Ankara et Damas multiplient les contacts avec la bénédiction du Kremlin
À l'heure de l'intelligence artificielle, l'accès à des faits vérifiables est crucial. Soutenez le Journal Chrétien en cliquant ici.par Orhan Coskun et Laila Bassam
ANKARA/BEYROUTH (Reuters) – Le chef des renseignements turcs a rencontré à de nombreuses reprises ces dernières semaines son homologue syrien à Damas, ont déclaré quatre sources à Reuters, des contacts encouragés par la Russie qui cherche à rapprocher les deux pays afin de concentrer ses efforts sur la guerre en Ukraine.
Selon une source proche de Damas basée dans la région, Hakan Fidan, le directeur de l’Organisation nationale du renseignement en Turquie (MIT) et Ali Mamlouk, le chef des services secrets syriens, se sont entretenus encore cette semaine dans la capitale syrienne. Hakan Fidan s’est également rendu pendant deux jours à Damas à la fin août, d’après cette même source.
Ces rencontres reflètent la volonté du Kremlin d’assurer ses arrières en Syrie, où Moscou intervient militairement depuis 2015 en soutien au président Bachar al Assad, alors que la Russie se prépare à un long conflit en Ukraine, expliquent cette source et deux responsables turcs.
« La Russie veut que la Syrie et la Turquie règlent leurs problèmes et concluent certains accords (…) qui sont dans l’intérêt de tous, de la Turquie comme de la Syrie », résume une source turque haut placée.
La Russie, ajoute un responsable turc des services de sécurité, réduit progressivement sa présence militaire en Syrie et a demandé à la Turquie de normaliser ses relations avec Bachar al Assad afin d' »accélérer une solution politique ».
Toute normalisation des relations entre Ankara et Damas constituerait un tournant dans la guerre en Syrie, qui a débuté il y a onze ans par la répression sanglante de manifestations en faveur de la démocratie et fait des centaines de milliers de morts.
La Turquie continue de fournir une aide essentielle aux rebelles du nord-ouest de la Syrie, dernière grande poche de résistance contre le pouvoir en place depuis que Damas a réussi, avec l’appui décisif de la Russie et de l’Iran, à venir à bout de l’insurrection armée sur le reste de son territoire.
Des militaires turcs sont déployés dans la région, qualifiés de troupes d’occupation par Damas.
D’importants obstacles restent à surmonter en préalable à un quelconque réchauffement des liens entre les deux pays, à commencer par le sort des milliers de combattants rebelles et des millions de civils réfugiés dans le Nord-Ouest.
L’INFLUENCE DE L’IRAN EN QUESTION
Pendant leurs rencontres, Hakan Fidan, l’un des très proches conseillers du président Tayyip Erdogan, et Ali Mamlouk ont discuté des conditions d’une éventuelle rencontre à plus haut niveau entre les ministres des Affaires étrangères des deux pays, selon les deux responsables turcs.
D’après le haut responsable d’Ankara, la Turquie ne veut pas que l’Iran ou les milices supplétives pro-iraniennes – déjà largement déployées en Syrie – ne comblent le vide laissé par un retrait des forces russes.
La Russie ne souhaite pas non plus que Téhéran étende son influence en Syrie, ajoute le responsable des services de sécurité.
Selon un diplomate en poste dans la région, Moscou a déjà retiré un nombre limité de troupes du sud de la Syrie durant l’été, notamment dans des zones proches de la frontière avec Israël où des forces alignées sur l’Iran se sont par la suite déployées.
La source proche de Damas contactée par Reuters ainsi qu’un autre haut responsable pro-Assad au Proche-Orient assurent que les contacts entre Ankara et Damas ont été fructueux, une troisième source proche du pouvoir syrien évoquant même un début de réchauffement.
Toutes ces sources s’expriment à condition de rester anonymes, et ni le ministère russe de la Défense, ni le MIT, ni le ministère syrien de l’Information n’ont souhaité faire de commentaire ou n’ont donné suite à des demandes de commentaire.
QUAND ERDOGAN QUALIFIAIT ASSAD DE TERRORISTE…
Un rapprochement turco-syrien était encore impensable il y a peu, quand le président Erdogan qualifiait son homologue syrien de terroriste et estimait qu’il ne pourrait y avoir de paix en Syrie tant que Bachar al Assad se maintiendrait au pouvoir. Le président syrien accusait pour sa part le chef de l’Etat turc de voler des territoires à la Syrie.
Le ton a cependant notoirement changé le mois dernier, quand Recep Tayyip Erdogan a dit ne pas exclure un dialogue avec Damas, alors que la question du rapatriement des quelque 3,7 millions de réfugiés syriens s’annonce comme un grand thème de la campagne des élections de l’an prochain en Turquie.
Le président turc a rencontré plusieurs fois récemment son homologue russe Vladimir Poutine, avec qui il s’entretiendra à nouveau vendredi en Ouzbékistan.
A l’issue d’une récente visite à Moscou, Tayyip Erdogan a indiqué que Vladimir Poutine avait souhaité que la Turquie coopère avec Damas le long de la frontière entre les deux pays.
Ankara a dans le même temps menacé de lancer une nouvelle opération militaire contre les forces kurdes soutenues par les Etats-Unis dans l’est de la Syrie. La Russie a exprimé son opposition à une telle éventualité.
(Reportage Orhan Coskun à Ankara, Laila Bassam et Maya Gebeily à Beyrouth, version française Jean-Stéphane Brosse, édité par Sophie Louet)
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