Bayrou défend un budget « vital », prône une immigration « dans l’ordre »
(Précise au §6 que le PS n’a pas voté la censure (non a voté contre)
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PARIS (Reuters) – Il est « vital » que la France se dote d’un budget pour 2025 pour éviter « la division », a affirmé lundi le Premier ministre François Bayrou alors que le projet de loi de finances sera discuté à partir de jeudi entre sénateurs et députés.
Au cours d’une longue interview sur LCI, le chef du gouvernement a également évoqué un « sentiment de submersion » face à l’immigration et prôné une intégration par le travail à la condition que « nous sachions garantir l’ordre ».
« Le pays n’a pas de budget, pas de majorité. Si on le laisse aller, le pays s’enfonce dans la division », a déclaré François Bayrou. « L’effort qui est le mien est pour le réunir. »
Evoquant les négociations en cours sur le budget pour 2025, susceptible de menacer la survie de son gouvernement, le Premier ministre a dit « avoir confiance dans le sentiment de responsabilité de tous ».
Après son adoption au Sénat, le projet de loi de finances 2025 sera discuté jeudi en commission mixte paritaire (CMP) composée de 14 députés et sénateurs reflétant les équilibres politiques au Parlement.
Le Parti socialiste (PS), dont le bureau national a donné pour consigne de ne pas voter mi-janvier une première motion de censure déposée par LFI à l’encontre du gouvernement, entend réclamer de nouvelles concessions lors de l’examen du texte budgétaire en CMP.
« Le Parti socialiste a présenté de nombreuses demandes et a obtenu un certain nombre de réponses », a fait valoir François Bayrou. « Il faut que chacun ait la certitude qu’il est entendu et que les aspirations des uns deviennent compatibles avec celles des autres. C’est ma responsabilité. »
« Il est vital pour le pays qu’on ait un budget et qu’il soit adopté », a-t-il dit.
Pour 2025, le gouvernement vise un effort de 53 milliards d’euros – 32 milliards d’euros d’économies et 21 milliards d’euros de recettes – pour ramener le déficit à 5,4% du PIB fin 2025.
Pour y parvenir, François Bayrou a toutefois été avare en mesures.
Interrogé sur une réduction du nombre de fonctionnaires, il l’a estimée nécessaire mais sans que cela puisse « se faire immédiatement ».
Le Premier ministre a assuré que l’annulation de la suppression de 4.000 postes dans l’Education nationale était une « décision définitive » et que l’effort annoncé pour les ministères régaliens – Armées, Justice, Intérieur – serait tenu.
Il a aussi écarté une hausse des impôts pour les ménages en 2025 et confirmé que la contribution exceptionnelle prévue pour les Français les plus fortunés et les grandes entreprises ne prévaudrait que cette année.
François Bayrou s’est aussi dit défavorable à la piste des sept heures de travail non rémunérées, évoquée par sa ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles Catherine Vautrin et avancée par le Sénat dans le cadre du budget de la Sécurité sociale. « Tout travail mérite salaire », a-t-il jugé. Et il s’est montré peu enclin à taxer les retraités au-delà d’un certain niveau de pension, comme évoqué par sa ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet.
Sur la réforme des retraites, qui fait l’objet d’une nouvelle consultation des partenaires sociaux, François Bayrou a dit espérer qu’on puisse « arriver à des accords », se disant favorable à un système par points tout en reconnaissant qu’une telle réforme était peu vraisemblable dans l’immédiat. « Je pense que c’est une piste pour l’avenir ».
Au-delà des négociations en cours sur le budget ou les retraites, François Bayrou a plaidé pour poursuivre l’action publique, refusant tout immobilisme d’ici l’élection présidentielle de 2027.
« Nous ne pouvons pas baisser les bras, constater la gravité des problèmes du pays et attendre pour les régler », a-t-il dit. « Une fois le budget adopté, nous allons partir à l’assaut de tous les problèmes, sans exception. »
IMMIGRATION PROPORTIONNÉE
L’immigration « est l’un des sujets les plus lourds devant nous », a estimé François Bayrou alors que les positions sur ce sujet divergent au sein de son gouvernement.
Quand le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau est adepte de la fermeté, son collègue de l’Economie Eric Lombard a estimé que la France devait rester un pays d’immigration.
« Les deux ont raison », a jugé le chef du gouvernement, estimant comme lors de son récent discours de politique générale devant les députés que tout est affaire de « proportion ».
« Les apports étrangers sont positifs pour un peuple à condition qu’ils ne dépassent pas une proportion », a-t-il dit, estimant qu’en France, « on s’en approche ».
« Il y a des métiers pour lesquels on ne trouve plus de Français qui veulent les occuper », a-t-il ajouté. « Le travail est une machine à intégrer à la condition que nous sachions garantir l’ordre. »
Se disant ouvert au référendum, François Bayrou a néanmoins exclu une consultation sur le sujet de l’immigration, impossible constitutionnellement, a-t-il fait valoir.
Interrogé sur ses relations avec le président Emmanuel Macron, François Bayrou a évoqué une « situation de coresponsabilité ». « On se voit toujours », a-t-il affirmé, évoquant entre les deux hommes « une forme de respect un peu différente du copinage habituel ».
Réfutant toute impossibilité à gouverner face à une Assemblée fragmentée dans lequel aucun camp n’a la majorité, le Premier ministre a prôné « un pluralisme qui ne soit pas paralysant ».
« Je pense qu’il y a un chemin », a-t-il affirmé.
(Rédigé par Blandine Hénault)