Gilles Cavin, élu président du Parlement de l’Eglise évangélique réformée de Suisse (EERS)
À l'heure de l'intelligence artificielle, l'accès à des faits vérifiables est crucial. Soutenez le Journal Chrétien en cliquant ici.De plan de carrière, le pasteur Gilles Cavin n’en a jamais eu. Depuis deux décennies, il ne cesse pourtant de gravir les échelons du monde réformé, d’abord au sein de l’Eglise réformée vaudoise (EERV), puis dans l’Eglise réformée valaisanne (EREV), dont il a été jusqu’à peu le président. Dernière étape en date, ce lundi 4 novembre, avec son élection à la présidence du Synode (Parlement) de l’Eglise évangélique réformée de Suisse (EERS).
Vice-président du Conseil de l’EERS et président des réformés fribourgeois, Pierre-Philippe Blaser trace le portrait d’un «redoutable débatteur» et «compagnon fiable dans le travail comme dans la vie»: «Il se montre assidu dans les affaires sérieuses, et ne manque pas de ressources non plus quand il s’agit de partager un moment de rire, qu’il alimente avec aisance.»
«J’ai toujours été sollicité et je trouve que c’est assez agréable», réagit humblement l’intéressé. «Mon but a toujours été de servir, pas de réussir.» Solidement ancré dans sa foi, ce natif de Lausanne aime à se laisser porter par le souffle de l’existence, qui l’a notamment conduit à établir domicile à Sierre, après neuf ans de ministère dans la paroisse du Mont-Aubert à Concise (VD). Une décision qui n’a pourtant pas été facile à prendre, alors que le port de plaisance de cette commune avait pu accueillir son voilier: «Mon dériveur a même eu sa place au port avant que j’aie les clés de la cure!»
Cette passion pour la voile, Gilles Cavin la tient sans conteste de son grand-père maternel, qui a fréquenté la Confrérie des pirates d’Ouchy. D’aussi loin qu’il se souvienne, il dit avoir toujours «aimé cet univers lacustre»: «Quand on fait de la voile, on est pris par les éléments, concentré sur la direction du vent, l’intensité des vagues. On est en totale symbiose avec la nature et on ne pense à rien d’autre.»
Alors qu’il s’était résolu à décliner la proposition de reprendre la paroisse de Sierre, des paroles entendues lors du culte dominical le convainquent de ne pas «refuser pour de mauvaises raisons, soit juste parce que ce n’était pas confortable». Acceptant alors le poste, le pasteur vaudois emménage avec son épouse et leurs trois filles – dont deux jumelles «dizygotes qui sont très différentes» – dans la cure valaisanne, où nous le rencontrons, entre Eglise et poulailler – «avec trois poules: une pour chaque fille».
«Pasteur à l’ancienne»
«Quand je me suis décidé à devenir pasteur, il était évident que je vivrais en cure», formule Gilles Cavin, qui se définit comme un «pasteur à l’ancienne». «Je suis disponible du lundi matin au dimanche soir, et je n’ai pas de numéro de téléphone privé autre que le professionnel», renseigne-t-il, nous pointant son bureau, juste à côté du salon.
Un sens du service qui semble évident aux yeux du ministre, «né entre deux pages de Bible» au sein d’une famille évangélique très pratiquante. S’il a toujours apprécié la vie d’Eglise, sa vocation a parfois étonné son entourage, qui le voyait peu destiné à faire des études de théologie: «Je n’ai jamais été un passionné de l’école obligatoire, j’ai toujours fait le minimum.» Aux vocabulaires d’allemand et d’anglais, le jeune garçon préférait de loin se rendre utile de ses mains, «en tenant un pinceau ou un sécateur dans le jardin».
D’un tempérament «assez timide» mais «toujours déconneur», le jeune homme s’engage naturellement dans le groupe de jeunes de son Eglise, puis comme chef aux Flambeaux de l’Evangile, où il rencontre son épouse. «C’est par elle que je suis entré en contact avec l’Eglise réformée», signale-t-il. Et de commenter sa décision de rejoindre l’Eglise nationale: «Dans une Eglise évangélique, il n’y a que des convaincus. Or je voulais être pasteur aussi pour ceux qui ne sont pas des piliers d’église, être en lien avec la société.»
Dans le même esprit, Gilles Cavin affectionne particulièrement le concept de «pasteur généraliste», qui accompagne les personnes dans les différentes étapes de l’existence. «J’aime pouvoir assister une famille en deuil et puis, le soir même, faire du culte de l’enfance.» Il admet également apprécier une certaine indépendance qu’offre ce statut: «Quand on est pasteur dans une petite paroisse, on est un peu seul à bord de son bateau. Cela engage davantage de responsabilité, mais cela a le mérite de rendre les choses plus claires: on ne peut ni refiler la patate chaude ni blâmer son collègue», illustre-t-il.
Vaudois ou Valaisan?
Avec Gilles Cavin, c’est cependant toute la famille qui est mise à contribution pour l’Eglise. «Nos filles ont toujours été des enfants de paroisse, qui passaient de genoux en genoux», raconte-t-il non sans fierté. «Maintenant encore, on ne pourrait pas organiser un événement sans leur demander de participer: elles nous en voudraient!»
A Sierre depuis onze ans, le Vaudois ne saurait se déclarer Valaisan pour autant. «Je dirais plutôt que je suis comme une petite arvine dans un verre de vin vaudois», s’amuse-t-il à définir. «Fondamentalement, je suis Vaudois. Ce sont mes origines, mon pays. Mais je suis très à l’aise en Valais», poursuit-il. Gilles Cavin n’en a pas moins gardé à Concise son port d’attache… pour son bateau, «un Flying forty» à présent. «J’en ai fait mon lieu de ressourcement. Quand j’y vais, je passe la nuit dessus, parfois après m’être fait une petite fondue au réchaud.»
«J’ai toujours apprécié son humilité, son professionnalisme et son humour», formule Xavier Paillard, ancien président de l’EERV, à l’annonce de son élection. «Il ne se prend pas au sérieux et en même temps il est très soucieux de la dimension institutionnelle de l’Eglise. Même dans son habillement, il sait être à la hauteur du moment.»
«Les marins d’eau de mer rigoleraient peut-être du marin d’eau douce que je suis, mais il y a pour moi du spirituel à naviguer», conclut l’intéressé. «Il faut prévoir, mais toujours être prêt pour l’imprévisible. Je trouve cela assez beau…»
BIO EN DATES
1976 Naissance à Lausanne, d’une mère secrétaire et d’un père ingénieur en génie civile 2003 Licence en théologie à la Faculté de Lausanne 2004 Ministre de la paroisse du Mont-Aubert, à Concise 2013 Devient pasteur de la paroisse de Sierre 2020 Présidence de l’Eglise réformée évangélique du Valais (EREV) jusqu’en 2024 2021 Présidence de l’Assemblée de la Conférence des Eglises réformées romandes (CER) pendant trois ans 2023 Devient vice-président du Synode de l’EERS 2024 Est elu président du Synode de l’EERS