GB-Hausse d’impôts sans précédent depuis 1993 dans le premier budget du Labour en 15 ans
par David Milliken et Sachin Ravikumar
LONDRES (Reuters) – La ministre britannique des Finances, Rachel Reeves, a annoncé mercredi la plus importante hausse d’impôts depuis trois décennies en Grande-Bretagne dans le cadre du premier budget du gouvernement travailliste, arrivé au pouvoir en juillet dernier après quatorze années de gouvernements conservateurs.
Rachel Reeves, qui a accusé les Tories d’avoir détruit les services publics britanniques, entend taxer davantage les entreprises et les fortunes du pays afin de relancer l’économie, mise au ralenti par le Brexit et la crise sanitaire du COVID.
L’ancienne économiste de la Banque d’Angleterre (BoE), première femme à occuper la chancellerie de l’Échiquier, a écarté l’hypothèse que se reproduisent les remous sur les marchés financiers provoqués par le projet de baisses d’impôts présenté en octobre 2022 par l’ancienne Première ministre conservatrice Liz Truss sans précisions sur son financement.
Si les investisseurs sont semble-t-il restés imperturbables dans un premier temps, ils ont ensuite revu à la baisse leurs anticipations sur l’assouplissement monétaire qu’opérera la BoE l’an prochain, l’ampleur des investissements prévus par le gouvernement devenant apparente.
Rachel Reeves a déclaré que les impôts seraient relevés de 40 milliards de livres par an (environ 47,8 milliards d’euros), reprochant aux conservateurs d’avoir laissé le Labour avec un « trou noir » budgétaire. « Tout chancelier responsable aurait pris des mesures », a-t-elle dit lors de son discours.
« C’est pourquoi, aujourd’hui, je restaure la stabilité de nos finances publiques et je reconstruis nos services publics », a-t-elle poursuivi, dressant un tableau sombre de la Grande-Bretagne, entre durées d’attente records dans les hôpitaux, écoles délabrées, réseau de transports défaillant et système judiciaire dysfonctionnel.
« BUDGET DIFFICILE POUR LES ENTREPRISES »
Revers pour le nouveau gouvernement travailliste, un organisme de surveillance budgétaire a déclaré que l’économie devrait progresser moins qu’attendu initialement entre 2026 et 2028, après avoir à peine surperformé cette année et l’an prochain.
Il a ajouté que les projets de Rachel Reeves porteraient d’ici la fin de la décennie les recettes fiscales du gouvernement à un pic historique de 38,2% du produit économique, mettant en exergue l’ampleur des nouvelles hausses d’impôts en plus de celles décidées par le précédent gouvernement. Cela reste toutefois inférieur à ceux de nombreux pays européens.
D’après l’Institut pour les études fiscales, les hausses d’impôts de 40 milliards de dollars vont représenter 1,25% de la production économique, un record depuis 1993 et un projet de budget établi alors par les conservateurs.
Le Premier ministre travailliste, Keir Starmer, avait prévenu en amont de la présentation du budget que « ceux ayant les épaules les plus larges » devraient payer davantage afin d’épargner « les travailleurs ».
Rachel Reeves a annoncé un éventail de hausses d’impôts, déclarant que « les décisions difficiles ne peuvent pas être constamment reportées ».
Les contributions à la sécurité sociale versées par les employeurs vont être relevées à compter d’avril prochain de 1,2% à 15%, tandis que le seuil à partir duquel les entreprises devront s’acquitter de ces contributions va être revu à la baisse. Ces mesures doivent permettre, à un horizon de cinq ans, de récolter 25 milliards de livres supplémentaires par an.
Des dirigeants d’entreprises ont prévenu qu’une taxation plus élevée, en plus de nouvelles protections pour les salariés et de la hausse du salaire minimal, pourrait nuire aux ambitions de croissance économique du Labour.
« C’est un budget difficile pour les entreprises », a déclaré Rain Newton-Smith, présidente de la Confédération de l’industrie britannique (CBI).
DAVANTAGE D’EMPRUNTS EN VUE
Parmi les autres mesures annoncées afin d’augmenter les recettes fiscales, des modifications concernant les impôts versés par les dirigeants de fonds d’investissement, les résidents non-domiciliés en Grande-Bretagne et les utilisateurs d’avions privés.
Toutefois, de manière inattendue, Rachel Reeves a écarté l’hypothèse de relever les impôts personnels quand le gel du seuil de taxation expirera lors de l’exercice fiscal 2028-2029.
La ministre a également prolongé le gel des taxes sur l’essence et a réduit la taxe prélevée pour les fûts de bières dans les pubs, des décisions qui pourraient améliorer la cote de popularité du gouvernement, en déclin jusqu’alors.
Par ailleurs, elle a fait savoir qu’elle allait modifier une loi fiscale afin de permettre à Londres d’emprunter davantage, ouvrant la voie à 100 milliards de livres d’investissement au cours des cinq prochaines années.
Selon les dernières prévisions, le gouvernement devrait emprunter sur cinq ans près de 142 milliards de livres de plus que des anticipations préalables.
En y ajoutant les hausses d’impôts, les perspectives pour les investisseurs demeurent compliquées, a commenté Neil Birrell, directeur des investissements de Premier Miton Investors.
« Il est vraisemblable que le marché de la dette et le marché boursier voient cet ensemble de mesures comme moins mauvais qu’il aurait pu l’être (…) Mais cela ne ressemble pas à un budget de croissance », a-t-il dit.
(David Milliken et Sachin Ravikumar, avec Andy Bruce, Suban Abdulla, Muvija M, Andrew MacAskill, Alistair Smout, Elizabeth Piper, Catarina Demony, Michael Holden; version française Jean Terzian, édité par Zhifan Liu)
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