur les questions militaires, a-t-il déclaré.

Avec les pertes subies par le Hezbollah, tant dans ses capacités militaires que dans son commandement, Téhéran pourrait être poussé à opter pour des attaques contre des ambassades et des intérêts israéliens à l’étranger qu’il effectuait plus fréquemment avant l’émergence de milices alliées, a dit Magnus Ranstorp.

« PLUS CONFIANCE EN PERSONNE »

L’assassinat de Hassan Nasrallah a déclenché en Iran une minutieuse enquête destinée à déterminer si les propres rangs du régime de Téhéran ont été infiltrés, notamment les Gardiens de la révolution et les hauts représentants sécuritaires, a déclaré l’une des sources iraniennes.

D’après un autre représentant iranien, l’enquête se focalise sur ceux qui voyagent à l’étranger ou ont de la famille hors d’Iran. Les autorités iraniennes sont de plus en plus suspicieuses à l’égard de certains membres des Gardiens de la révolution ayant voyagé au Liban, a-t-il déclaré, ajoutant que le fait que l’un d’entre eux commence à poser des questions sur les lieux précis où se rendaient Hassan Nasrallah avait servi de déclencheur.

Ce membre des Gardiens de la révolution a été arrêté, de même que plusieurs autres personnes, après que l’alarme a été donnée au sein des services iraniens du renseignement, a déclaré l’une des sources iraniennes. La famille du suspect avait quitté l’Iran pour s’installer à l’étranger, a-t-elle ajouté, sans donner davantage d’informations sur ce suspect et sa famille.

Une troisième source iranienne a déclaré que les assassinats simultanés de Hassan Nasrallah et Abbas Nilforoushan ont répandu un sentiment de défiance entre Téhéran et le Hezbollah ainsi que dans les rangs du mouvement armé. « La confiance qui maintenait tout en place a disparu », a dit ce représentant.

Une troisième source, proche du régime iranien, a rapporté qu’Ali Khamenei n' »a plus confiance en personne ».

Après l’assassinat en juillet de Fouad Chokr, un commandant du Hezbollah, dans une frappe israélienne contre un endroit discret de Beyrouth où Chokr rencontrait un commandant des Gardiens de la Révolution, deux sources au sein du Hezbollah et une source sécuritaire libanaise avaient déclaré que des soupçons à propos d’agents du Mossad infiltrés avaient commencé à apparaître à Téhéran et chez le Hezbollah.

Quelques heures plus tard, Ismaïl Haniyeh fut abattu à Téhéran où il s’était rendu pour assister à l’investiture du nouveau président iranien.

Israël a déclaré publiquement avoir assassiné Fouad Chokr, membre discret du Hezbollah décrit lors de ses funérailles par Hassan Nasrallah comme une personnalité centrale dans l’histoire du mouvement chiite.

D’après l’armée israélienne, Fouad Chokr a joué un rôle clé dans le développement des armes de pointe du Hezbollah, comme des missiles guidés, et était au cours de l’année écoulée en charge des opérations du groupe contre Israël.

NASRALLAH NE DOUTAIT PAS DE SA SÉCURITÉ

Il n’est pas nouveau que Téhéran craigne d’avoir été infiltré en haut lieu par des agents israéliens.

En 2021, l’ancien président iranien Mahmoud Ahmadinejad a déclaré à la chaîne de télévision CNN Turk que le chef d’une unité des services du renseignement iranien en charge de débusquer des agents du Mossad était lui-même un agent israélien. Cela avait permis à Israël d’obtenir des documents sensibles sur le programme nucléaire de l’Iran, a-t-il dit.

Malgré les sérieuses préoccupations de Téhéran à propos de possibles agents du Mossad infiltrés dans les rangs du Hezbollah, Hassan Nasrallah avait confiance en sa sécurité et ne doutait aucunement de son premier cercle de conseillers, a déclaré l’une des sources iraniennes.

Le chef du Hezbollah a insisté pour rester au Liban quand Ali Khamenei lui a demandé une seconde fois, la semaine dernière, de se rendre dans un lieu sécurisé en Iran, a ajouté ce représentant.

Trois sources au Liban ont déclaré à Reuters que le Hezbollah a alors lancé une vaste enquête destinée à débusquer tout agent israélien au sein du groupe, interrogeant des centaines de membres après l' »attaque des bipeurs ». Plusieurs hauts représentants menant cette enquête ont été tués dans des frappes israéliennes, a déclaré une source au sein du Hezbollah.

Mohanad Hage Ali, directeur adjoint de la recherche au Centre Carnegie pour le Moyen-Orient, basé à Beyrouth, a déclaré que cette attaque représentait « la plus importante infiltration des renseignements israéliens » dans les rangs du Hezbollah depuis la fondation du groupe dans les années 1980.

(Samia Nakhoul à Dubaï et Laila Bassam à Beyrouth, avec la contribution d’Ahmed Tolba au Caire; version française Jean Terzian)

tagreuters.com2024binary_LYNXMPEK910UK-FILEDIMAGE

Les commentaires sont fermés.

LES ARTICLES LES PLUS LUS