Les chrétiens d’Orient, victimes de la Question d’Orient ?
À l'heure de l'intelligence artificielle, l'accès à des faits vérifiables est crucial. Soutenez le Journal Chrétien en cliquant ici.Le 8 septembre 2009, à Londres, sa Béatitude Fouad Twal, patriarche latin de Jérusalem, parlait de l’oppression des chrétiens de Terre sainte, que ce soit en Israël ou surtout en Cisjordanie et à Gaza : « la discrimination, toujours présente en Israël, menace aussi bien les chrétiens que les musulmans… Entre les restrictions auxquelles ils sont soumis dans leurs déplacements, le manque de considération concernant leur habitat, les impôts et la violation des droits de résidence dont ils font l’objet, les chrétiens palestiniens ne savent plus où donner de la tête… Ce mur (érigé par Israël en Cisjordanie conquise et occupée depuis 1967) a enfermé beaucoup de Palestiniens dans des zones-ghetto où l’accès au travail, à l’assistance médicale, à l’instruction et autres services de base sont gravement compromis… Nous avons une nouvelle génération de chrétiens qui ne peut pas rendre visite aux lieux saints de leur foi… Pourtant à quelques kilomètres de là où ils habitent… En 61 ans nous n’avons pas réussi à obtenir la paix… Les hommes politiques… préfèrent gérer le conflit plutôt que de le résoudre… Dans les territoires occupés les gens sont à la merci de l’armée israélienne et Gaza vit dans un état de siège… qui a causé une crise humanitaire dramatique… »
L’ayant envoyée à mes correspondants, je remercie l’un d’eux, un ami politologue, d’exprimer ses critiques vis-à-vis d’une déclaration qu’il trouve injuste et volontairement aveugle sur la situation des chrétiens dans tout le Moyen-Orient : « C’est si pratique de dénoncer les conditions médiocres voire difficiles des chrétiens de Jérusalem et de Bethléem pour mieux éviter de se pencher sur le désastre des chrétiens d’Orient de façon générale : meurtres de prêtres, femmes vitriolées, églises attaquées (parfois par d’autres chrétiens, hein Geagea !…), enfants convertis de force, spoliations de biens, lorsqu’il ne s’agit pas de massacres. Quant aux 120 000 chrétiens vivant en Israël, leur niveau de liberté et de sécurité n’a que peu de rapport avec celui existant dans les états alentours. Par ailleurs, moi qui suis ouvertement favorable à la création d’un état palestinien indépendant aux côtés d’Israël, je souhaite bien du plaisir à ceux parmi les Palestiniens chrétiens « enfin libres » qui demeureront en son sein, s’ils sont nombreux à faire ce choix… on reparlera alors de leur sort, surtout s’il s’apparente à celui de Gaza actuellement. Mais bien entendu, ce sera la faute d’Israël. »
Je ne peux pas dire que mon ami n’ait pas en partie raison quand il parle de tous ces chrétiens qu’on maltraite au Moyen-Orient. Mais n’aurait-il pas remarqué que les pays, qui le font, sont tous alliés des Etats-Unis, donc d’Israël , ouvertement ou en cachette, même M. Geagea, le chef chrétien qu’il accuse d’avoir attaqué des Eglises ? A-t-il oublié que M. Geagea et ses Forces Libanaises étaient les alliés d’Israël et le sont encore probablement ? Ne sont-ils pas encore les alliés du Mouvement du Futur, dirigé par le cheikh saoudien Saad Hariri, aujourd’hui désigné pour gouverner le Liban avec sa majorité (sous les ordres, bien sûr, de son suzerain le roi saoudien, protégé par l’Amérique, alliée d’Israël) ? Ne font-ils pas ensemble partie de l’alliance proaméricaine, donc pro israélienne ? N’est-il pas étonnant que l’occupation américaine de l’Irak ait résulté dans l’assassinat, l’oppression et la purification ethnique de ses chrétiens, à tel point qu’il n’en reste plus que la moitié ? Veut-on bien se rappeler que la communauté chrétienne d’Iraq était la communauté la plus nombreuse au moment du protectorat anglais sur la Palestine, la Jordanie et l’Irak et que ce sont les Anglais qui ont été les premiers à opprimer les chrétiens irakiens et à les faire émigrer, à tel point qu’ils n’existent presque plus ?
Il est vrai que les chrétiens d’Israël sont bien mieux traités que ceux d’Egypte, d’Arabie saoudite ou autres états arabes dictatoriaux, tous alliés des Américains donc d’Israël. Mais pouvons-nous dire qu’Israël est aussi démocratique qu’on aime l’affirmer ? Le restera-t-il quand il aura son statut d’état juif ? N’est-il pas en cela en train de chercher à imiter les états musulmans qu’il critique ? Donne-t-il des droits égaux aujourd’hui à ses citoyens arabes et même éthiopiens juifs, les Falasha, dont les enfants peinent à trouver une école, parce qu’ils sont noirs (suivant ce que rapporte un journal israélien) ? Est-ce qu’un état démocratique occupe, colonise et vole les biens des peuples colonisés ? Est-ce qu’un état démocratique refuse d’obéir à toutes les décisions du Conseil de Sécurité le concernant ? Est-ce que cet état n’a pas été créé sur deux gros mensonges, « un peuple sans terre pour une terre sans peuple » ? Peut-on appeler les juifs du monde entier un peuple ? Si Israël est l’état du peuple juif, quel est le statut des juifs des autres pays ? A quel pays va leur fidélité ? Peut-on dire que la Palestine était inhabitée au début du siècle dernier ? En fait, les chefs sionistes de ce temps-là (1942) voulaient convaincre le Président Roosevelt que la Palestine ne pouvait pas contenir les deux peuples. Il était donc logique d’en chasser les Palestiniens. Ont-ils renoncé à le faire aujourd’hui ?
Tandis que les Américains semblent s’intéresser à faire la paix au Moyen-Orient et proposent la solution des deux états, le gouvernement israélien reprend ses prétentions sur tout Jérusalem et précipite sa colonisation de la Cisjordanie, montrant sur le terrain qu’il n’est pas question pour lui de lâcher une toute petite parcelle de la Palestine. A quoi jouent les Américains ? Cherchent-ils la paix ou le chaos ? Pour le savoir, nous devons rechercher la vérité de ce qui s’est passé depuis soixante ans, pour savoir où se trouve la justice. Car sans justice dans la vérité, il n’y aura pas de paix.
Une paix basée sur la justice et la vérité.
La vérité sur les raisons de la création et de l’appui à Israël.
Vérité : les peuples européens et même américains étaient en ce temps-là racistes et colonialistes. Quand les nazis accomplirent ce crime inhumain que fut l’Holocauste, la plupart des peuples alliés et, même, ennemis les aidèrent ou du moins firent semblant d’ignorer ce qui arrivait. Vérité : lorsque les alliés gagnèrent la guerre, ils ne savaient pas que faire de tous ces malheureux sauvés des camps et voulaient à tout prix se débarrasser d’eux et débarrasser leur conscience en les envoyant en Palestine.
Vérité : l’Europe continentale, ayant toute participé à l’Holocauste, ne pouvait qu’obéir aux anglo-saxons, vrais vainqueurs de la guerre, les Anglais voulaient diviser la Palestine pour mieux l’asservir, tandis qu’avec les Américains ils voulaient couper les Arabes en deux pour mieux contrôler les sources du pétrole.
Les vérités sur les gouvernements et les peuples.
Vérité : les peuples israélien et arabe sont utilisés dans le but précité (le pétrole) et poussés à s’entredéchirer pour le plus grand bien des grands groupes industriels, pétroliers, financiers et d’armement, contrôlant les médias du monde entier. Vérité : il n’y a pas de vraie démocratie dans le monde, car ces grands groupes contrôlant les médias, le pétrole et l’argent, manipulent l’information et les élections à leur guise dans les états industrialisés, lesquels se paient les gouvernements des pays en développement, y compris ceux des pays arabes, par l’argent, la protection et/ou le pouvoir.
Vérité : les Etats arabes, sous contrôle occidental, depuis 1920, ont été manipulés durant la guerre de 1948 et encouragèrent les Palestiniens à quitter leurs terres, en leur promettant faussement de les y ramener, laissant ainsi les Israéliens les occuper et les faire fructifier. Vérité : les décisions de l’ONU, donnant en 1947 neuf régions sur seize à Israël, alors que, dans huit de ces régions, les Arabes étaient majoritaires, étaient injustes et injustifiées, car les grands en avaient décidé ainsi. Vérité : Les Arabes forcés de quitter leurs biens, leurs maisons et leurs terres furent accueillis dans des camps de misère en Cisjordanie, Jordanie, Syrie, Liban et Gaza. Ils perdirent confiance dans les gouvernements arabes en 1967 et crièrent vengeance. Ils n’étaient pas les seuls, car tous les peuples arabes et musulmans étaient et sont toujours avec eux. Vérité : Jérusalem est une cité sainte pour les trois religions et tant qu’Israël voudra la garder dans sa totalité et en faire sa capitale, les peuples musulmans continueront à combattre pour la reprendre, même si tous leurs gouvernements signaient la paix avec Israël. Dans ce dernier cas, ils risqueraient fortement de se faire renverser, rendant la situation d’Israël encore plus dangereuse.
Vérité : les lois internationales interdisent formellement la colonisation des terres conquises, comme le fait Israël en Cisjordanie. Vérité : parler de normalisation en échange d’un arrêt temporaire de la colonisation est vu par les Arabes, pour ce que c’est : une tromperie américano-israélienne ; non seulement Israël doit arrêter complètement l’agrandissement de ses colonies, mais encore il doit faire évacuer les colons de Cisjordanie et de Jérusalem et obéir aux injonctions des Nations Unies, consistant en un retrait total des territoires occupés en 1967, au droit au retour des réfugiés, dans leurs foyers, et à la création de l’état palestinien. Les réfugiés doivent en tous cas être dédommagés pour les biens qui leur ont été volés en 1948 et 1967 et les soixante années de souffrances qu’ils ont vécues à cause de l’injustice internationale.
Conclusion.
Monsieur Richard Millet écrit : « toute paix, même la paix des braves, suppose un vaincu, lequel ne saurait être les juifs, ni les musulmans, ni même les Kurdes, qui ont retrouvé leur territoire. Est-il illégitime de penser, hors de toute théorie du complot, mais selon le mécanisme de la victime émissaire cher à René Girard, que ce seront les chrétiens dans leur ensemble qui seront sacrifiés sur l’autel de la paix au Proche-Orient ? La raison d’Etat suppose l’horreur sacrificielle. Et puis ces chrétiens… maintiennent une foi si vive, si lumineuse, si traditionnelle qu’ils seraient la version insoupçonnée de l’intégrisme islamique… » Quant à mon ami politologue, il prévoit un peu la même chose, en cas de paix, à nos chrétiens, quoique d’une manière ironique.
Quant à moi, j’appelle cette paix de tous mes vœux, mais sans y croire, car je ne pense pas que les Etats-Unis y voient un quelconque intérêt. Ce qu’ils ont d’ailleurs montré par leur manque d’imagination et une manière particulière de tourner en rond, pour perdre du temps. Israël et les Arabes sont condamnés, à moins d’un échange nucléaire, entre Israël, l’Iran ou le Pakistan, à une guerre de Cent ans, deux cents ans ou plus, car, d’après George Friedman, les intérêts stratégiques américains exigent le chaos en Eurasie et rien de mieux que cette guerre éternelle entre les juifs et les musulmans, dans laquelle s’excitent les extrémismes de toutes les religions et de tous les athéismes.
J’appelle cette paix de mes voeux, malgré le prix que devraient payer les chrétiens d’Orient, car n’est-ce pas leur vocation que d’être les victimes sacrificielles pour la paix et le bien-être de leurs frères humains ? Leur Maître et Seigneur ne leur a-t-il pas dit : « le serviteur n’est pas meilleur que son maître » ? Ce Maître n’est-il pas mort volontairement sur une croix, pour sauver l’humanité ? En tous cas, cela est préférable au fait qu’Arabes et Israéliens soient condamnés par les gouvernements du monde, dont leurs propres gouvernements, à s’entretuer ad vitam aeternam.