Le Hamas nomme Yahya Sinwar comme chef après l’assassinat d’Ismaïl Haniyeh
Le Hamas a déclaré mardi avoir nommé son actuel numéro un dans la bande de Gaza, Yahya Sinwar, comme chef à la suite de l’assassinat d’Ismaïl Haniyeh la semaine dernière en Iran, un choix à même de renforcer la position radicale du groupe armé palestinien.
Yahya Sinwar, l’un des architectes de l’attaque du 7 octobre dernier en Israël, se cache depuis lors dans la bande de Gaza, résistant aux efforts de l’armée israélienne pour l’abattre dans le cadre du siège total de l’enclave palestinienne mené en réponse à l’attaque.
Avec l’assassinat d’Ismaïl Haniyeh mercredi dernier à Téhéran alors que celui-ci venait d’assister à la cérémonie d’investiture du nouveau président iranien, Yahya Sinwar était devenu le plus haut représentant du Hamas toujours en vie.
Le Hamas et l’Iran imputent l’assassinat d’Ismaïl Haniyeh à Israël, qui ne l’a pas revendiqué mais a déclaré avoir infligé récemment de « lourds revers » aux milices alliées de Téhéran, citant le Hamas et le Hezbollah libanais.
Israël a dit par le passé avoir abattu le numéro deux du Hamas, Saleh al-Arouri, dans une frappe à Beyrouth, ainsi que Mohammed Deif, le commandant militaire du Hamas considéré comme l’un des cerveaux de l’attaque du 7 octobre.
Dans un communiqué succinct, le Hamas a annoncé la « sélection du commandant Yahya Sinwar comme chef du bureau politique du mouvement » en remplacement d’Ismaïl Haniyeh. La nouvelle a été saluée à Gaza par une salve de roquettes.
Un diplomate de la région, au fait des négociations chapeautées par l’Egypte et le Qatar en vue d’un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, a déclaré que cette nomination « signifie qu’Israël va devoir faire face à Sinwar pour une solution à la guerre à Gaza ». « Il s’agit d’un message de ténacité, intransigeant », a-t-il ajouté.
L’armée israélienne, qui blâme Yahya Sinwar pour l’attaque du 7 octobre, a déclaré qu’elle avait toujours pour objectif de l’abattre.
« Une seule place attend Yahya Sinwar, c’est au côté de Mohammed Deif et des autres terroristes du 7 octobre », a dit le porte-parole de Tsahal, Daniel Hagari, à la chaîne de télévision Al-Arabiya, selon un communiqué de l’armée israélienne.
Yahya Sinwar, 61 ans, a passé la moitié de sa vie adulte dans des prisons israéliennes. Il fut nommé chef du Hamas pour la bande de Gaza en 2017, année lors de laquelle Ismaïl Haniyeh avait lui été élu à la tête du bureau politique, basé au Qatar.
Né dans un camp de réfugiés de Khan Younès dans le sud de la bande de Gaza, Yahya Sinwar a dirigé par le passé un organe de sécurité du Hamas chargé de traquer, de punir voire de tuer des personnes collaborant avec les services secrets israéliens.
Signe que le choix de Yahya Sinwar a fait l’unanimité parmi les cadres du Hamas, l’ancien chef du groupe, Khaled Mechaal, pressenti pour succéder à Ismaïl Haniyeh, a soutenu la nomination de Sinwar, ont déclaré des sources de haut rang.
A Washington, la Maison blanche a refusé de commenter la nomination de Yahya Sinwar. Une source proche de l’administration américaine a déclaré que cela laissait supposer que le Hamas pourrait durcir sa position dans les pourparlers indirects avec Israël, rendant encore plus difficile la conclusion d’un accord de cessez-le-feu.
D’après cette source, Israël pensait toutefois que Yahya Sinwar disposait déjà chez le Hamas du dernier mot pour approuver ou non l’arrêt des combats à Gaza.
Un représentant du Hamas a déclaré à la chaîne de télévision Al-Jazeera que le groupe restait engagé à trouver un accord de cessez-le-feu. Ossama Hamdan a ajouté que les négociations entamées par Ismaïl Haniyeh se poursuivraient avec Yahya Sinwar qui, a-t-il dit, a suivi les discussions de près.
Hani Al-Masri, analyste politique basé à Ramallah en Cisjordanie occupée, a dit pour sa part que la nomination de Yahya Sinwar représentait un défi direct pour Israël et envoyait le message que le Hamas adhère à « l’approche extrémiste » de Sinwar.
(Yomna Ehab et Jaidaa Taha, avec Nidal al-Mughrabi au Caire, Ali Sawafta à Ramallah, James Mackenzie à Jérusalem, Matt Spetalnick à Washington; version française Jean Terzian)