Le Japon ne peut pas déverser de l’eau contaminée tant que les nucléides n’ont pas atteint des « niveaux non détectables », selon un expert américain
À l'heure de l'intelligence artificielle, l'accès à des faits vérifiables est crucial. Soutenez le Journal Chrétien en cliquant ici.« Pas une goutte » de l’eau contaminée par la radioactivité de Fukushima au Japon ne devrait être déversée tant que le monde n’aura pas été convaincu qu’elle a été traitée pour en éliminer les nucléides jusqu’à des « niveaux non détectables », a déclaré Rick Steiner, ancien professeur de conservation marine à l’Université d’Alaska, dans un entretien accordé mercredi à Xinhua.
Le gouvernement japonais a annoncé la semaine dernière qu’il avait décidé de déverser en mer les eaux usées radioactives contaminées de la préfecture de Fukushima.
« Avant tout rejet en mer, le monde a le droit de savoir exactement quels radio-isotopes se trouvent dans les eaux usées, à quelles concentrations, et que toute l’eau a été traitée avec les meilleures méthodes technologiques disponibles pour en éliminer tous les radionucléides jusqu’à des niveaux non détectables », a préconisé cet éminent biologiste américain.
A la date du 31 décembre 2019, 73% des eaux nucléaires usées dépassaient les normes de rejet du Japon après avoir été traitées via un système avancé de traitement des liquides (ALPS) capable d’éliminer la plupart des contaminants, selon le rapport d’une organisation effectuant des recherches sur le traitement des eaux usées de l’accident nucléaire de Fukushima.
La compagnie Tokyo Electric Power Company (TEPCO), l’opérateur qui traite ces eaux usées, a la mauvaise habitude de dissimuler et de falsifier des informations, selon les médias.
« TEPCO et le gouvernement japonais ont fait preuve d’un certain manque de transparence sur la question de Fukushima », a confié M. Steiner à Xinhua.
Il a qualifié le rejet en mer prévu par le Japon « d’idée spectaculairement mauvaise » pour un certain nombre de raisons : il exposerait les écosystèmes marins du Pacifique Nord à des risques ; il est inutile, car l’option de stockage à long terme est raisonnable et prudente ; il est probablement illégal au regard du droit international ; et il est exceptionnellement contraire à l’éthique.
« Nous ne pouvons plus accepter le rejet des déchets industriels dangereux dans notre seul océan mondial », a souligné M. Steiner, qui conseille les Nations Unies, les gouvernements et les ONG sur les questions d’environnement marin.
« En ce qui concerne le risque écologique, jusqu’à présent, nous ne savons tout simplement pas exactement quels radionucléides et à quelles concentrations se trouvent dans les réservoirs, mais nous savons qu’il y a du césium 137 radioactif, du tritium, du carbone 14, du cobalt 60, du strontium 90, de l’iode 129 et plus de 50 autres nucléides. Certains de ces éléments ont pu être retirés, d’autres non », a-t-il indiqué.
« Il faut que nous le sachions », a affirmé cet expert.
La communauté internationale devrait réunir une commission scientifique et technologique internationale, agréée par le gouvernement japonais, pour assurer une surveillance scientifique indépendante de tous les aspects du nettoyage de Fukushima, y compris la question des eaux usées, a recommandé M. Steiner.
Ce groupe international devrait fonctionner indépendamment de l’Agence internationale de l’énergie atomique, a-t-il ajouté.
D’après lui, si l’eau contaminée était conservée pendant encore 15 à 30 ans, le tritium radioactif se désintégrerait de 50% à 75%. Cela donnera le temps de la traiter efficacement.
La décision du Japon de déverser en mer les eaux usées a suscité l’opposition du public japonais et des groupes environnementaux internationaux. Elle a également suscité l’inquiétude des pays voisins quant à l’impact possible sur la santé humaine et les activités de pêche.
« L’impact écologique de ce type de rejet chronique de déchets radioactifs dans le Pacifique Nord pourrait être considérable », a averti M. Steiner.
Une partie des contaminants pénétrera dans les organismes vivants, et certains d’entre eux peuvent causer des troubles de la reproduction, des dommages cellulaires, des lésions génétiques et des cancers, a-t-il expliqué.
« Le risque est entièrement évitable en utilisant un stockage à long terme sur la terre ferme et des systèmes de traitement utilisant les meilleures technologies disponibles », a conclu l’expert américain.