Guinée : Hautes tensions après les élections présidentielles
Cinq jours seulement après le scrutin présidentiel, le bilan des violences en Guinée s’élève déjà à une vingtaine de morts. Et pourtant le calme n’est pas près de retomber sur Conakry.
L’élection présidentielle du 18 octobre était annoncée à haut risque, et finalement elle l’est. Alpha Condé, 82 ans, s’est de nouveau porté candidat pour un troisième mandat à la tête de la République de Guinée, à la suite d’un référendum le 22 mars qui avait donné lieu à de violentes contestations.
Face à lui, Cellou Dalein Diallo, président de l’UFDG (Union des forces démocratiques de Guinée, NDLR) et ennemi politique de longue date.
La première banderille a donc été lancée le lundi 19 octobre en après-midi, lorsque le leader de l’opposition s’est déclaré vainqueur « dès le premier tour », du scrutin présidentiel. Une auto-proclamation qui a tout de suite fait réagir la commission électorale nationale indépendante (CENI), seule habilitée à centraliser les votes et à annoncer les résultats définitifs.
Cellou Dalein Diallo affirme pour autant avoir déployé ses représentants sur l’ensemble des 15 000 bureaux de vote : « Nos délégués ont pris en photo ou saisi manuellement les résultats des procès-verbaux et les ont fait remonter. C’est sur ces chiffres que nous nous sommes fondés pour annoncer notre victoire, qui ne souffre d’aucune contestation. » L’opposant reconnaît toutefois n’avoir pas pu recueillir les procès-verbaux provenant de Kankan, une région administrative considérée comme un fief du parti au pouvoir. Il réitère cependant que ces résultats manquants ne sont pas de nature à remettre en cause l’effectivité de sa victoire.
Entre-temps, la Ceni a commencé dès mardi, à diffuser partiellement les résultats. Sur les 38 circonscriptions que compte le pays, elle d’abord publié quatre résultats (où le président sortant serait largement vainqueur). Ensuite, mercredi elle a poursuivi avec 16 novelles circonscriptions, sans toutefois désigner le vainqueur final de l’élection. Elle prévoit cette annonce pour le vendredi 23 ou le samedi 24 octobre.
Malgré les violences et les échauffourées dans presque toutes les régions du pays, suite à cette crise post-électorale, Alpha Condé se montre serein. Il a fait un post sur Facebook dans lequel il exhorte les Guinéens à garder leur calme : « Je réitère mon appel, à tous, au calme et à la sérénité, en attendant l’issue du processus électoral en cours dans notre pays. Bien sûr qu’il y aura un vainqueur, mais, ce n’est pas pour autant que la démocratie sera menacée ou que la paix sociale devient impossible. (…) »
De son côté Cellou Dalein Diallo se retrouve « séquestré » à son domicile avec interdiction de mouvement. Les bureaux de son parti ont été perquisitionnés et des saisies de matériel ont été faites. Le ministre de la sécurité, Albert Damantang Camara, dément tout « saccage » et parle plutôt d’une procédure normale.
Selon les derniers décomptes, on parle déjà de 22 morts à travers tout le pays, dont un policier qui a été sauvagement lynché à Bambeto, un quartier mal famé de Conakry. Des tirs sporadiques se font également entendre dans la capitale et le déploiement des forces de l’ordre s’avère de plus en plus impressionnant. Des jets de pierre et des affrontements ont eu lieu entre les manifestants de l’opposition et la police anti-émeute.
Le président Condé s’est dit ouvert à travailler avec tous les Guinéens en cas de victoire, se montrant par ailleurs conforté par les premiers résultats. Son adversaire Dalein Diallo a également promis que sa victoire ouvrirait la porte à la réconciliation nationale.
Ecclésiaste Deudjui
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