Les syndicats de Renault rejettent le projet de restructuration
par Gilles Guillaume
PARIS (Reuters) – Les quatre principaux syndicats de Renault ont rendu mardi un avis défavorable sur le plan de restructuration du groupe au losange, a-t-on appris de plusieurs sources syndicales, une décision attendue mais qui risque de compliquer la tâche du tout nouveau directeur général Luca de Meo.
La CFE-CGC, la CFDT, la CGT et Force ouvrière (FO) ont communiqué leur avis lors d’un Comité central social et économique (CCSE) central qui s’est tenu dans la matinée au siège du constructeur, à Boulogne-Billancourt (Haut-de-Seine), ont dit quatre sources.
Sans évoquer la tonalité de l’avis sur son plan destiné à « restaurer la compétitivité du groupe et à assurer son développement sur le long terme », Renault a déclaré dans un communiqué: « Le dialogue se poursuivra dans les prochaines semaines conformément à l’accord de méthode qui accompagne les différents projets composant le plan d’économies. »
Pour sortir d’urgence du rouge, Renault prévoit plus de deux milliards d’euros d’économies sur trois ans, la fermeture du site de recyclage de Choisy-le-Roi (Val-de-Marne), la fin de l’assemblage de voitures à Flins (Yvelines) et 15.000 suppressions d’emplois dans le monde, dont 4.600 en France.
Si l’avis des syndicats ne revêt qu’un caractère consultatif, il tombe mal pour le nouveau directeur général, bien que celui-ci bénéficie du soutien total de son principal actionnaire, l’Etat français.
Lorsqu’il a présenté en interne sa « Renaulution », Luca de Meo avait déclaré à l’ensemble des salariés et à leurs représentants qu’il « avait besoin (d’eux) pour réaliser ce virage ».
Dans un tract, la CFDT déplore que la restructuration ait été annoncée alors que la stratégie qui doit l’accompagner ne sera pas détaillée avant janvier 2021. « Faire une telle annonce en pleine crise sanitaire relève pour le moins de l’opportunisme au plus de la provocation », a estimé le syndicat. « Sur la forme, toujours, comment oser annoncer un tel plan alors que la stratégie de l’entreprise reste basée sur des hypothèses qui évoluent tous les jours. »
La CGC, qui entend elle aussi voter contre le plan, l’a à son tour critiqué sur la forme. « Bien que sa justification puisse trouver écho à nos yeux, ces modalités de mise en oeuvre ne nous ont pas convaincus », a dit le syndicat dans un tract.
L’expertise préparée par le cabinet Secafi pour le CCSE a conclu que des bouleversements étaient nécessaires dans l’organisation et la stratégie de Renault, mais le rapport que Reuters a pu consulter souligne que, « dans la mise en oeuvre du projet, sur le terrain, un grand nombre de tensions et de difficultés peuvent surgir. »
« En conséquence, il nous paraît essentiel de mettre en place, entre les partenaires sociaux, un dispositif d’alerte précoce basé sur des enquêtes terrain en boucles courtes », a conclu le cabinet.
A moins que l’opposition des syndicats n’augure des conflits à venir dans certaines catégories de salariés ou sur certains sites, un avis négatif n’est toutefois pas de nature à faire dérailler le processus.
En décembre 2012, le plan d’économies de PSA – 8.000 suppressions d’emplois et la fermeture de l’usine d’Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) – avait lui aussi été rejeté par les syndicats. En revanche, pour les accords de compétitivité qui ont suivi les années suivantes au fil des différents plans stratégiques du constructeur, la direction a toujours veillé à obtenir l’aval d’une majorité des syndicats.
(Gilles Guillaume, édité par Jean-Michel Bélot)
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