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Wall Street se prépare à une hausse des droits de douane, des baisses d’impôts et une volatilité accrue

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par Lewis Krauskopf

(Reuters) – Avec le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, Wall Street anticipe la possibilité d’une baisse des impôts, d’une déréglementation dans plusieurs secteurs et la nouvelle donne avec un président américain prompt à s’exprimer sur tous types de sujets, allant du marché boursier au dollar.

Les projections de l’institut Edison Research et des médias américains montrent que le candidat républicain a remporté l’élection présidentielle américaine face à la vice-présidente démocrate sortante Kamala Harris, qu’il a devancée dans plusieurs des Etats dits « pivots » (« Swing States ») considérés comme décisifs pour le scrutin.

Donald Trump a fait des droits de douane et des réductions d’impôts des éléments stratégiques de son programme économique, une thématique placée par beaucoup d’électeurs au premier plan. Le milliardaire entend également procéder à une déréglementation dans des domaines allant du secteur bancaire aux cryptomonnaies.

La promesse liée à la mise en oeuvre d’une telle politique a déjà fait grimper bon nombre d’actifs financiers, notamment le dollar, les actions des banques régionales et le cours du bitcoin.

Avec une administration Trump, « les marchés pensent globalement qu’elle est favorable à la croissance, même si elle s’accompagne d’une inflation et de taux d’intérêt plus élevés », explique David Bianco, responsable des investissements pour les Amériques chez DWS Group.

Si les événements politiques peuvent faire bouger les marchés, les investisseurs affirment qu’ils ont généralement tendance à s’effacer devant les forces macroéconomiques et l’état de santé des entreprises, ainsi que les événements mondiaux.

Par exemple, l’indice S&P 500 a augmenté de près de 70% au cours du premier mandat de Donald Trump, grâce à la montée en flèche des valeurs technologiques, alors même que sa politique en matière de droit de douane provoquait des accès de volatilité. Dans le même temps, le secteur de l’énergie a subi de lourdes pertes, l’économie mondiale étant paralysée par la pandémie de COVID-19. L’administration Trump a l’époque était pourtant favorable au développement des combustibles fossiles.

LA SITUATION ÉCONOMIQUE A CHANGÉ DEPUIS 2016

L’élection de Donald Trump en 2016 a déclenché ce que l’on appelle le commerce de la reflation, les investisseurs s’emparant d’un éventail d’actifs comme les contrats à terme sur le cuivre et les actions des entreprises de construction, convaincus que les réductions d’impôts et d’autres politiques de relance stimuleraient la croissance économique américaine.

Mais le paysage économique a changé et certains investisseurs estiment que les mouvements de 2016 ne constituent pas une feuille de route précise pour l’évolution des actions, des obligations et du dollar dans les mois à venir.

L’économie américaine a enregistré un taux de croissance annualisé du PIB de 2,8% au troisième trimestre 2024, contre un peu moins de 2% en 2016. Et si des mois de politique monétaire restrictive ont permis de réduire l’inflation par rapport aux sommets de 40 ans atteints en 2022, certains investisseurs redoutent désormais une réaccélération des prix à la consommation via de nouveaux droits de douane ou des réductions d’impôts.

Les signes d’une reprise de l’inflation pourraient également amener la Réserve fédérale américaine (Fed) à revoir sa trajectoire en matière de taux directeurs. La banque centrale commence tout juste à assouplir sa politique monétaire après avoir relevé agressivement le loyer de l’argent pour juguler une inflation élevée.

La victoire de Donald Trump en 2016 « a été une surprise générale, la réaction positive du marché a également été une surprise, et le positionnement des investisseurs à l’approche des élections était pour une toile de fond désinflationniste », ont écrit lundi les stratèges de JPMorgan.

Cette fois-ci, dans les dernières semaines de la course à la Maison blanche, les marchés ont nettement parié en faveur d’une victoire de Donald Trump sur Kamala Harris.

DROITS DE DOUANE ET RÉFORME FISCALE

La mise en oeuvre des droits de douane que Donald Trump s’est engagé à imposer avec une hausse de 10% sur toutes les importations et de 60% sur les produits en provenance de Chine pourrait faire une grande différence dans la manière dont les investisseurs aborderont les marchés d’actifs dans les mois à venir.

Selon une étude de Deutsche Bank, un renoncement de Donald Trump à ces droits de douane permettrait à l’économie américaine de bénéficier d’environ un demi-point de pourcentage de PIB supplémentaire. Une application des droits de douane rognerait le PIB d’environ un quart de point, selon la même étude.

« Des points d’interrogation subsisteront quant à l’agressivité de Trump en matière de droits de douane, et ce quelle que soit la composition du Congrès, étant donné qu’ils peuvent être imposés par décret », a déclaré Garrett Melson, stratège chez Natixis Investment Managers.

Donald Trump souhaite également réformer la fiscalité des entreprises, notamment en ramenant le taux d’imposition des sociétés à 15%, pour les entreprises qui fabriquent leurs produits aux Etats-Unis, après avoir ramené ce taux de 35% à 21% sous son premier mandat, entre 2017 et 2021.

Ces réductions d’impôts – qui devront être adoptées par le Congrès – pourraient soutenir les bénéfices des entreprises et le sentiment des investisseurs, même si l’ampleur de ce coup de pouce reste à déterminer.

Selon les estimations des stratèges de Goldman Sachs, une réduction du taux d’imposition à 15% augmenterait les bénéfices des entreprises composant l’indice S&P 500 d’environ 4%.

« À court terme, les investisseurs en actions verront d’un bon oeil une victoire de Trump, car il est possible qu’il prolonge les réductions d’impôts actuelles, note Jake Seltz, gérant chez Allspring Global Investments.

Dans le même temps, de vastes réductions d’impôts pourraient susciter des inquiétudes quant à l’alourdissement de la dette américaine, alors que les investisseurs se focalisent de plus en plus sur le déficit fédéral. Les inquiétudes concernant le déficit ont pesé récemment sur la dette publique américaine, portant le rendement des bons du Trésor à dix ans, qui évolue inversement aux prix des obligations, à 4,471% mercredi, son niveau le plus élevé depuis juillet.

Les projets de Donald Trump en matière d’impôts et de dépenses augmenteraient la dette de 7.750 milliards de dollars (7.250 milliards d’euros) au cours de la prochaine décennie, selon une estimation en date du 28 octobre du Committee for a Responsible Federal Budget (Comité pour un budget fédéral responsable), un groupe de réflexion sur le budget.

La propension de Donald Trump à s’exprimer sur un large éventail de dossiers susceptibles d’influencer le marché est également un sujet d’inquiétude. Durant son premier mandat, il s’est souvent exprimé sur des sujets aussi variés que la vigueur du dollar, le commerce ou les initiatives des entreprises. Ces propos ont parfois déclenché des mouvements sur les actifs financiers.

« Les marchés sont un peu nerveux à l’idée qu’une administration Trump s’accompagnera d’une multitude de déclarations dont il sera difficile de faire le tri », note David Bianco de DWS Group.

(Reportage Lewis Krauskopf; rédigé par Ira Iosebashvili; version française Claude Chendjou, édité par Augustin Turpin)

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