Chine: La croissance annuelle du PIB à 5%, mais de nombreux citoyens se sentent vulnérables
PÉKIN (Reuters) – L’économie chinoise a enregistré une croissance annuelle de 5% au quatrième trimestre, dépassant les attentes et atteignant l’objectif fixé par Pékin, selon les données publiées vendredi par le Bureau national des statistiques (BNS).
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Les analystes anticipaient une croissance annuelle de 4,9%.
D’après les données du Bureau national des statistiques (BNS), le Produit intérieur brut (PIB) de la Chine a progressé en rythme annuel de 5,4% au quatrième trimestre.
Il s’agit d’une croissance supérieure aux attentes des analystes, qui anticipaient une hausse de 5,0%.
Sur une base trimestrielle, le PIB a augmenté de 1,6% en octobre-décembre, conformément aux attentes, contre une croissance révisée à 1,3% au trimestre précédent.
DÉSÉQUILIBRE
Malgré ces chiffres, des déséquilibres demeurent, notamment une baisse du niveau de vie alors que Pékin cherche à transférer ses gains industriels aux consommateurs.
Andrew Wang, cadre dans l’automatisation industrielle pour les véhicules électriques, a vu son chiffre d’affaires chuter de 16% l’année dernière, ce qui l’a poussé à supprimer des emplois.
Eswar Prasad, professeur à l’Université de Cornell et ancien directeur du Fonds monétaire international chargé de la Chine, doute que Pékin atteigne son objectif de croissance pour 2024 l’économie étant confrontée à une demande intérieure faible, à des pressions déflationnistes persistantes et à des marchés de l’immobilier et boursiers en difficulté.
« À l’avenir, la Chine devra faire face non seulement à d’importants défis intérieurs, mais aussi à un environnement extérieur hostile », indique-t-il.
Les autorités chinoises n’ont pas répondu aux questions sur la fiabilité des données officielles.
INSTABILITÉ
Les exportateurs chinois s’attendent à ce que la hausse des droits de douane ait un impact beaucoup plus important que lors du premier mandat de Trump, accélérant la délocalisation de la production à l’étranger et réduisant davantage les bénéfices, nuisant à l’emploi et à l’investissement dans le secteur privé.
Une nouvelle guerre commerciale placerait la Chine dans une position beaucoup plus vulnérable que lorsque Trump a augmenté les droits de douane pour la première fois en 2018, car elle fait face à une profonde crise immobilière et une énorme dette des gouvernements locaux, entre autres déséquilibres.
Jusqu’à présent, Pékin s’est engagé à donner la priorité à la consommation intérieure dans les politiques de cette année, mais n’a pas révélé grand-chose en dehors d’un programme de reprise récemment élargi qui subventionne les achats de voitures, d’appareils électroménagers et d’autres biens.
La Chine a accordé aux fonctionnaires leur première augmentation de salaire importante depuis dix ans, bien que les estimations les plus élevées mesurent l’augmentation globale à environ 0,1% du PIB. Les régulateurs financiers ont subi de fortes baisses de salaire, tout comme de nombreux autres employés.
Jiaqi Zhang, une banquière d’investissement de 25 ans à Pékin, a vu son salaire baisser de 30% en deux ans, tandis que huit ou neuf de ses collègues ont perdu leur emploi. Elle ressent un malaise général dans l’entreprise et a réduit ses achats et sorties. « Je suis prête à partir, mais je n’ai nulle part où aller pour l’instant », déclare-t-elle.
SCEPTICISME
« L’économie chinoise montre des signes de reprise, grâce à la production industrielle et aux exportations », a déclaré Frederic Neumann, économiste en chef pour l’Asie chez HSBC.
« Cependant, le rebond de dernière minute de la croissance a peut-être déjà été flatté par la concentration des expéditions vers les États-Unis avant les nouveaux droits de douane, ce qui pourrait entraîner un retour sur investissement », a-t-il ajouté.
Chine et les actions de Hong Kong ont légèrement augmenté, mais le yuan est resté proche de ses plus bas niveaux en 16 mois, sous la pression de la baisse des rendements des obligations chinoises et de la menace des tarifs douaniers.
La morosité des marchés reflète la confiance vacillante dans les perspectives de la Chine, selon les analystes.
Pékin a rarement manqué ses objectifs de croissance, sauf en 2022 en raison de la pandémie.
« Les investisseurs du monde entier vont-ils investir en Chine parce qu’ils ont atteint 5%? Non », a déclaré Alicia Garcia-Herrero, économiste en chef pour l’Asie-Pacifique chez Natixis, qui s’attend à un ralentissement de la croissance en 2025.
« Il s’agit donc d’un objectif qui n’a plus lieu d’être », a-t-elle ajouté.
(Kevin Yao, Ellen Zhang, le beureau de Pékin; version française Camille Raynaud et Elena Smirnova, édité par Augustin Turpin)