Emmanuel Macron entend réformer les retraites pour « défendre » le modèle social français
BESOIN DE 5000 PARTENAIRES POUR LA CHAÎNE CHRETIENS TVEmmanuel Macron a défendu jeudi son projet controversé de réforme du système des retraites, expliquant vouloir dégager des marges de manoeuvre budgétaires pour financer les autres grandes réformes sociales du pays, préserver l’indépendance de la France et favoriser la transition écologique.
Interviewé par BFM TV à bord de l’avion présidentiel qui le ramenait de New York, le chef de l’Etat a répondu aux critiques des partenaires sociaux et de nombreux parlementaires, y compris de la majorité, qui s’opposent au scénario annoncé d’un simple amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), présenté lundi en conseil des ministres.
Plusieurs pistes de réforme sont à l’étude, dont celles de décaler l’âge légal d’ouverture des droits à la retraite et d’accélérer la réforme de 2014 qui prolonge la durée de cotisation nécessaire pour obtenir une retraite à taux plein.
« Je suis convaincu que c’est une nécessité. Pourquoi ? Parce que nous voyons qu’aujourd’hui, le défi qui est le nôtre est d’être plus indépendant en européen et en franco-français », a dit Emmanuel Macron, soulignant que « notre indépendance n’est pas de vivre à crédit ».
Le gouvernement a choisi de protéger les Français de l’inflation grâce au bouclier tarifaire, de soutenir l’économie pendant la crise sanitaire, et veut mener une réforme de l’hôpital, de l’éducation et de la sécurité tout en préparant la transition écologique, a-t-il développé.
« Ça coûte de l’argent. Est-ce qu’on peut le financer par le déficit ? Non. Nous sommes un des pays qui a le plus grand déficit en Europe. Peut-on le financer par plus d’impôts ? Non. Nous sommes le pays parmi ceux taxant le plus en Europe ».
« La vérité, c’est qu’il nous faut travailler plus et produire plus de richesses dans notre pays si nous voulons protéger, avoir une politique de justice sociale et défendre le modèle social français, sa force et son avenir », a-t-il ajouté.
Le Conseil d’orientation des retraites (COR) a fait savoir la semaine dernière que les dépenses du système des retraites, même si elles étaient contrôlées sur le long terme, n’étaient pas compatibles avec la trajectoire de réduction des dépenses publiques envisagée par le gouvernement pour 2027.
Le Comité de suivi des retraites a alerté jeudi sur le risque de « déséquilibres résiduels significatifs à court et moyen terme » qui pourraient être amplifiés en cas de croissance dégradée dans les années à venir et recommande au législateur de « trouver une réponse aux problèmes d’équilibrage » du système.
PEU DE SOUTIENS À L’ASSEMBLÉE
Mais l’idée d’une réforme aussi sensible à la sortie d’une pandémie et en pleine crise énergétique a entraîné une levée de bouclier des organisations syndicales et d’une grande partie des parlementaires. Selon un sondage Odoxa pour le Figaro publié mercredi, 55% des Français ne veulent pas que la réforme des retraites soit relancée.
Pour le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, le projet envisagé risque de « mettre le feu au pays ». Force ouvrière et la CGT promettent déjà grèves et manifestations.
Ce dossier divise même la majorité. Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, s’est déclarée jeudi hostile à l’idée de réformer par amendement, prônant une plus grande concertation au nom de la « nouvelle méthode » dont se réclame l’exécutif.
Dans le sillage du président du MoDem, François Bayrou, sur cette question, les députés centristes ont fait savoir qu’ils voteraient certainement contre ce projet s’il figurait dans le texte budgétaire.
Les Républicains, en pleine campagne pour désigner leur président, réprouvent la méthode du gouvernement. Ils attendent néanmoins de connaître le projet final avant de se prononcer.
S’il ne convainc pas les députés, le gouvernement a la possibilité d’imposer la réforme en ayant recours à l’article 49.3 qui permet l’adoption d’une loi sans vote.
« Emmanuel Macron n’est pas rééligible, il n’a donc pas de limite. Il peut dire ‘moi je règle les problèmes, je suis courageux, vous m’avez réélu pour agir, je suis celui qui fait, pensez à nos enfants’. Bien sûr, ça peut partir dans un conflit social redoutable, donc sa décision ce sera sur ça, le risque social », a dit à Reuters un parlementaire socialiste sous couvert d’anonymat.
La Première ministre, Elizabeth Borne, n’a pas encore livré publiquement son avis sur le sujet.
A lire aussi : Retraites-Des dépenses contenues mais incompatibles avec les objectifs du gouvernement-COR
(Reportage Caroline Pailliez, Elizabeth Pineau et Bertrand Boucey, édité par Kate Entringer et Sophie Louet)