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Les USA proposent une trêve douanière si Airbus rembourse les aides reçues

par Tim Hepher, Andrea Shalal et Philip Blenkinsop

PARIS/WASHINGTON/BRUXELLES (Reuters) – Les Etats-Unis ont proposé de renoncer à taxer des produits européens, dont le vin français, si Airbus remboursait des milliards de dollars d’aides publiques, ce qui mettrait fin à un long contentieux entre Bruxelles et Washington sur les subventions accordées à Boeing et Airbus, a-t-on déclaré à Reuters de plusieurs sources proches du dossier.

Cette proposition a été faite par Robert Lighthizer du Bureau du représentant américain au Commerce (USTR), quelques jours avant que l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ne rende une décision en faveur de l’Union européenne, qui l’autorise à imposer des droits de douane sur quatre milliards de dollars (3,4 milliards d’euros) d’importations en provenance des Etats-Unis.

La Commission européenne a confirmé jeudi avoir reçu une proposition des Etats-Unis pour résoudre le différend sur les subventions accordées aux deux principaux avionneurs au monde.

Un porte-parole de la Commission a par ailleurs indiqué que l’Union européenne avait adressé en juillet 2019 une première proposition globale aux Etats-Unis qui a été actualisée en septembre. Cette proposition portait sur les problèmes en cours et le soutien futur au secteur aéronautique.

« La première réaction américaine nous est parvenue à la fin de la semaine dernière. C’est la première fois que nous recevons une réponse de la part des Etats-Unis sur des éléments de fond de notre proposition. Nous avons désormais donné notre réponse et nous sommes prêts à poursuivre ces discussions », a-t-il déclaré.

La proposition américaine a peu de chances d’être acceptée par l’UE qui semble prête à imposer de nouveaux droits de douane à l’issue d’une réunion de l’OMC prévue le 26 octobre.

L’organisation internationale avait rendu en octobre dernier un jugement similaire en faveur des Etats-Unis, les autorisant à appliquer des droits de douane sur 7,5 milliards de dollars d’importations en provenance de l’UE, dont le vin français, le fromage italien et le whisky écossais.

L’USTR n’a pas répondu dans l’immédiat aux demandes de commentaires.

A 15h15, le titre Airbus cédait 3,1% à la Bourse de Paris.

Le litige entre Boeing et Airbus, le plus important jamais traité par l’OMC, remonte à 16 ans plus tôt et pèse sur les relations commerciales entre l’Europe et les Etats-Unis, s’étendant à de multiples secteurs allant du luxe à l’agriculture.

ARBITRAGE DE L’OMC

L’OMC a jugé que les allègements fiscaux dont a bénéficié Boeing étaient infondés et que les prêts bonifiés obtenus par Airbus auprès des Etats européens l’étaient également. Airbus comme Boeing disent depuis s’être conformés aux décisions rendues par l’organisation internationale.

Dans le cadre de la nouvelle proposition américaine, les taux d’intérêt sur les prêts passés obtenus par Airbus seraient revus en partant du postulat que seule la moitié des projets de l’avionneur européen seraient couronnés de succès, ont indiqué deux des sources.

Une telle démarche aurait pour conséquence de considérer que le risque financier est plus élevé que ce que la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne et l’Espagne avaient estimé pour fixer les taux de ces prêts.

Une telle révision, considérée comme inacceptable par l’UE alors que les constructeurs aéronautiques sont déjà aux prises avec la crise du coronavirus, pourrait coûter jusqu’à 10 milliards de dollars à Airbus.

La proposition a été qualifiée d »insultante » par une source européenne, qui estime qu’elle pourrait accélérer la guerre douanière entre les deux camps. Une source américaine a déclaré pour sa part que Robert Lighthizer était « sérieux » sur le fait d’amener Airbus à restituer les aides reçues.

POSITION DE FORCE

Pour les analystes, chaque camp cherche avec ces propositions à renforcer ses positions avant une éventuelle négociation.

Les deux parties disent vouloir régler ce conflit tout en s’accusant mutuellement de refuser un véritable dialogue.

Airbus ne rembourse actuellement les prêts publics reçus qu’à partir d’un certain seuil de ventes de ses appareils, tandis que les prêts accordés pour le développement des avions comme l’A380, dont la production a été interrompue en raison de faibles ventes, peuvent faire l’objet d’une annulation partielle ou totale.

L’avionneur européen estime que le système de prêt dont il bénéficie est également favorable au contribuable, car les remboursements de crédits effectués sur les appareils performants comme l’A320 dépassent de loin les prêts annulés pour les avions n’ayant pas atteint les objectifs de vente fixés.

Les Etats-Unis de leur côté jugent que les prêts à taux bas consentis à Airbus lui procurent un avantage sur le long terme car l’avionneur européen dispose de milliards dans ses comptes qu’il peut utiliser pour le développement d’appareils et proposer des tarifs bas qui ne seraient autrement pas possibles.

(Avec Kate Duguid à New York; version française Claude Chendjou, édité par Jean-Michel Bélot)

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