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Trump privilégie la loyauté à la compétence pour former son gouvernement

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par James Oliphant et Helen Coster

WASHINGTON (Reuters) – Depuis qu’il a commencé à former son futur gouvernement, Donald Trump oscille entre des choix relativement conventionnels et des nominations déconcertantes. Mais tous les heureux élus ont un point commun : une relation personnelle avec le président élu.

De sa cheffe de cabinet aux futurs ministres de la Justice, de la Défense ou de la Sécurité intérieure, Donald Trump a nommé des fidèles qui ont participé à nombre de meetings de campagne, lui ont régulièrement rendu visite dans sa résidence floridienne de Mar-a-Lago ou l’ont soutenu avec ardeur à la télévision.

Le contraste est saisissant avec sa première arrivée à la Maison-Blanche début 2017 quand, encore néophyte en politique, il s’était entouré de personnalités républicaines classiques avec lesquelles il n’avait aucune relation de travail ni de confiance préalable.

Désormais maître absolu du parti républicain et du pays, Donald Trump récompense ses plus fidèles partisans, ceux qui l’ont soutenu sans scrupules dans la tempête après son refus de reconnaître le résultat des élections de 2020 et l’assaut du Capitole du 6 janvier 2021, puis face aux affaires judiciaires qui l’ont poursuivi pendant quatre ans.

Certains futurs ministres n’ont ni compétence particulière, ni expérience pour le poste auquel ils ont été nommés et pourraient être confrontés à un processus de confirmation difficile au Sénat, même avec une majorité républicaine.

C’est le cas de Pete Hegseth, un présentateur de Fox News nommé à la tête du Pentagone bien que son expérience de la question militaire se limite à des passages en Irak et en Afghanistan, de Matt Gaetz, polémiste conservateur contesté jusque dans les rangs républicains propulsé Attorney General (ministre de la Justice), signe du dédain de Donald Trump envers cette institution, ou encore de Kristi Noem, gouverneure de l’Etat rural et peu peuplé du Dakota du Sud qui aura la charge de la sécurité intérieure du pays.

Donald Trump a également chargé deux hommes d’affaires, le milliardaire Elon Musk et l’ancien candidat à l’investiture républicaine Vivek Ramaswamy, de promouvoir « l’efficacité gouvernementale » en rationalisant la bureaucratie fédérale, quand bien même aucun des deux hommes n’a de connaissance de l’administration.

L’ensemble de ces choix traduisent la volonté du président élu de montrer à sa base qu’il n’entend pas prendre de gants pour tenir ses promesses de campagne, comme l’expulsion de millions de clandestins, la traque de ses ennemis politiques ou encore la purge de l’administration et de l’armée de toutes les politiques « woke » centrées sur le genre et la diversité raciale.

« Il est intéressant de noter que les personnalités qu’il a choisies pour les postes les plus importants sont plutôt des personnalités qui passent bien à la télévision et qui sauront donc assurer les relations publiques de ces postes », souligne David Lewis, professeur à l’université Vanderbilt, qui a écrit un livre sur les nominations présidentielles.

« Je pense en revanche que l’on peut se demander si les personnes qu’il a choisies ont l’expérience de la gestion de grandes administrations et possèdent toutes les compétences nécessaires pour occuper ces postes », ajoute-t-il.

Les nominations de Pete Hegseth et Matt Gaetz ont notamment suscité de nombreux froncements de sourcils à Washington, y compris dans les rangs républicains.

Pour obtenir un maroquin ministériel, certains candidats ont fait le siège de l’équipe de transition de Donald Trump à Palm Beach et de sa résidence de Mar-a-Lago dans l’espoir de pouvoir passer un moment avec le président élu.

« Parfois, il suffit de l’attraper dans le patio (de sa résidence) » pour obtenir son attention, a déclaré une source proche de l’équipe de Donald Trump.

FINI LES PERSONNALITÉS EXTÉRIEURES

Selon un important donateur de la campagne républicaine, Donald Trump et ses proches font leurs choix en se réunissant dans une pièce aux murs tapissés d’écrans de télévision et de photos des ministres potentiels. « J’ai entendu dire que M. Trump regarde beaucoup d’extraits télévisés en se posant pour seule question de savoir comment ces gens vont le défendre à la télévision », dit-il.

Après sa victoire en 2016, Donald Trump s’était tourné vers des responsables qu’il ne connaissait pas bien, comme Rex Tillerson, ancien PDG d’ExxonMobil, pour diriger le département d’État, ou Jim Mattis, un général à la retraite, à la tête du Pentagone. Il avait choisi un cacique du parti républicain, Reince Priebus, comme chef de cabinet.

Une fois à la Maison-Blanche, il n’avait pas fait preuve de beaucoup de patience envers ses ministres, n’hésitant pas à les remplacer au moindre désaccord. Cette valse avait entretenu une impression de chaos et l’avait empêché de mener à bien nombre de ses projets politiques, d’autant que les républicains avaient perdu leur majorité à la Chambre des représentants deux ans plus tard, à l’issue des élections de mi-mandat.

Donald Trump n’entend pas commettre la même erreur.

Il a rapidement nommé l’expérimentée Susie Wiles, sa codirectrice de campagne, au poste très influent de cheffe de cabinet. Il a rappelé Tom Homan, qui dirigeait l’agence de l’immigration et des douanes pendant son premier mandat, pour en faire son « tsar des frontières », chargé des déportations massives de migrants qu’il a promises. Il a propulsé un de ses fidèles, John Ratcliffe, ancien directeur du renseignement national, à la tête de la CIA.

« À bien des égards, le président Trump a pu former pendant les quatre années de son premier mandat toute une équipe de personnes qui sont désormais prêtes à appliquer son programme », relève Matt Mowers, ancien fonctionnaire du département d’État et stratège républicain.

Les observateurs s’accordent à dire que l’approche de Donald Trump en matière de nominations est beaucoup plus cohérente et efficace qu’il y a huit ans, quand il avait écarté en plein processus le responsable de son équipe de transition, l’ancien gouverneur du New Jersey Chris Christie, en raison de nombreux désaccords.

Les dernières nominations de Donald Trump ont confirmé sa ligne directrice consistant à s’entourer de « loyalistes » qui ne contrarieront pas ses projets.

C’est le cas de Marco Rubio au poste de secrétaire d’Etat, ce qui fera du sénateur de Floride l’un des rares ministres à avoir des compétences avérées dans son domaine. Mais pour y parvenir, celui qui fut candidat à l’investiture républicaine contre Donald Trump en 2016 a dû sérieusement infléchir ses positions ces dernières années pour les aligner sur celles du président élu.

Donald Trump a en revanche choisi comme directrice du renseignement national l’inexpérimentée Tulsi Gabbard, une ancienne élue démocrate devenue populaire dans les milieux conservateurs en raison de son soutien aux politiques isolationnistes et contre le « wokisme ».

Son principal atout aux yeux du président élu : elle est régulièrement invitée sur Fox News et d’autres chaînes de télévision conservatrice, sur lesquelles il ne fait aucun doute qu’elle aura prochainement pour mission de louer les politiques de son mentor.

* Lire aussi l’ENCADRÉ sur les choix de Trump pour les postes clés de l’administration

(James Oliphant à Washington et Helen Coster à New York, avec Alexandra Ulmer et Gram Slattery ; version française Tangi Salaün, édité par Jean-Stéphane Brosse)

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