Erdogan fustige Israël lors d’un vaste rassemblement pro-palestinien
par Ece Toksabay et Dilara Senkaya
ISTANBUL (Reuters) – Le président turc Recep Tayyip Erdogan s’est adressé à des centaines de milliers de partisans en dénonçant les « crimes de guerre » d’Israël lors d’un vaste rassemblement pro-palestinien samedi à Istanbul.
« Israël commet ouvertement des crimes de guerre depuis 22 jours, mais les dirigeants occidentaux ne sont même pas capables d’appeler Israël à un cessez-le-feu, sans même parler de réagir », a déclaré le chef de l’Etat turc devant la foule lors d’un discours d’une heure.
« Nous allons dire au monde entier qu’Israël est un criminel de guerre. Nous faisons des préparatifs pour cela », a-t-il dit.
Le ministre israélien des Affaires étrangères, Eli Cohen, a annoncé qu’Israël avait rappelé plusieurs diplomates en poste en Turquie en raison des « graves déclarations venant de Turquie ». « J’ai ordonné le retour des représentants diplomatiques dans le pays afin de mener un réexamen des relations entre Israël et la Turquie », a-t-il dit sur la plate-forme X.
Recep Tayyip Erdogan a également réaffirmé que le Hamas n’était pas une organisation terroriste, comme la considèrent Israël, les Occidentaux et certains pays du Golfe, décrivant Israël comme un occupant.
Le parti au pouvoir, l’AKP (Parti de la Justice et du Développement), a prédit plus d’un million de participants à ce rassemblement organisé sur l’ancien aéroport Ataturk.
La Turquie a condamné l’attaque du Hamas le 7 octobre dans le sud d’Israël qui a causé la mort de 1.400 Israéliens, des civils pour la plupart, mais le président turc a qualifié cette semaine les membres du Hamas de « combattants de la liberté ».
Tayyip Erdogan s’emploie à courtiser sa base politique conservatrice à la veille du centenaire de la République laïque de Turquie, estiment les observateurs.
« Le symbolisme est clair et personne en Turquie ne l’ignore, que le rassemblement pro-palestinien va probablement éclipser les célébrations du centenaire de la République laïque », a déclaré Asli Aydintasbas, chercheuse associée à la Brookings Institution, think tank basé à Washington.
Selon elle, si les commentaires de Recep Tayyip Erdogan sur le Hamas reflètent la position de longue date d’Ankara, le chef d’Etat cherche à profiter du sentiment anti-israélien au niveau national et à « consolider l’aile sunnite conservatrice de la Turquie ».
Sinan Ulgen, ancien diplomate turc et directeur du Centre d’études économiques et de politique étrangère, un groupe de réflexion basé à Istanbul, relève aussi que l’aggravation de la crise humanitaire à Gaza et la pression exercée par ses alliés politiques incitent le président turc à durcir sa rhétorique.
Les chefs des partis nationalistes et islamistes alliés du chef d’Etat – qui l’ont aidé à remporter des élections serrées au mois de mai – étaient présents au rassemblement.
(Avec la contribution de Tuvan Gumrukcu, Jonathan Spicer et Maayan Lubell à Jérusalem; version française Kate Entringer et Jean-Stéphane Brosse)