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La Banque centrale européenne laisse ses taux inchangés

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FRANCFORT (Reuters) – Le président de la Banque centrale européenne (BCE), Mario Draghi, a défendu une dernière fois jeudi la politique monétaire ultra-accommodante qu’il a orchestrée pendant huit ans, un mandat qui s’achèvera le 31 octobre comme il a commencé, c’est-à-dire en essayant de relancer une économie fragilisée.

Dans un contexte marqué par une croissance à peine positive et une dégradation des perspectives d’activité, l’Italien peut difficilement espérer partir sous un tonnerre d’applaudissements même s’il restera comme le « sauveur » de l’euro grâce au discours de juillet 2012 dans lequel il avait promis de préserver « par tous les moyens » (« whatever it takes ») la monnaie unique, alors menacée par la crise de la dette.

La BCE étant aujourd’hui confrontée à la faiblesse persistante de l’inflation, qui n’atteint même pas la moitié de son objectif et ne semble pas devoir rebondir dans les mois à venir, Mario Draghi a laissé la porte ouverte à la possibilité d’un assouplissement supplémentaire de la politique monétaire avant de céder son fauteuil à Christine Lagarde.

Il a assuré que les avantages de la politique ultra-accommodante actuelle l’emportaient de loin sur ses inconvénients et il a nié que les critiques exprimées publiquement par plusieurs « faucons » de la BCE ces dernières semaines aient gâché la fin de sa présidence.

« Je me considère comme quelqu’un qui s’est efforcé de respecter son mandat de la meilleure manière possible », a dit Mario Draghi, qui n’aura pas relevé une seule fois un taux d’intérêt en huit ans.

« Ces désaccords sont souvent rendus publics et souvent, ils ne le sont pas (…). J’ai donc considéré que cela faisait partie du débat et des discussions en cours. »

LES TAUX NÉGATIFS, EXPÉRIENCE « TRÈS POSITIVE », DIT DRAGHI

Tout en assurant que la BCE restait à l’affût de signes traduisant des conséquences indésirables des taux d’intérêt extrêmement bas, voire négatifs, il a ajouté que ceux-ci avaient soutenu l’économie en favorisant le crédit et l’emploi.

« Pour nous, cela a été une expérience très positive », a-t-il dit.

Prié de dire quel conseil il pouvait donner à Christine Lagarde, qui a assisté à la réunion de jeudi mais n’a pas participé aux débats, il a répondu: « Aucun conseil n’est nécessaire. »

Le Conseil des gouverneurs a, sans surprise, laissé les taux directeurs inchangés: le taux de refinancement reste fixé à zéro et celui de la facilité de dépôt à -0,5%; ce dernier avait été réduit de dix points de base le 12 septembre.

Les taux resteront à leurs niveaux actuels, voire plus bas, tant que les perspectives d’inflation ne convergeront pas durablement vers l’objectif de la BCE d’une hausse des prix légèrement inférieure à 2% sur un an, réaffirme son communiqué.

La BCE a confirmé qu’elle reprendrait ses achats d’actifs à compter du 1er novembre au rythme de 20 milliards d’euros par mois et qu’elle les maintiendrait « aussi longtemps que nécessaire ».

Ces décisions n’ont pas surpris les marchés financiers; vers 14h00 GMT, l’euro cédait 0,15% à 1,1115 dollar et le rendement du Bund allemand à dix ans, référence pour l’ensemble des marchés obligataires de la zone euro, était quasi inchangé à -0,402%.

LAGARDE DEVRA GÉRER LES DÉSACCORDS

Les turbulences au sein de la BCE risquent de persister et l’une des premières missions de Christine Lagarde consistera sans doute à tenter de répondre aux objections des membres du Conseil qui critiquent les taux négatifs et les achats massifs en mettant en avant leur coût pour les épargnants, les banques et le secteur de l’épargne retraite comme leur manque d’efficacité en terme de relance de l’inflation.

Mario Draghi a souligné que les décisions de septembre avaient toutes été prises à la majorité et qu’elles avaient été confirmées jeudi. Mais son ton rassurant pourrait ne pas suffire à rassurer.

« Les désaccords au sein du Conseil des gouverneurs autour du dernier paquet de mesures ne peuvent pas être ignorées, notamment parce qu’elles ne proviennent plus exclusivement des mêmes pays du coeur (de la zone euro) », dit ainsi Gilles Moëc, chef économiste d’Axa.

Christine Lagarde a déjà promis un réexamen du cadre de la politique monétaire, autrement dit ses objectifs et ses outils, un exercice dans lequel s’est également lancé la Réserve fédérale américaine.

Mais pour beaucoup d’observateurs, le problème de fond auquel est confrontée la BCE tient au fait qu’elle n’a aucune influence sur d’importants facteurs pesant sur les prix, qu’il s’agisse de l’évolution démographique, du progrès technologique ou de la dépendance de la zone euro aux exportations.

Et les appels de Mario Draghi comme de la future présidente en faveur d’un effort budgétaire des Etats qui en ont les moyens, comme l’Allemagne ou les Pays-Bas, afin de compléter les mesures monétaires, restent pour l’instant sans réponse.

« Nous pensons que la politique monétaire de la BCE sera en pilotage automatique pendant un moment », explique BNP Paribas. « Nous pensons qu’elle maintiendra sa position actuelle hyper-accommodante bien au-delà de 2020 et que le seuil déclenchant un assouplissement supplémentaire sera plutôt élevé. »

(Patrick Vignal et Marc Angrand pour le service français, édité par Jean-Stéphane Brosse)

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