Du riz hybride en Afrique
Madagascar, grande île de l’océan Indien, entre en ce mois de mai dans l’automne austral. Hu Yuefang, un expert chinois du riz hybride, se précipite pour récolter avec des agriculteurs locaux le dernier lot de la moisson dans un champ du sous-centre africain du Centre national chinois de recherches et de développement sur le riz hybride, à Mahitsy, une localité à 35km au nord-ouest de la capitale malgache, Antananarivo.
« Il y a eu beaucoup de pluie et les températures sont très basses ces derniers jours, la moisson doit donc se faire rapidement », explique cet homme de 65 ans.
La culture rizicole est la principale activité agricole à Madagascar. Selon des statistiques officielles, plus de la moitié des superficies agricoles sont consacrées à la riziculture et plus de deux tiers des ménages malgaches pratiquent la riziculture. Cependant, soumise à de multiples facteurs tels que la qualité des semences, les techniques agricoles et les infrastructures, la production de riz à Madagascar n’est pas en mesure de répondre pleinement aux besoins alimentaires de sa population, ce qui l’oblige à recourir aux importations.
L’introduction du riz hybride avec un rendement plus élevé par surface cultivée a donné de l’espoir à Madagascar d’atteindre l’autosuffisance alimentaire. En effet, depuis 2007, le pays coopère avec la Chine dans le développement du riz hybride.
En 2008, Hu Yuefang a quitté sa ville natale, Yiyang, dans la province chinoise du Hunan (sud), pour se rendre sur cette île africaine en tant qu’expert en technologie du riz hybride. Dès lors, il a commencé à étudier des variétés de riz hybride adaptées aux conditions naturelles locales et a aidé les populations autochtones à trouver la meilleure façon d’accroître leur production.
Peu de temps après son arrivée, Hu Yuefang s’est rendu compte que l’environnement naturel ici était très différent de celui de la Chine et qu’il était irréaliste d’appliquer directement l’expérience des recherches menées dans son pays.
Les conditions climatiques à Madagascar sont complexes et variées. Avec une superficie d’environ 600.000 kilomètres carrés, l’île offre une variété de climats, mêlant forêt tropicale humide, savane, plateau tropical et zone semi-aride. Les différentes conditions de température et de précipitations à basse, moyenne et haute altitude posent également de sérieux problèmes à l’étude de l’adaptabilité locale du riz hybride.
Afin de trouver les variétés les mieux adaptées, Hu Yuefang et son équipe ont sillonné la quasi-totalité des zones rizicoles de l’île. Leurs recherches exigent une présence tout au long de l’année dans des zones rurales isolées. Ils ont vécu dans les paillotes des agriculteurs, recueilli l’eau de pluie coulant des toits en tôle pour pouvoir boire et se sont rendus à pied sur des marchés situés à plus de dix kilomètres pour acheter du bois de chauffage pour faire la cuisine.
En 2010, Hu Yuefang et son équipe ont sélectionné avec succès trois variétés de riz hybride capables d’atteindre des rendements élevés dans les zones locales de haute, moyenne et basse altitude, recevant la validation technique du ministère malgache de l’Agriculture pour qu’elles soient promues et plantées dans l’ensemble du pays. « Le rendement à l’hectare de ces trois variétés de riz hybride est de trois à quatre fois supérieur à celui du riz traditionnel malgache », a noté M. Hu.
Comparé au riz conventionnel, le riz hybride a un rendement plus élevé. Cependant, la culture du riz hybride relève aussi d’un travail technique. « Auparavant, les agriculteurs locaux n’étaient pas habitués à l’agriculture intensive », a-t-il remarqué.
Durant la dernière décennie, en plus de former des centaines de techniciens et cultivateurs locaux, Hu Yuefang a été disponible à tout moment pour donner d’innombrables conseils techniques. « Parfois, les agriculteurs rencontrent temporairement des problèmes techniques délicats. S’ils habitent à proximité, j’y vais à moto. S’ils habitent loin et que je ne peux pas me rendre sur le terrain, je communique à distance par téléphone pour donner des conseils », a-t-il raconté.
Grâce aux efforts conjoints de Hu Yuefang et d’autres experts chinois, la superficie cumulée de la culture du riz hybride chinois à Madagascar a dépassé les 50.000 hectares, avec un rendement moyen d’environ 7,5 tonnes par hectare. Dans cette optique, Madagascar a fait un grand pas vers l’autosuffisance alimentaire.
Or, l’expert a souligné que la recherche sur l’adaptabilité locale du riz hybride ne s’arrêtait pas là. D’autres experts chinois continueront à mener des recherches minutieuses à Madagascar pour trouver des variétés de riz hybride avec une plus grande adaptabilité et un rendement plus élevé, en utilisant moins d’engrais et offrant une meilleure qualité.
En mai 2019, le sous-centre africain du Centre national chinois de recherches et de développement sur le riz hybride a officiellement été inauguré à Madagascar. Selon Zhang Lijun, son directeur exécutif, l’institution « espère s’appuyer sur la technologie chinoise de riz hybride pour aider toute l’Afrique à atteindre l’objectif d’éradication de la faim et de sécurité alimentaire dans les meilleurs délais ».