Le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah entre en vigueur
À l'heure de l'intelligence artificielle, l'accès à des faits vérifiables est crucial. Soutenez le Journal Chrétien en cliquant ici.par Maya Gebeily et Aziz Taher
WASHINGTON/BEYROUTH/JÉRUSALEM (Reuters) – Un cessez-le-feu est entré en vigueur mercredi entre Israël et le Hezbollah libanais après la conclusion d’un accord préparé par les Etats-Unis et la France visant à mettre fin aux combats au Liban, une rare victoire de la diplomatie dans une région secouée par deux guerres depuis plus d’un an.
L’armée libanaise, chargée de veiller au respect du cessez-le-feu, a indiqué qu’elle se préparait à se déployer dans le sud du pays et a demandé aux habitants des villages frontaliers de ne pas rentrer chez eux avant le retrait de l’armée israélienne.
Le Premier ministre par intérim du Liban, Najib Mikati, a appelé mercredi Israël à s’engager pleinement et à « se retirer de toutes les régions et positions qu’il a occupées ».
Alors que le cessez-le-feu est largement respecté mercredi matin, Israël a déclaré avoir identifié des agents du Hezbollah retournant dans des zones proches de la frontière et avoir ouvert le feu pour les empêcher de s’approcher.
L’accord, qui promet de mettre fin au conflit à la frontière israélo-libanaise déclenché par la guerre de Gaza l’année dernière, constitue une avancée majeure pour les États-Unis dans les derniers jours de l’administration du président Joe Biden.
Il devrait permettre à Israël de se concentrer sur son offensive dans la bande de Gaza où le pays s’est engagé à détruire le Hamas après l’attaque du groupe islamiste sur son territoire le 7 octobre 2023.
L’accord de trêve au Liban a relancé les appels à des nouvelles négociations en vue d’un cessez-le-feu dans l’enclave palestinienne, qui ont échoué jusqu’à présent.
« Au cours des prochains jours, les Etats-Unis feront de nouveaux efforts avec la Turquie, l’Egypte, le Qatar, Israël et d’autres pour obtenir un cessez-le-feu à Gaza avec la liberation des otages et la fin de la guerre sans le Hamas au pouvoir », a écrit le président américain Joe Biden sur X.
Le conseiller à la sécurité nationale de la Maison blanche, Jake Sullivan, a précisé lors d’un entretien accordé à la chaîne d’information MSNBC que Joe Biden avait l’intention de commencer à travailler sur un possible cessez-le-feu à Gaza dès ce mercredi.
« La force doit laisser la place au dialogue et à la négociation. C’est désormais chose faite au Liban. Ça doit être le cas au plus vite dans la bande de Gaza », a déclaré pour sa part le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot sur franceinfo.
Auprès de Reuters, Sami Abu Zuhri, un haut responsable du Hamas, a dit que le mouvement islamiste « apprécie » le droit du Liban à conclure un accord qui protège son peuple et qu’il espérait un accord pour mettre fin à la guerre dans la bande de Gaza.
L’Egypte et le Qatar, qui ont tenté sans succès avec les Etats-Unis de négocier un cessez-le-feu dans l’enclave palestinienne, ont tous les deux salué la trêve au Liban.
Le ministère des Affaires étrangères du Qatar a déclaré mercredi qu’il espérait que cette trêve conduirait à un accord similaire pour mettre fin à la guerre dans la bande de Gaza.
RETOUR DES DÉPLACÉS
Au Liban, des voitures et des camionnettes remplies de matelas, de valises et même de meubles ont traversé la ville portuaire de Tyr, lourdement bombardée dans les derniers jours, en direction du sud, après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu.
Père de quatre enfants, Hussam Arrout indique avoir hâte de retourner dans sa maison du village frontalier de Mays al-Jabal, au sud du Liban.
« Les Israéliens ne se sont pas complètement retirés, ils sont toujours sur le fil du rasoir. Nous avons donc décidé d’attendre que l’armée annonce que nous pouvons entrer. Ensuite, nous mettrons immédiatement les voitures en marche et irons au village », a-t-il déclaré.
Le cessez-le-feu, destiné à être « permanent » selon les mots de Joe Biden, est entré en vigueur à 04h00 (02h00 GMT) dans la nuit de mardi à mercredi. « Ce qui reste du Hezbollah et des autres organisations terroristes ne sera pas autorisé à menacer à nouveau la sécurité d’Israël », a déclaré Joe Biden qui s’est exprimé depuis la Maison blanche immédiatement après l’approbation, à la quasi-unanimité, de l’accord de cessez-le-feu par le cabinet de sécurité israélien.
Israël retirera progressivement ses troupes du sud du Liban dans un délai de soixante jours pendant lequel des forces régulières libanaises se déploieront dans ce bastion du Hezbollah, afin de s’assurer que le groupe chiite pro-iranien ne s’y réinstalle pas, a expliqué le président américain.
Le ministre libanais des Affaires étrangères, Abdallah Bou Habib, a déclaré que l’armée libanaise serait prête à déployer au moins 5.000 hommes dans le sud du pays après le retrait israélien.
Benjamin Netanyahu s’est dit prêt à mettre en oeuvre un cessez-le-feu, prévenant toutefois qu’Israël riposterait avec force à toute violation.
L’accord permettra à Israël de se concentrer sur « la menace iranienne », de reposer son armée et d’accroître l’isolement du Hamas, a justifié le chef du gouvernement israélien, dont certains ministres nationalistes sont opposés à l’accord.
« RÉTABLISSEMENT DURABLE DU CALME »
L’accord, ont assuré Joe Biden et son homologue français Emmanuel Macron dans une déclaration conjointe, « créera les conditions nécessaires au rétablissement durable du calme et permettra le retour en toute sécurité dans leurs foyers des habitants des deux côtés de la Ligne bleue », la frontière entre les deux pays tracée par les Nations unies.
Le Hezbollah n’a pas officiellement fait de commentaire sur le cessez-le-feu, mais un représentant politique du mouvement chiite libanais, Hassan Fadlallah, a déclaré à la chaîne libanaise Al-Jadeed TV que le groupe sortirait renforcé de la guerre.
« Des milliers (de personnes) rejoindront la résistance. Le désarmement de la résistance était une proposition israélienne qui n’a pas abouti », a dit Hassan Fadlallah, qui est également membre du Parlement libanais.
Le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Esmaeil Baghaei, a déclaré que l’Iran saluait le cessez-le-feu.
Dans un message vidéo diffusé par l’Elysée, Emmanuel Macron a salué mardi soir « l’aboutissement d’efforts entrepris depuis de longs mois » par Paris et Washington auprès des autorités israéliennes et libanaises.
« On pourrait dire que cet accord, c’est le fruit d’un travail d’arrache-pied qui a été mené depuis de longs mois, et que c’est un succès pour la diplomatie française et que nous pouvons en être fiers », a dit Jean-Noël Barrot, précisant que les 700 soldats français du contingent français de la Finul présents au Liban allaient jouer « un rôle important ».
Après quasiment un an d’échanges de tirs de roquettes et de missiles de part et d’autre de la frontière israélo-libanaise, Israël a déclenché une vaste offensive contre le Hezbollah en septembre dernier, tuant son chef Hassan Nasrallah.
Depuis le début de la guerre à Gaza le 7 octobre 2023, et des tirs de roquettes du Hezbollah en soutien au Hamas palestinien, au moins 3.823 personnes ont été tuées dans les attaques israéliennes au Liban, selon le dernier bilan fourni mardi par le ministère libanais de la Santé. Une centaine de civils et soldats israéliens ont été tués par les attaques du Hezbollah, selon les autorités israéliennes.
(Jeff Mason, Maya Gebeily, Steven Scheer et Simon Lewis, avec Gabriel Stargardter, Emilie Madi, Laila Bassam, Emma Farge, John Irish, Emily Rose, Adam Makary, Humeyra Pamuk, Cecile Mantovani et Enas Alashray; version française Camille Raynaud et Diana Mandiá, édité par Zhifan Liu et Blandine Hénault)