Le chef du Hamas, Yahya Sinouar, tué par l’armée israélienne à Gaza
Yahya Sinouar, considéré comme le « cerveau » de l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 qui a déclenché la guerre dans la bande de Gaza, et devenu depuis lors le chef du mouvement armé palestinien, a été tué dans l’enclave par l’armée israélienne, a déclaré jeudi le gouvernement israélien.
Son assassinat représente un succès majeur pour Israël, qui avait placé Yahya Sinouar parmi les principaux noms de sa « liste de cibles » après le 7-Octobre, et constitue un moment majeur de la guerre à Gaza, même si le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a prévenu d’emblée que l’offensive de Tsahal se poursuivrait.
L’armée israélienne a déclaré avoir tué Yahya Sinouar lors d’une opération menée mercredi dans le sud de la bande de Gaza, précisant avoir effectué les vérifications nécessaires. Plus tôt dans la journée, des sources avaient rapporté que le cabinet de guerre israélien avait été informé de la mort « vraisemblable » du chef du Hamas.
Aucun commentaire n’a été effectué dans l’immédiat par le Hamas. Des sources au sein du groupe ont déclaré que les premiers éléments montraient que Yahya Sinouar a été tué dans une opération de l’armée israélienne.
En Israël, les familles des otages détenus par le Hamas à Gaza ont dit espérer qu’un cessez-le-feu pourrait désormais être conclu afin d’obtenir leur libération.
Dans la bande de Gaza, assiégée depuis plus d’un an par les troupes israéliennes, des habitants ont dit penser que la guerre continuerait malgré tout, même s’ils continuent de s’accrocher à l’espoir de disposer un jour d’une autonomie.
« NOUS AVONS RÉGLÉ NOS COMPTES »
S’exprimant à Jérusalem juste après la confirmation officielle de la mort de Yahya Sinouar, Benjamin Netanyahu a déclaré que cela offrait au Proche-Orient une chance d’accéder à la paix, tout en prévenant que la guerre à Gaza n’était pas finie et qu’Israël avait toujours pour objectif de récupérer les otages.
« Aujourd’hui nous avons réglé nos comptes. Aujourd’hui le mal s’est vu infliger un revers. Mais notre tâche n’est pas encore terminée », a-t-il dit dans un message vidéo.
« Aux familles des victimes, je dis: ceci est un moment important de la guerre. Nous continuerons d’exercer pleinement la force jusqu’à ce que tous vos êtres chers reviennent à la maison », a ajouté le Premier ministre israélien.
Quelques instants plus tôt, le ministre israélien des Affaires étrangères, Israel Katz, a salué dans un communiqué « un grand succès moral et militaire pour Israël ».
Il a décrit Yahya Sinouar comme un « meurtrier de masse responsable du massacre et des atrocités du 7 octobre », attaque lors de laquelle 1.200 personnes ont été tuées et 250 autres enlevées, selon les données des autorités israéliennes.
A Washington, Joe Biden a estimé que la mort de Yahya Sinouar représentait un « moment de soulagement » pour les Israéliens, tout en ouvrant la possibilité d’un « jour d’après » à Gaza en l’absence du Hamas au pouvoir.
Le président américain a félicité Benjamin Netanyahu lors d’un entretien téléphonique, déclarant également au dirigeant israélien qu’il était temps « d’aller de l’avant », a rapporté la Maison blanche.
« COUP FATAL » AU HAMAS
Selon Axios, le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, effectuera dans les prochains jours une nouvelle visite au Proche-Orient afin de relancer les négociations sur un accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas.
Le président français Emmanuel Macron a déclaré qu’il fallait saisir l' »occasion » pour mettre fin à la guerre dans la bande de Gaza.
« Dans l’immédiat, il faut un cessez-le-feu à Gaza », a-t-il dit lors d’une conférence de presse à Bruxelles, où il participait à un conseil européen, appelant à la libération des otages et à apporter « urgemment » des aides humanitaires à Gaza.
Un peu plus tôt, via le réseau social X, Emmanuel Macron a dit « penser avec émotion aux victimes (du 7-Octobre), dont nos 48 compatriotes, et à leurs proches ». « La France exige la libération de tous les otages encore détenus par le Hamas », a-t-il ajouté.
La mort de Yahya Sinouar est un « coup fatal » porté au Hamas, a dit le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. « Une page se tourne. C’est une page qui doit se tourner dans la guerre à Gaza », a-t-il ajouté sur LCI, « et pour la région dans son cheminement vers la paix ».
RISQUE DE NOUVELLE ESCALADE, ESPOIR D’UN CESSEZ-LE-FEU
Numéro un du Hamas pour la bande de Gaza avant d’en devenir le chef à la suite de l’assassinat du chef politique du groupe, Ismaïl Haniyeh, le 31 juillet à Téhéran, Yahya Sinouar se cachait selon des sources depuis un an dans les tunnels construits sous l’enclave palestinienne au cours des deux dernières décennies.
Sa mort risque d’entraîner une nouvelle escalade des hostilités au Proche-Orient, où les craintes d’un embrasement se sont accentuées depuis le début en septembre d’une offensive militaire d’Israël au Liban destinée selon l’Etat hébreu à éliminer le Hezbollah, aligné comme le Hamas sur l’Iran.
Israël a par ailleurs prévenu qu’il allait faire « payer » Téhéran pour l’attaque de missiles survenue le 1er octobre.
Reste l’hypothèse que la disparition de Yahya Sinouar puisse permettre de favoriser les efforts vers un cessez-le-feu, alors que l’offensive israélienne à Gaza a tué plus de 42.000 personnes, ravagé l’enclave et déplacé 1,9 million de personnes, d’après les autorités sanitaires palestiniennes et l’Onu.
Selon la radio militaire israélienne, Yahya Sinouar, 62 ans, a été tué lors d’une opération terrestre à Rafah, ville située à la pointe sud de la bande de Gaza, lors de laquelle les soldats israéliens ont tué trois membres du Hamas et emporté leurs cadavres. Des médias israéliens ont rapporté que le chef du Hamas a été tué « fortuitement » lors d’une opération de routine.
Avant la confirmation de son décès, Yoav Gallant avait publié sur le réseau social X un passage du Lévitique, le troisième livre de la Torah : « Vous poursuivrez vos ennemis, et ils tomberont devant vous par l’épée. »
Le ministre israélien de la Défense avait accompagné son message de photos barrées d’une croix rouge de Yahya Sinouar ainsi que du chef emblématique du Hezbollah libanais, Hassan Nasrallah, tué le 27 septembre dans un bombardement israélien à Beyrouth, et du chef de la branche armée du Hamas, Mohammed Deif, éliminé en août.
PORTRAIT-Yahya Sinouar, le « cerveau » du 7-Octobre qui voulait la destruction d’Israël
(James Mackenzie et Maayan Lubell à Jérusalem, Nidal al-Mughrabi au Caire, Samia Nakhoul, Lena Masri et Elwely Elwelly à Dubaï, John Irish à Bruxelles; version française Nicolas Delame, Sophie Louet et Jean Terzian)