Biden plaide devant les Américains pour des milliards d’aides à Israël et l’Ukraine
par Trevor Hunnicutt, Steve Holland et Jarrett Renshaw
WASHINGTON (Reuters) – Le président américain Joe Biden a plaidé jeudi, lors d’une rare allocution télévisée en ‘prime time’, en faveur de l’envoi de milliards de dollars d’aides supplémentaires à Israël et l’Ukraine, déclarant que le soutien de Washington était primordial pour deux alliés majeurs engagés dans des conflits.
Il a dressé un parallèle entre le groupe palestinien du Hamas, qui a mené ce mois-ci une attaque ayant fait 1.400 morts en Israël, et la Russie, qui a lancé en février 2022 une invasion de l’Ukraine.
« Le Hamas et (le président russe Vladimir) Poutine représentent des menaces différentes, mais ils partagent la volonté d’annihiler une démocratie voisine », a-t-il dit.
Cette prise de parole est intervenue au lendemain de la visite de quelques heures de Joe Biden en Israël, lors de laquelle le locataire démocrate de la Maison blanche a affiché le soutien de Washington, annoncé l’acheminement d’aides à Gaza et cherché à éviter un embrasement du conflit.
Elle s’inscrit dans un contexte tendu au Moyen-Orient, où la colère gronde depuis l’explosion mardi soir d’un hôpital de Gaza et alors qu’une opération militaire terrestre d’Israël est imminente dans l’enclave palestinienne, assiégée par des frappes aériennes sans précédent depuis l’attaque du Hamas le 7 octobre. Au moins 3.785 Palestiniens ont été tués dans ces frappes.
S’il a redit lors de son discours qu’Israël n’était pas responsable de l’explosion de l’hôpital Al-Ahli, comme annoncé par le Hamas, le président américain a toutefois déclaré qu’il était impossible d' »ignorer l’humanité d’innocent Palestiniens qui veulent seulement vivre en paix ».
Reprenant une question que se posent certains Américains – « en quoi est-ce important pour les Etats-Unis de soutenir ces guerres ? -, Joe Biden a admis que ces conflits pouvaient sembler loin mais souligné que les adversaires de Washington les surveillaient de près et pourraient décider, en fonction de l’issue de ces conflits, de provoquer des troubles ailleurs dans le monde.
SITUATION POLITIQUE DÉLICATE AU CONGRÈS
Au cours de son déplacement en Israël, Joe Biden a promis 100 millions de dollars d’aides humanitaires supplémentaires à destination des Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie occupée.
« La population de Gaza a un besoin urgent de nourriture, d’eau et de médicaments », a-t-il dit jeudi soir.
Il s’agissait seulement de sa deuxième allocution en ‘prime time’ depuis le Bureau ovale en près de trois années de présidence. La première avait été effectuée en juin dernier pour saluer l’accord du Congrès sur le plafond de la dette américaine et éviter ainsi un défaut de paiement qui aurait eu des effets économiques catastrophiques.
Alors qu’il avait exprimé plus tôt cette semaine son intention de transmettre rapidement une demande au Congrès pour une aide sans précédent à Israël, la vacance prolongée au poste de ‘speaker’ de la Chambre des représentants, contrôlée par les républicains, empêche celle-ci d’approuver de quelconques financements.
Des représentants de l’administration Biden ont indiqué que le président demandait des fonds d’urgence totalisant environ 100 milliards de dollars, à destination, pendant un an, d’Israël, de l’Ukraine, de Taiwan ainsi que pour des mesures sécuritaires à la frontière avec le Mexique.
En amont de la prise de parole du président américain, des sources ont indiqué que 60 milliards de dollars pourraient être alloués à l’Ukraine et 10 milliards à Israël.
Toute mesure de financement doit être approuvée à la fois par le Sénat, où les pairs démocrates de Joe Biden sont majoritaires, et à la Chambre des représentants, où les travaux sont à l’arrêt depuis plus de deux semaines et la rébellion d’un petit groupe d’élus républicains pour déchoir leur pair Kevin McCarthy du poste de ‘speaker’.
En regroupant l’ensemble de ses priorités sécuritaires en un seul budget additionnel, Joe Biden cherche à déterminer si les élus républicains peuvent mettre de côté leur opposition à l’égard d’aides supplémentaires à l’Ukraine. Washington apporte depuis vingt mois des milliards de dollars d’aides militaires à Kyiv, sans qu’une issue à la guerre ne se profile.
Selon une enquête d’opinion Reuters/Ipsos réalisée la semaine dernière, quatre sondés sur dix estiment que les Etats-Unis doivent soutenir la position d’Israël dans le conflit actuel. Près de la moitié pensent que les Américains doivent rester neutres ou ne pas s’impliquer dans le conflit.
(Reportage Trevor Hunnicutt et Steve Holland, avec Susan Heavey, Doina Chiacu, Idrees Ali, Mike Stone, Jason Lange, Patricia Zengerle et Helen Coster; version française Jean Terzian)