Le déficit français entrave les projets de dépenses de défense de Macron
par Leigh Thomas
PARIS (Reuters) – Emmanuel Macron souhaite augmenter les dépenses de défense de la France alors que Washington menace de retirer sa garantie de sécurité européenne, une tâche compliquée par l’état des finances publiques du pays.
Pénalisée par un des déficits budgétaires les plus importants de l’Union européenne, Paris est soumis à une pression constante pour maîtriser ses dépenses mais le contexte né du réchauffement des relations entre Donald Trump et Vladimir Poutine et du gel temporaire de l’aide militaire à l’Ukraine a changé la donne.
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En Allemagne, les partis qui espèrent former le prochain gouvernement se sont mis d’accord mardi sur une révision majeure des règles d’endettement, ouvrant la voie à des dépenses massives en matière de défense et d’infrastructures.
Le même jour, la Commission européenne a proposé d’emprunter jusqu’à 150 milliards d’euros pour les prêter aux gouvernements de l’UE dans le cadre d’un plan de réarmement. Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, a quant à lui déclaré qu’il porterait les dépenses de défense à 2,5% du PIB d’ici à 2027 et qu’il viserait à terme un objectif de 3%.
PLUS VITE ET PLUS FORT
Emmanuel Macron, qui prononcera mercredi à 20 heures une allocution, a déclaré cette semaine au journal Le Figaro que les pays européens devaient porter leurs dépenses de défense à « environ 3-3,5 % », ce qui est nettement plus élevé que l’objectif actuel de 2% fixé pour les membres de l’Otan.
La France a déjà prévu d’augmenter ses dépenses militaires de 3 milliards d’euros par an jusqu’en 2030 dans le cadre d’une loi de programmation de la défense sur le long terme, mais le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a prévenu qu’elle devrait être révisée pour refléter les nouvelles réalités géopolitiques.
Jeudi dernier sur franceinfo, il a jugé excessif un objectif de 5% du PIB réclamé par Donald Trump pour les pays de l’Otan, ce qui représenterait pour la France 140 milliards d’euros, mais il a souhaité trouver un « poids de forme », qu’il n’a pas chiffré, entre 68 milliards, l’objectif fixé par la loi de programmation pour 2030, et 140 milliards.
La France respecte l’objectif de 2% fixé par l’Otan, mais contrairement à la plupart des autres membres, elle finance un éventail plus large d’engagements en matière de défense, allant d’un arsenal nucléaire à un porte-avions, en passant par des programmes d’armement nationaux, tels que l’avion de chasse Rafale.
Toutefois, pour porter les dépenses de défense à 3% du PIB, la France devrait trouver 30 milliards d’euros supplémentaires par an, selon des calculs de Reuters.
« Nous devons aller plus vite et plus fort », a déclaré le ministre des finances Eric Lombard sur franceinfo mardi, assurant que les dépenses sociales ne seraient pas sacrifiées pour payer la facture.
Néanmoins, Emmanuel Macron a prévenu que des choix budgétaires difficiles étaient inévitables, citant l’exemple du début des années 1960, lorsque le président Charles de Gaulle a investi massivement pour construire l’arsenal nucléaire de la France.
VOLONTÉ POLITIQUE ?
Extrême gauche mise à part, la plupart des partis français sont favorables à une augmentation des dépenses de défense, mais il n’y a pas de consensus sur la manière de la financer, surtout si elle nécessite des coupes sombres dans d’autres domaines.
Alors que la Grande-Bretagne augmente ses dépenses de défense, Londres prévoit de réduire son aide au développement, une piste difficilement réalisable par la France qui l’a déjà réduite de 30% dans son budget 2025.
Tout en excluant d’augmenter l’impôt sur les sociétés pour financer la défense, Eric Lombard a déclaré que les plus aisés pourraient contribuer davantage, une solution susceptible de plaire à gauche où les socialistes ont appelé au « patriotisme fiscal » pour financer la défense.
Une proposition de la Commission européenne visant à exclure les dépenses de défense de la limite fixée par l’UE permettrait d’alléger la pression politique.
« Nous sommes aussi sous contrainte budgétaire (…). Notre pays est très endetté. Nous avons 3.300 milliards d’euros de dettes, c’est-à-dire que chaque année nous versons à nos créanciers, à ceux qui nous prêtent, plus de 50 milliards d’euros, qui est d’ailleurs à peu près le budget de la défense », a souligné Eric Lombard.
Parmi les pistes évoquées pour financer l’augmentation des dépenses de défense figure celle d’un recours à l’épargne des Français, présentée comme l’une des plus importantes de l’Union européenne, sous la forme de livrets et d’assurance-vie.
« Mobiliser l’épargne des Français pour effectivement pouvoir investir dans la défense, c’est évidemment une piste intéressante à mettre sur la table (…) Créer un produit dédié est une possibilité qui est étudiée », a noté mercredi la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas, lors du compte rendu du conseil des ministres.
(Rédigé par Leigh Thomas, avec la contribution de John Irish; Nicolas Delame pour la version française, édité par Jean-Stéphane Brosse)
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