Italie: Meloni et Salvini se chamaillent sur la crise énergétique
par Crispian Balmer
ROME (Reuters) – Les tensions entre Giorgia Meloni, bien placée pour devenir la nouvelle cheffe du gouvernement italien, et son allié Matteo Salvini ont éclaté au grand jour à dix jours des élections législatives, les deux dirigeants d’extrême droite affichant leurs désaccords sur la réponse à apporter à la crise énergétique.
Le parti Frères d’Italie (Fratelli d’Italia) de Giorgia Meloni est donné par les sondages largement devant la Ligue de Matteo Salvini en vue du scrutin du 25 septembre, qui devrait voir leur alliance de droite incluant également Forza Italia l’emporter.
La rivalité des deux alliés s’est cristallisée ces derniers jours sur la réponse à apporter à la crise énergétique, Giorgia Meloni refusant d’entendre parler, au moins dans l’immédiat, du plan d’aide massif proposé par Matteo Salvini pour baisser les factures des Italiens.
« Je suis surprise qu’il semble parfois polémiquer davantage avec moi qu’avec ses adversaires », a ironisé la dirigeante de Frères d’Italie mercredi soir sur La7 TV.
La pique n’a pas arrêté Matteo Salvini, qui a répété jeudi qu’il était indispensable à ses yeux que le gouvernement émette 30 milliards d’euros de dette supplémentaire pour venir en aide aux ménages et aux entreprises affectés par la flambée des prix du gaz et de l’électricité.
« Je trouve incroyable que certains dirigeants de parti… disent ‘Non, soyons prudents, attendons' », a-t-il cinglé sur Canale 5 TV. « Ce n’est pas un caprice de ma part. Nous risquons un anéantissement comme avec le COVID. »
LA LIGUE EN DIFFICULTÉ
Giorgia Meloni fait valoir que l’Italie, qui a la deuxième dette publique la plus élevée de la zone euro, doit faire attention à ne pas hypothéquer son avenir en empruntant à nouveau sur les marchés, alors que la crise énergétique actuelle pourrait s’estomper aussi vite qu’elle est arrivée.
« C’est de la dette que nous ferons porter sur les épaules de nos enfants, un cadeau pour les spéculateurs », a-t-elle dit.
Le dirigeant de la Ligue a aussitôt contre-attaqué : « Le problème des enfants, c’est si leurs mère et père perdent leur emploi et ne ramènent plus de salaire à la maison… Dans ce cas-là, les enfants n’ont pas à manger le soir. »
Matteo Salvini, dont le parti avait triomphé aux élections au Parlement européen en 2019 avec 34,3% des voix, après avoir obtenu 17,4% aux législatives en 2018, a du mal à digérer de s’être fait voler la vedette par le parti de Giorgia Meloni, auquel les sondages promettent au moins 25% des voix dans dix jours, alors que la Ligue pourrait tomber sous 10%.
Contrairement à Salvini, Meloni avait refusé de participer au gouvernement d’union nationale de Mario Draghi, ce qui lui a permis de conserver sa liberté de ton et de marquer des points auprès des électeurs.
Giulio Tremonti, ancien ministre de l’Economie et candidat de Frères d’Italie aux législatives, se dit cependant convaincu que les tensions entre les deux dirigeants s’apaiseront si l’alliance de droite remporte le scrutin comme prévu. « La défaite divise, la victoire unit », a-t-il assuré à la RAI.
(Reportage de Crispian Balmer, version française Tangi Salaün, édité par Jean-Stéphane Brosse)