Grande-Bretagne: Truss admet des erreurs de communication mais maintient le cap
À l'heure de l'intelligence artificielle, l'accès à des faits vérifiables est crucial. Soutenez le Journal Chrétien en cliquant ici.par Elizabeth Piper et Andrew MacAskill
BIRMINGHAM, Angleterre (Reuters) – La Première ministre britannique, Liz Truss, s’est efforcée dimanche de rassurer son parti et l’opinion publique en admettant qu’elle aurait dû mieux « préparer le terrain » avant de dévoiler le projet économique qui a provoqué la chute de la livre sterling et l’envolée des rendements des obligations d’Etat.
Au premier jour de la conférence annuelle du Parti conservateur, dont elle est issue, Liz Truss, en poste depuis moins d’un mois, a tenté de convaincre les Britanniques qu’elle leur viendrait en aide durant un hiver qui s’annonce difficile, et au-delà. Mais elle n’a pas remis en cause le « plan de croissance » présenté le 23 septembre, très critiqué par les économistes comme par les investisseurs pour son manque de précision sur le financement des allègements fiscaux massifs qu’il prévoit.
Elle a au contraire assuré que ce plan était le bon en laissant entendre que les critiques n’avaient pas pris la mesure de la gravité des problèmes du pays.
« Je comprends leurs inquiétudes à propos de ce qu’il s’est passé cette semaine », a-t-elle déclaré à la BBC depuis Birmingham, dans le centre de l’Angleterre, où se tient la conférence des « Tories ».
« J’assume le plan que nous avons annoncé et j’assume le fait de l’avoir annoncé vite parce que nous devions agir, mais j’admets que nous aurions dû mieux préparer le terrain », a-t-elle dit.
Mais alors qu’une partie des députés conservateurs ne cachent plus craindre une défaite aux prochaines législatives, prévues en 2024, Liz Truss n’a pas nié que son plan nécessiterait des coupes dans les dépenses publiques et elle a refusé de s’engager à indexer les prestations sociales sur l’inflation.
La livre a regagné du terrain ces derniers jours après l’annonce par la Banque d’Angleterre (BoE) de mesures visant à apaiser les tensions sur les marchés financiers, mais les rendements des « gilts », les obligations d’Etat britanniques, restent très élevés et certains investisseurs estiment que le gouvernement Truss aura beaucoup de mal à restaurer sa crédibilité.
Jake Berry, le président du Parti conservateur, a laissé entendre que la réaction des marchés avait été excessive, tout en reconnaissant qu’il n’était pas lui-même économiste.
« Nous verrons donc où en seront les marchés dans six mois », a-t-il dit à Sky News.
S&P S’INQUIÈTE POUR LE DÉFICIT ET LA DETTE
Vendredi soir, l’agence S&P Global a abaissé la perspective de sa note du Royaume-Uni de « neutre » à « négative » en soulignant les risques de dégradation marquée de la situation budgétaire et d’augmentation de l’endettement.
S&P table désormais sur un déficit de 5,5% du produit intérieur brut (PIB) en moyenne sur la période 2023-2025, contre moins de 3% auparavant, et ne prévoit plus de réduction du ratio dette/PIB mais au contraire une hausse, à 97% d’ici 2025.
La tâche de Liz Truss est d’autant plus délicate que son projet est aussi critiqué au sein même du camp conservateur, notamment à propos de la suppression du taux marginal de l’impôt sur le revenu, fixé pour l’instant à 45%.
Certains conservateurs craignent de se voir de nouveau considérés comme « le parti des méchants » parce qu’ils réduisent les impôts des plus fortunés tout en faisant peu d’efforts pour soutenir le pouvoir d’achat des plus vulnérables.
À son arrivée au centre des congrès de Birmingham, le ministre des Entreprises Jacob Rees-Mogg, a été hué par une dizaine de personnes et a dû être escorté par la police.
« Il sera très, très difficile de défendre le fait que nous réduisions les prestations sociales alors qu’au même moment, nous réduisons les impôts des plus riches », a reconnu de son côté l’ancien ministre Michael Gove lors d’une réunion publique en marge de la conférence
Liz Truss a néanmoins réaffirmé dimanche son soutien à la suppression du taux marginal de l’impôt sur le revenu, tout en précisant que cette proposition était une initiative de son ministre des Finances, Kwasi Kwarteng.
« Non, nous ne l’avons pas fait, c’est une décision qui a été prise par le chancelier », a-t-elle répondu à la question de savoir si elle avait informé au préalable tous les membres du gouvernement sur ce point avant le discours de Kwasi Kwarteng au Parlement.
La Première ministre a assuré qu’elle n’avait pas peur de prendre des décisions impopulaires pour favoriser la croissance économique.
« Ce qui me préoccupe, c’est la réussite de notre pays, de permettre à notre pays de réussir », a-t-elle dit. « Je crois vraiment que la politique s’est trop concentrée sur l’apparence, sur la manière dont les choses dont perçues. »
Mais elle a semblé en difficulté face aux questions de la journaliste de la BBC sur un éventuel financement de la suppression de certaines taxes par une diminution des crédits des services publics.
Interrogée à quatre reprises au moins sur ce point, elle a répondu: « Je vais m’assurer que le contribuable en ait pour son argent mais je suis très, très déterminée à faire en sorte que nous ayons d’excellent services publics de premier rang. »
(Reportage Elizabeth Piper et Andrew MacAskill, version française Marc Angrand)
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