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Grève contre la réforme des retraites en France

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Un vaste mouvement de grèves et manifestations dans les secteurs public et privé a débuté jeudi en France contre le projet gouvernemental de réforme des retraites, un nouvel acte social du quinquennat après les « Gilets jaunes » dont l’exécutif redoute qu’il n’égale la lame de fond de 1995.

Les syndicats, qui ne sont pas parvenus depuis 2017 à faire plier Emmanuel Macron, espèrent s’imposer dans ce bras de fer sur une réforme déterminante dont le principe est posé, mais qui reste à écrire.

L’exécutif, confronté à une agrégation des mécontentements, affiche sa fermeté sur l’objectif d’un système universel de retraites par points supprimant les régimes spéciaux, mais se ménage une marge de négociation, sur l’entrée en vigueur de la réforme particulièrement, mais aussi la pénibilité et les droits familiaux.

Sa capacité d’action se mesurera à l’aune de la contestation de jeudi et des jours, voire des semaines, qui suivent, avec la menace d’une grève « illimitée » dans les transports à l’approche des vacances de Noël.

« Les transports vont être très compliqués aujourd’hui (jeudi) comme demain et probablement ce week-end », a averti le secrétaire d’Etat aux Transports Jean-Baptiste Djebbari sur RTL. « Nous pensons que la grève peut encore durer quelques jours. »

Le gouvernement prend aussi très au sérieux le risque de violences, avec la mobilisation probable de « gilets jaunes radicaux » et de « black blocs » dans la manifestation parisienne ce jeudi.

Quelque 250 rassemblements et défilés ont été programmés dans le pays.

Les perturbations sont importantes, particulièrement dans les transports et l’Education nationale.

Dix pour cent seulement des trains de la SNCF circulent jeudi, dix stations du métro parisien ont été fermées, avec un trafic « fortement perturbé » sur les autres lignes selon la RATP.

Les deux entreprises publiques encouragent via leurs réseaux d’information les « mobilités alternatives » comme le covoiturage, le vélo, les trottinettes et scooters électriques.

Les difficultés de circulation attendues sur les routes ne se sont pas matérialisées dans la matinée : vers 08h30 (07h30 GMT), le site de la Direction des routes Ile-de-France, Sytadin.fr, comptabilisait 90 km d’embouteillages en région parisienne, contre 300 km un jour habituel.

Des entreprises ont opté pour le télétravail.

Personnels des transports, enseignants, étudiants, policiers, avocats, personnels hospitaliers, dans les raffineries, les universités, la collecte des ordures… : nombre de secteurs sont affectés.

« ÇA VA PÉTER TRÈS FORT »

Dans l’Education nationale, « plus du tiers des écoles seront fermées jeudi », selon le SNUipp-FSU, syndicat majoritaire dans les écoles primaires. Le ministère s’attend à 55% de grévistes dans le premier degré, dont 78% à Paris. Dans le second degré, « environ 50% des enseignants » seront en grève.

« C’est une mobilisation assez forte« , a reconnu le ministre de l’Education Jean-Michel Blanquer sur France 2.

La CGT, FO, la FSU et Solidaires sont à l’origine de l’appel à cette grève interprofessionnelle. La CFE-CGC a appelé à manifester, la CFTC laisse ses syndicats libres de rallier le mouvement. La CFDT, dont le soutien à la réforme gouvernementale s’érode, ne se joint pas au mouvement mais sa branche Cheminots a déposé un préavis de grève.

« Le 5 décembre, je pense que ça va péter très fort. Le corps social refuse ce qui lui arrive et il y a beaucoup de réfractaires au changement. Mais il faut passer par la colère pour arriver à la phase d’acceptation. Il faudra tenir bon », souligne un député de la majorité.

Le haut-commissaire aux Retraites Jean-Paul Delevoye livrera les conclusions de ses discussions avec les partenaires sociaux « le 9 ou le 10 décembre« , notamment sur le mode de transition des régimes spéciaux vers le système unique, le Premier ministre, Edouard Philippe, dévoilant ensuite les grandes lignes du projet de loi pour un examen au Parlement début 2020.

« On va vivre une forme d’affrontement assez puissant sur une réforme (…) qui n’est encore inscrite nulle part« , déplore le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, qui ne participera pas au mouvement.

« En termes de tensions, de cohésion sociale, de sécessions qui existent au sein de la société, c’est beaucoup plus fort qu’en 1995 », souligne-t-il dans un entretien à Reuters.

Le mouvement social de l’automne 1995 (24 novembre-15 décembre) contre le « plan Juppé » de refonte de la Sécurité sociale, des retraites de la Fonction publique et des régimes spéciaux (SNCF, RATP, EDF) fut le plus important depuis les événements de Mai 68, drainant des millions de personnes dans les rues. Alain Juppé, mentor d’Edouard Philippe, cédera sur les retraites, pas sur la Sécurité sociale.

Selon un sondage Harris Interactive pour RTL et AEF Info diffusé mercredi, 69% des Français soutiennent la grève et 70% disent leur inquiétude face à la perspective d’un régime universel de retraites par points.

(Sophie Louet, édité par Jean-Stéphane Brosse et Jean-Michel Bélot)

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