Brexit: Bruxelles exige de Londres le respect de l’accord de retrait
par Paul Sandle, Gabriela Baczynska et William James
LONDRES/BRUXELLES (Reuters) – La Commission européenne a sommé le gouvernement britannique de respecter pleinement l’accord de sortie de l’Union européenne conclu en janvier dernier et de retirer avant la fin du mois son projet de loi mettant en cause certains aspects du traité.
Dans un communiqué, l’exécutif européen estime que la proposition de loi britannique a gravement sapé la confiance entre Bruxelles et Londres et avertit qu’il n’hésitera pas à utiliser les mécanismes juridiques prévus par l’accord de retrait en cas de violation de ses obligations.
Selon deux diplomates et un haut fonctionnaire européens, les discussions qui ont eu lieu jeudi à Londres entre des représentants de l’UE et du gouvernement de Boris Johnson n’ont pas permis de lever les inquiétudes de Bruxelles concernant l’Internal Market Bill (loi sur le marché intérieur) présenté mercredi par Londres.
Londres n’entend pourtant pas dévier de sa position et a fait savoir que le projet présenté mercredi sera débattu lundi.
Le gouvernement britannique a par ailleurs publié un avis juridique selon lequel la souveraineté du parlement britannique prime, ce qui autorise ce dernier à faire ce que bon lui semble.
« Le Parlement est souverain pour ce qui relève du droit interne et il peut adopter des dispositions législatives allant à l’encontre de celles du Traité », dit cet avis.
Le gouvernement de Boris Johnson a plongé mercredi les négociations sur ses futures relations avec les Vingt-Sept dans la tourmente en présentant un projet de loi qui remet explicitement en cause certaines dispositions du traité de sortie de l’Union européenne adopté en janvier.
Plusieurs responsables européens ont prévenu que le non-respect par Londres des termes de l’accord de retrait déjà négocié pourrait avoir des conséquences juridiques. Une note diffusée par les autorités bruxelloises auprès des 27 Etats membres indique que le bloc pourrait ainsi ouvrir une procédure en manquement à l’encontre de Londres.
JOHNSON VEUT PRÉSERVER L’UNION BRITANNIQUE
Le vice-président de la Commission européenne, Maros Sefcovic, s’est rendu ce jeudi à Londres dans l’espoir d’obtenir des clarifications auprès de Michael Gove, le ministre britannique chargé de superviser les négociations sur le Brexit.
Le traité signé en janvier, qui fixe les conditions du Brexit, prévoit des dispositions spéciales pour l’Irlande du Nord afin d’éviter le rétablissement d’une frontière physique avec l’Irlande, seul membre de l’UE à partager une frontière terrestre avec le Royaume-Uni. Mais Boris Johnson entend faire en sorte que la région reste une partie intégrante de l’espace douanier britannique.
Le Royaume-Uni a formellement quitté l’UE en janvier et Boris Johnson exclut de prolonger au-delà du 31 décembre la période de transition au cours de laquelle continuent de s’appliquer les réglementations européennes, parallèlement à la recherche d’un nouvel accord, cette fois sur les relations futures avec les Vingt-Sept.
Londres et Bruxelles estiment devoir conclure un accord au plus tard à la mi-octobre pour qu’il puisse entrer en vigueur début 2021 afin d’éviter toute perturbation des échanges commerciaux et des chaînes d’approvisionnement des entreprises.
Le projet de loi sur le marché intérieur (Internal Market Bill) présenté mercredi doit permettre à toutes les entreprises d’exercer leurs activités sans entrave entre les quatre composantes du Royaume-Uni, y compris l’Irlande du Nord. Il doit graver dans le marbre le transfert à Londres de certains programmes de dépenses européens et prévoit la création d’un organe de supervision du marché intérieur.
Boris Johnson a présenté le projet de loi comme « un filet de sécurité juridique » selon lui nécessaire pour éviter « les interprétations extrêmes ou irrationnelles » du protocole nord-irlandais qui pourraient mettre l’accord de paix de 1998 en péril.
(Version française Nicolas Delame, édité par Jean-Michel Bélot)