Les évangéliques : Qui sont-ils ?
À l'heure de l'intelligence artificielle, l'accès à des faits vérifiables est crucial. Soutenez le Journal Chrétien en cliquant ici.Évangéliques ou évangélistes ? Dans les médias francophones, il arrive régulièrement que l’on passe d’un terme à l’autre, comme s’ils étaient interchangeables. Certes, ces deux mots ont pour racine commune le mot “évangile”, du grec euangelion “bonne nouvelle“. Le terme « évangéliques » désigne les auteurs des quatre Évangiles. Il qualifie également une personne exerçant un ministère de prédication principalement orienté vers les non-croyants. On parle en revanche des évangéliques pour qualifier les chrétiens membres d’un vaste courant au sein du protestantisme, dont l’influence va croissant dans le paysage religieux mondial. La mouvance évangélique rassemblerait aujourd’hui 660 millions de personnes sur quelque 2,5 milliards de chrétiens.
Le mouvement évangélique est en pleine expansion, en France comme dans le monde, et s’inscrit dans l’histoire.
Il y a chez les évangéliques un réel désir, respectable et louable, de faire part à leur entourage, sous des formes particulièrement variées, de ce qu’ils ont découvert et qui donne tout son sens à leur existence. Ils font preuve d’ouverture en invitant très régulièrement et largement le public à diverses manifestions.
Autant d’occasions de découvrir qui sont les évangéliques. Alors bienvenue !
Qui sont les Evangéliques ?
En français, évangélique a d’abord été un adjectif. Il désignait initialement tout ce qui rapporte à l’Évangile. Après la Réforme du XVIe siècle, on commence à employer le terme pour qualifier ce qui touche à la religion protestante. En Allemagne, encore aujourd’hui, la principale Église protestante se nomme Evangelische Kirche in Deutschland (EKD), soit “Église évangélique en Allemagne”. Elle est pourtant de tradition luthéro-réformée. Dans ce cas précis, “évangélique” ne se rapporte pas à la mouvance évangélique !
C’est sous l’influence de l’anglais evangelicals que l’adjectif évangéliques va être employé comme nom en français. Il désigne alors les chrétiens évangéliques. Mais certains pasteurs, dans les cercles évangéliques, revendiquent pour eux-mêmes l’usage du terme évangéliste, car ils se voient en propagateurs de l’Évangile.
Aux États-Unis se sont ainsi multipliés les télévangélistes, des pasteurs évangéliques prêchant la bonne parole à la télévision. Ils ont parfois réussi à bâtir de véritables empires commerciaux et règnent sur des megachurchs , des méga-églises pouvant rassembler des milliers de personnes lors du culte dominical. Certains de ces pasteurs disposent en outre d’une grande influence politique dans le pays. C’est le cas de Paula White-Cain, une pasteure proche de Donald Trump nommée conseillère spirituelle de la Maison Blanche en octobre dernier. L’évangélisme français diffère toutefois de son pendant américain sur de nombreux points.
En France, on retrouve des Églises évangéliques au sein de la Fédération protestante de France (FPF) ainsi que du Conseil national des évangéliques de France (Cnef).
En 2020, selon le chercheur français Sébastien Fath du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), le mouvement compterait environ 660 millions de croyants dans le monde.
Qu’est-ce qui distingue les évangéliques des autres protestants ?
L’évangélisme n’a rien d’un bloc monolithique. Les différences entre les différentes Églises évangéliques sont nombreuses, qu’elles soient historiques, théologiques ou culturelles. Tous les évangéliques s’accordent en revanche sur l’importance de la conversion personnelle. Cette dernière doit entraîner un changement radical dans la vie du chrétien converti.
Un autre élément fondamental de la théologie évangélique est la centralité de la Bible dans la vie du chrétien. Parole de Dieu, elle rejaillit sur tous les domaines de sa vie. Certains évangéliques adoptent à son égard une lecture littéraliste. Le troisième élément essentiel est l’importance chez les évangéliques du témoignage personnel dans l’expression de la foi. Certains évangéliques, comme les pentecôtistes, accordent également une grande importance aux manifestations extraordinaires du Saint-Esprit, comme le parler en langues, la prophétie ou la guérison divine.
Sur le plan des mœurs, les évangéliques se rapprochent d’une morale traditionnelle. La plupart sont réservés voire hostiles vis-à-vis de la sexualité hors du mariage, l’avortement et l’homosexualité. Quant à la question de l’organisation, les Églises évangéliques se caractérisent par une forte dimension congrégationaliste. Les églises locales jouissent d’une forte autonomie, voire d’une totale indépendance.
Les évangéliques : leur histoire
Les évangéliques sont en pleine expansion dans le monde comme en France. Ces Églises, dont les racines historiques remontent aux Réformes du 16e siècle, sont parfois perçues comme un nouveau mouvement religieux, sans doute en raison de l’augmentation récente et spectaculaire du nombre de leurs implantations locales. La moitié des 2300 Églises protestantes évangéliques de France métropolitaine a été créée au cours des trente dernières années. Pourtant des Églises de ce type existent depuis plusieurs siècles en France.
Quelles sont les racines de la foi évangélique ?
L’Église chrétienne du 1er siècle était « évangélique » sans en avoir l’appellation. Fondée par les apôtres du Christ, il y a près de 2000 ans, elle s’est basée sur l’enseignement de Jésus formulé dans les évangiles. La prépondérance de la Bible et la mise en pratique de l’Évangile caractérisent l’Église du 1er siècle, comme les Églises évangéliques d’aujourd’hui.
Comment a-t-elle évolué au Moyen-Âge ?
Au fil des années, certaines pratiques ecclésiales étrangères au Nouveau Testament sont introduites. Constantin le Grand et ses successeurs établissent un empire romain « chrétien » qui facilite l’intrusion de pratiques païennes dans l’Église.
Au fil des siècles, des hommes et des femmes, attachés au message originel de la Bible, tentent de repousser les traditions extra-bibliques. Parfois, ils appartiennent à l’Église catholique romaine, parfois ils sont marginalisés et persécutés comme Pierre Valdo, Jan Hus, Jérôme Savonarole et tant d’autres.
Comment sont nées ces Églises appelées aujourd’hui « protestantes évangéliques » ?
Au 16e siècle éclate la Réforme protestante avec Martin Luther en Allemagne, Jean Calvin en France et Ulrich Zwingli en Suisse…
Elle résulte principalement d’une redécouverte de la Bible qui se propage en Europe grâce à l’imprimerie. Pour des millions d’hommes et de femmes, les Saintes Écritures redeviennent l’unique et souveraine autorité spirituelle.
Au même moment, la Réforme dite « anabaptiste-mennonite » prend naissance parmi de jeunes intellectuels protestants à Zurich, en Suisse. Celle-ci développe une vision de l’Église séparée de l’État et invite à un engagement de foi personnel.
En 1609 est créée la première église évangélique baptiste à Amsterdam. Les Églises protestantes évangéliques d’aujourd’hui résultent de l’évolution de ces différents courants historiques.
Le temps des Réveils
Au 17e siècle, le courant évangélique se développe sous l’influence de personnalités comme J. Spener, de Ribeauvillé (Alsace), ou le comte Zinzendorf, fondateur de l’Église des frères Moraves.
Le Réveil protestant dit « piétiste » a exercé une influence considérable sur les Églises luthériennes et réformées. Il est aussi à l’origine de nombreuses nouvelles dénominations protestantes évangéliques.
Au 18e siècle, John Wesley, un ancien pasteur anglican qui se convertit en 1738 à Jésus-Christ, lance le Réveil dit « méthodiste » qui aura un impact spirituel et social considérable en Angleterre, et plus modeste, en France, en Bretagne…
Si ces mouvements adoptent des noms nouveaux, ils cherchent néanmoins à valoriser les valeurs bibliques et typiquement évangéliques.
Au 19e siècle, un effort missionnaire important précédera l’apparition des Églises évangéliques libres, des Assemblées de Frères et, au 20e siècle, des Églises pentecôtistes et charismatiques.
Foi et histoire
Comment devient-on chrétien évangélique ?
La prééminence du rôle de Jésus-Christ est liée à la doctrine de la conversion personnelle. Un « changement personnel suite à une expérience religieuse, la conversion s’interprète chez les protestants évangéliques comme un processus […]. L’individu reconnaît Jésus-Christ comme son sauveur mort pour ses péchés et ressuscité pour son salut. Cette étape s’accompagne de la repentance (regret du mal commis) et d’un choix d’obéissance (« suivre Jésus »), engendrant une reconfiguration globale de l’itinéraire biographique du converti » (Le protestantisme évangélique, un christianisme de conversion, sous la direction de Sébastien Fath, Éditions Brepols, 2004, page 335).
Cette conversion est toujours une décision personnelle et libre.C’est pourquoi les évangéliques sont attachés à la notion de liberté de conscience et de liberté d’expression de la foi.
À quelques rares exceptions, ils manifestent leur conversion par le baptême reçu à l’âge adulte. Ils ne baptisent pas leurs enfants pour leur conserver la liberté de choix lorsqu’ils seront capables de décider par eux-mêmes.
Chaque groupe croit-il ce qu’il veut ?
Non, c’est la Bible reçue comme source unique d’autorité et normequi constitue une caractéristique de premier plan dans la foi protestante évangélique, quel que soit le groupe. L’autorité de la Bible s’exerce dans le domaine de la foi et s’étend à tous les aspects de la vie : morale personnelle, choix éthiques, valeurs…
La Bible occupe habituellement une place prépondérante dans la spiritualité évangélique, c’est elle qui nourrit la foi des croyants. La lecture personnelle quotidienne est encouragée. La lecture publique pendant le culte, les études bibliques constituent la colonne vertébrale de la vie des Églises protestantes évangéliques.
Que pensent-ils de la vie après la mort ?
Les évangéliques croient à la réalité d’une vie après la mort, avec ou sans Dieu, à la responsabilité de chacun. La vie terrestre des êtres humains revêt pour eux une grande valeur, car elle est unique et déterminante pour l’au-delà. La foi en la résurrection offre une vraie espérance. La conscience de l’éternité change les perspectives de la vie.
Les évangéliques qui osent parler de péché au 21è siècle, sont-ils culpabilisateurs ?
Une foule de gens, dans notre société contemporaine souffre d’une profonde culpabilité. La nier ou la refouler n’est d’aucun secours. L’évangile repose sur l’offre de Dieu d’un pardon gratuit accordé à qui se reconnaît pécheur. Ainsi le message évangélique, exigeant par nature, est en réalité libérateur. De nombreux évangéliques témoignent de la joie d’être pardonnés et déchargés de toute culpabilité. Dans leur théologie, la centralité de la croix et l’œuvre de Jésus sont fondamentales. « Pour les protestants évangéliques, il n’y a de christianisme authentique sans cette doctrine qui constitue à leurs yeux la clef de voûte de l’histoire du Salut » (Du ghetto au réseau. Le protestantisme évangélique en France 1800-2005, Sébastien Fath, Labor et Fidès, 2005, page 33).
Par ailleurs, les évangéliques aiment la vie d’autant plus qu’elle est pour eux un don de Dieu. La fête est au cœur de l’évangile. D’ailleurs la Bible parle, pour décrire les évènements de la fin des temps, d’un gigantesque banquet nuptial ! Souvent le public est attiré par la chaleur et la convivialité des églises protestantes évangéliques.
Pensent-ils être les seuls à détenir la vérité ?
Les évangéliques n’ont pas le monopole de la vérité et ils le savent. Cependant, ils croient à l’existence d’une vérité unique et absolue, celle de Jésus-Christ qui, parlant de lui-même dit : « Je suis le chemin, la vérité et la vie, nul ne vient au Père que par moi » (La Bible : Évangile selon Jean, chapitre 14 verset 6). Pour les évangéliques, la vérité ne peut être la propriété d’aucune église ni d’aucun groupe humain. Il s’agit de suivre le Christ qui est venu révéler Dieu le Père.
Les évangéliques sont-ils fondamentalistes ?
Si fondamentaliste est compris comme intégriste, alors ils ne le sont pas (Cf. Le protestantisme évangélique, un christianisme de conversion, sous la direction de Sébastien Fath, Éditions Brepols, 2004, page 336). Cependant toute conviction forte, qu’elle soit morale, politique ou spirituelle, a nécessairement ses propres fondements. Les évangéliques tirent leurs valeurs de la Bible et ont le désir de mettre en pratique l’enseignement de Jésus-Christ, tel que chacun peut le découvrir dans les évangiles.
Les évangéliques font-ils partie du protestantisme ?
Oui, ils s’appuient sur les mêmes fondements que les réformateurs protestants du 16e siècle (Martin Luther, Jean Calvin…) : la Bible, la foi, la grâce. De plus, ils se reconnaissent volontiers héritiers de la Réforme dite radicale ou anabaptiste-mennonite qui a développé à la même époque une vision de l’Église séparée de l’état et a invité les hommes à un engagement de foi personnel.
Évangéliques ou protestants évangéliques ?
Les racines des évangéliques remontent au début du protestantisme, au 16è siècle (elles remontent même aux origines du christianisme : « Elles [les Églises évangéliques] sont issues du courant évangélique qui remonte à Jésus de Nazareth et, à travers les siècles, a porté tous les vrais disciples de celui-ci. » L’Essor des Églises évangéliques, Philippe LARRÈRE (prêtre dominicain), Éd. Centurion, page 7). Ils partagent encore aujourd’hui les valeurs fondamentales des réformateurs (Martin Luther, Jean Calvin…). De plus, ils se reconnaissent volontiers dans la branche de la Réforme qui a revendiqué dès l’origine la séparation des Églises et de l’État et a plaidé pour des assemblées autonomes composées de convertis.
Il convient donc de désigner les évangéliques en France par l’expression plus complète de protestants évangéliques. Celle-ci tient compte du passé tout en permettant de les distinguer des Églises protestantes dites historiques comme les Églises réformées ou luthériennes. Cette distinction est d’ailleurs établie par le Groupe de Sociologie des Religions et de la Laïcité du CNRS.
Pourquoi parlent-ils tant de leur foi : sont-ils fanatiques ?
Par leur disposition à sortir de leurs temples et de leurs églises et leur empressement dans l’annonce de l’Évangile, les évangéliques peuvent surprendre. Hommes et femmes de conviction, leur vie a été marquée par leur rencontre personnelle avec le Christ. Leur nouvelle relation avec Dieu donne un sens neuf à leur vie, un but à leur existence. Ils s’efforcent de calquer leur éthique personnelle sur les valeurs de l’évangile. Ils désirent le mettre en pratique et spontanément en parlent autour d’eux ! « C’est de l’abondance du cœur que la bouche parle ! » (Le Christ dans l’évangile selon Luc, chapitre 6 verset 45) Quoi de plus normal ? On ne dit pas d’un écologiste qui trie ses déchets, choisit de circuler à vélo en ville, refuse d’acheter des produits sous blister, qu’il est un fanatique parce qu’il s’efforce d’ajuster ses actes à ses convictions. Ni parce qu’il cherche à convaincre d’autres personnes d’adopter le même comportement !
Les évangéliques sont-ils apocalyptiques ?
L’Apocalypse est le dernier livre de la Bible, c’est une prophétie qui décrit le retour du Christ et le déroulement des évènements de la fin des temps. Bien des prophéties avaient déjà annoncé sa première venue, de nombreuses autres prédictions annoncent son retour. Les croyants évangéliques considèrent que l’invitation biblique « Prépare-toi à la rencontre de ton Dieu » (La Bible : Livre d’Amos, chapitre 4 verset 12), s’adresse à tous. Ils pensent que chaque homme a le droit de savoir.
Églises et organisation
Évangéliques ou évangélistes ?
L’adjectif évangélique se réfère à l’Évangile. Il désigne certaines Églises (et chrétiens) rattachés au protestantisme. Ce terme, longtemps considéré comme synonyme de protestant, identifie aujourd’hui un courant particulier du protestantisme.
Il ne faut pas confondre évangélique et évangéliste. Ce dernier vocable désigne les auteurs des quatre Évangiles. Il qualifie également une personne exerçant un ministère de prédication principalement orienté vers les non-croyants.
Les chrétiens évangéliques sont éclatés dans une multitude de dénominations !
Les Français sont habitués à la structure pyramidale et monolithique du catholicisme. Par comparaison, chez les évangéliques, l’absence d’une hiérarchie affirmée, d’un clergé ou d’une structure unique surprend et parfois déroute.
Les évangéliques peuvent être considérés comme une famille dans laquelle l’essentiel du patrimoine génétique est commun à tous les membres qui la composent. Seuls quelques chromosomes diffèrent et vont donner naissance à des personnalités distinctes et uniques. Les évangéliques ont l’essentiel en commun. L’histoire, la compréhension variée de certains aspects théologiques et ecclésiaux secondaires, expliquent que les croyants se regroupent en diverses dénominations : baptistes, méthodistes, pentecôtistes, frères…
Comment les églises protestantes évangéliques sont-elles organisées ?
Les Églises évangéliques locales (ou paroisses) sont en principe constituées en associations cultuelles (loi 1905). Très souvent, elles sont rattachées à une union d’Églises, leur famille spirituelle, elles-mêmes regroupées en fédérations. En France où l’on est plutôt habitué à la structure pyramidale et monolithique du type catholique, l’absence de hiérarchie, d’un clergé ou d’une structure unique surprend et parfois déroute. L’histoire, la compréhension variée de certains aspects théologiques et ecclésiaux secondaires, expliquent que les croyants se regroupent en diverses dénominations : baptistes, méthodistes, pentecôtistes, frères….
Localement, les Églises sont le plus souvent conduites par un pasteur et/ou un conseil pastoral composé de responsables bénévoles. En France, plusieurs Instituts Bibliques et Facultés de Théologie protestante évangélique forment des hommes et des femmes pour qu’ils deviennent pasteurs ou qu’ils accèdent à un autre ministère spécialisé (aumônier, catéchète, missionnaire, etc.).
Où les Églises protestantes évangéliques trouvent-elles leur financement ?
Les Églises protestantes évangéliques sont financées par leurs membres qui donnent librement, régulièrement, des contributions appelées offrandes. Leur montant est laissé à la libre appréciationdu fidèle, en fonction de ses revenus et de sa générosité. Ces offrandes sont recueillies lors de collectes organisées de façon très variable selon les Églises. Ces collectes servent à financer les activités, payer les pasteurs et acquérir ou louer les locaux cultuels nécessaires. Souvent les unions d’Églises et association supra-locales se dotent de mécanismes de régulation financière pour faciliter l’entraide entre les Églises et leurs pasteurs.
À entendre les observateurs, les évangéliques font globalement preuve d’une remarquable générosité. Naturellement à l’aise avec les principes de la loi sur les associations cultuelles de 1905(celle-ci correspond à leur façon de concevoir l’Église locale : comme un groupe d’adhérents ayant fait un choix délibéré), les évangéliques financent eux-mêmes entièrement leurs lieux de cultes.
Comment expliquer la croissance des évangéliques ?
On dénombre aujourd’hui plus de 2300 Églises locales (paroisses) en France métropolitaine regroupant 460 000 pratiquants réguliers de tous âges. En 1950, ils n’étaient que 50 000. Les évangéliques sont actuellement majoritaires au sein du protestantisme français en ce qui concerne le nombre de pratiquants réguliers (ils en représentent les trois-quarts) et d’implantations locales. 35 Églises locales supplémentaires sont implantées chaque année. Soit une tous les 10 jours ! Ce phénomène ne se limite pas aux grands centres urbains. Cette augmentation se vérifie un peu partout en France.
Des raisons extérieures :
- La sécularisation de la société française depuis la deuxième moitié du 20è siècle a provoqué le déclin des grandes Églises, la perte de repères spirituels et moraux.
- La modernité n’a pas tenu ses promesses. Beaucoup sont déçus par les progrès techniques qui isolent les individus dans des rapports de plus en plus virtuels.
- Dans le même temps, le besoin de réponses aux questions existentielles n’a pas varié.
Des raisons propres :
- Devenir chrétien évangélique par libre choix, par conviction personnelle est une notion moderne, conforme aux aspirations de nos contemporains.
- Chaque croyant est invité à mettre l’Évangile de Jésus-Christ en pratique dans sa vie personnelle, ce qui constitue un vrai projet de vie.
- Les évangéliques savent allier un certain conservatisme doctrinal, des fondamentaux théologiques anciens et éprouvés avec leurs points de repères et leurs valeurs stables, à une flexibilité culturelle quant aux formes de l’expression de la foi et de la vie de l’Église.
- La doctrine protestante évangélique répond à la demande d’authenticité, de respect de la personne humaine et de ses besoins dans tous les domaines de la vie.
Les évangéliques sont-ils d’origine américaine ?
Considérer les évangéliques comme un mouvement américain colonisant le monde est partial et inexact. Le mouvement évangélique est apparu sur le continent européen, en Suisse, en Allemagne, en France, aux Pays-Bas, en Angleterre avant même… la naissance des États-Unis. D’ailleurs, de nombreux évangéliques ont émigré en Amérique aux 17è et 18è siècles à cause du manque de liberté religieuse qui sévissait en Europe et singulièrement en France. Reste qu’un certain nombre d’Églises évangéliques en France, comme dans d’autres parties du monde, ont été fondées avec le concours de missionnaires américains, essentiellement à partir de la Seconde Guerre mondiale.
Les évangéliques français ne dépendent d’aucune instance dirigeante située ailleurs dans le monde. S’ils entretiennent des relations internationales et favorisent des partenariats, ils le font par fraternité chrétienne tout en veillant à leur indépendance typiquement protestante.
Les Églises évangéliques sont-elles surtout des Églises dites « issues de l’immigration » ?
C’est l’image que certains médias donnent. Celle-ci ne correspond pas à la réalité des Églises évangéliques françaises dans leur ensemble.
S’il est vrai que de nombreuses communautés, composées de fidèles d’origine étrangère, ont été fondées depuis quelques années, celles-ci reflètent pour l’essentiel la réalité démographique de la banlieue parisienne et de quelques grandes villes de France. De plus, le terme ethnique est souvent utilisé en trompe-l’œil, parfois teinté de racisme. En effet, sur quels critères attribuer le caractère d’ethnicité à une Église ? Si certaines Églises intègrent des traditions culturelles (musique, danse…) apportées par des membres d’origine étrangère, ces traditions ne peuvent être assimilées à des signes distinctifs évangéliques.
Les Églises évangéliques sont, par essence, ouvertes à tous, sans exclusivité ni restriction ethnique ou sociale… Ce qui est en accord avec la Bible qui souligne : « Maintenant, il n’y a plus de place pour les discriminations faites par les hommes. Il n’y a plus de différence entre Juif et Grec, serviteur et maître, homme et femme : toutes ces distinctions humaines tombent. Unis au Christ, vous ne faites plus qu’un » (La Bible, Épître aux Galates, chapitre 3 verset 28).
Laïcité et relations
Les évangéliques sont-ils une secte ?
Le rapport parlementaire sur les sectes (Rapport N° 2468 du 20 décembre 1995), bien conscient de la difficulté de définition, propose trois sens possibles du mot secte : étymologique, sociologique, « dangerosité ». Selon ces critères, le protestantisme évangélique n’est pas concerné par cette question. Cependant, aucun groupement humain n’est à l’abri de dérives sectaires.
Autres différences avec les sectes, les évangéliques possèdent deux atouts sociaux propres à les éloigner d’un fonctionnement sectaire :
- Dans la ligne de la tradition protestante, les évangéliques accordent une place prépondérante au choix individuel. Cette attitude les tient a priori à l’écart des logiques « d’embrigadement » ou de « lavage de cerveau ».
- Les évangéliques sont très attachés au principe démocratique. Leurs Églises fonctionnent généralement de manière autonome. En principe, le pasteur ou les responsables sont élus par les membres de l’Église et les décisions soumises au vote des fidèles. Ce fonctionnement est à l’opposé de la domination d’un groupe par un gourou.
Que pensent les évangéliques de la laïcité ?
Ils sont depuis l’origine attachés aux valeurs de la République comme la laïcité, comprise comme séparation institutionnelle des Églises et de l’État. Ils la conçoivent comme une laïcité ouverte plutôt qu’une laïcité-silence ou laïcité-ignorance. Ils s’inscrivent en faux contre cette compréhension simplificatrice et erronée de la laïcité synonyme de refus de toute religion dans l’espace public.
Ils défendent particulièrement le principe de la liberté de consciencequi a pour corollaire la liberté d’expression comme le formule, par exemple, la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales qui consacre deux articles à ces questions :
- Article 9-1 : Liberté de pensée, de conscience et de religion. « Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques et l’accomplissement des rites. »
- Article 9-2 : Liberté de manifester sa religion ou ses convictions. « La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »
Font-ils du prosélytisme ?
L’évangélisation est la proclamation publique de l’Évangile. Elle est destinée à informer nos contemporains afin de leur donner l’occasion d’établir une relation personnelle avec Dieu. L’évangélisation est une offre spirituelle ouverte. Elle fait appel à la liberté de conscience de chacun. L’invitation qu’elle adresse vise la conviction intérieure, la foi de chacun.
Le mot prosélytisme est devenu aujourd’hui franchement péjoratif et même abusivement synonyme de racolage. Ce terme évoque une propagande religieuse massive comportant des éléments de pression, de harcèlement, de conditionnement psychologique qui s’apparente à l’intégrisme. Généralement, le prosélytisme accentue les spécificités d’un mouvement comme condition, souvent exclusive, du salut. Le prosélytisme s’apparente parfois à de l’embrigadement. Les évangéliques rejettent et condamnent ces méthodes. Ils ont à cœur, comme l’a enseigné le Christ, de partager leur découverte personnelle de l’Évangile.
Les évangéliques et la politique
Cette question complexe est davantage liée aux spécificités politiques d’une nation qu’à des raisons théologiques. Aux États-Unis où plus d’un Américain sur quatre se déclare évangélique, ceux-ci jouent un rôle indéniable en particulier lors des élections présidentielles.
Dans certains pays dans lesquels les évangéliques sont nombreux, comme le Pérou, le Guatemala, le Brésil ou l’Ouganda, leur influence est plus contrastée. Parfois leur apport politique et social est reconnu pour son utilité à l’exemple de celui des pentecôtistes en Ouganda en matière d’alphabétisation et de scolarisation (souligné par Odon Valet dans La planète des autres, France 5 émission diffusée le 5 juin 2005).
En France, la situation est plus simple. Les Églises évangéliques adhèrent depuis l’origine au principe de laïcité, de la séparation des Églises et de l’État. Elles sont soumises à la loi républicaine, et sont constituées en associations cultuelles 1905. Leurs statuts précisent qu’elles ne poursuivent aucun but politique. On observe un pluralisme politique effectif parmi les membres de ces Églises.
Les évangéliques et les autres religions ?
Contrairement à une idée reçue, une conviction religieuse forte ne conduit pas inévitablement à l’intolérance. Les évangéliques souhaitent témoigner de leurs croyances, en suivant l’enseignement et l’exemple du Christ qui les enjoint à « aimer son prochain comme [soi]-même » (La Bible : évangile selon Matthieu, chapitre 22 verset 39). Cette volonté de l’amour induit le respect de l’autre, de ses convictions, exclut toute violence et ne laisse pas de place au fanatisme. Ils n’ont nullement l’intention d’imposer leurs croyances à autrui.
Cependant, aucun groupe humain n’est à l’abri de comportements de repli sur soi ou de dérives sectaires. C’est alors que le rôle d’instances nationales régulatrices comme le Conseil national des évangéliques de France ou la Fédération Protestante de France prend toute son importance.
Les évangéliques sont-ils conservateurs ?
La réponse dépend du contexte sociétal en général et du thème abordé en particulier. Les Églises protestantes évangéliques maintiennent des positions de morale personnelle fermes dans leur principe : mariage réservé aux couples hétérosexuels, protection de la vie jusqu’à la mort naturelle… tout en développant l’accueil de chaque être humain dans sa situation singulière.
Cependant les évangéliques puisent dans le message de la Bible, des valeurs d’une incontestable modernité. Le respect de l’homme, quelle que soit son origine, considéré comme créature de Dieu, a pour eux des implications concrètes : actions sociales et humanitaires, lutte contre les discriminations. Ils manifestent un intérêt grandissant pour les questions liées à l’écologie et à une économie respectueuse de la dignité de l’homme.
« Les born again christians sont une horrible secte ! » (Paula Jacques, France Inter dans Cosmopolitaines le dimanche 19 juin 2005)
Cette remarque témoigne d’une ignorance regrettable. Born again christian signifie littéralement chrétien né de nouveau. Plutôt que de conserver cette expression en anglais, et de donner ainsi l’impression d’une opacité sectaire, il convient simplement de la traduire. En effet, elle est directement importée… de la bouche même de Jésus dans l’Évangile ! « Jésus lui répond [à Nicodème, chef religieux juif] : Je te le dis, c’est la vérité, personne ne peut voir le Royaume de Dieu, s’il ne naît pas de nouveau » (La Bible : Évangile selon Jean, chapitre 3 verset 3).
La nouvelle naissance est l’expérience spirituelle, la transformation intérieure vécue par celui qui place sa confiance en Dieu le Créateur et choisit de prendre au sérieux et d’appliquer dans sa vie personnelle l’enseignement du Christ. C’est ainsi que l’on devient chrétien… évangélique. Plutôt que d’une dérive sectaire, il s’agit d’un véritable retour aux sources chrétiennes.
Qu’en est-il des évangélistes ?
Le mot traduit par « évangéliste » dans le N.T. est un nom qui vient du verbe euangelizomai, « annoncer une nouvelle », habituellement traduit « prêcher l’Évangile » (le terme néotestamentaire fait écho à l’hb. mebaśśēr, mebaśśeret, d’Es 40.9; 52.7). Le verbe est très courant dans le N.T., et il est appliqué à Dieu (Ga 3.8), au Christ (Lc 20.1), et aux membres de l’Église (Ac 8.4), ainsi qu’aux apôtres en voyage missionnaire. Le nom « évangéliste » n’apparaît que trois fois dans le N.T. Timothée (2 Tm 4.5) est exhorté par Paul à faire l’oeuvre d’un évangéliste, c.-à-d. à faire connaître l’Évangile. Timothée avait accompagné Paul dans ses voyages missionnaires. Mais il ressort des deux lettres qui lui sont adressées que son travail, au moment où l’apôtre écrit, était essentiellement local et pastoral. Le fait qu’il soit invité à faire l’oeuvre d’un évangéliste montre qu’un évangéliste pouvait également être pasteur et enseignant.
L’évangéliste est cité directement après l’apôtre et le prophète dans Ephésiens 4.11. C’est la seule mention de ce don dans l’une de nos listes de dons. Ailleurs le mot n’apparaît que dans Actes 21.8 : « Philippe l’évangéliste » et dans 2 Timothée 4.5 : « Fais l’œuvre d’un évangéliste ».
Dans la liste d’Ephésiens 4.11, l’évangéliste, comme les autres ministres, est là pour le perfectionnement des saints en vue de l’œuvre du ministère, c’est-à-dire pour les équiper en vue de l’accomplissement de leur service « pour construire le corps de Christ ». Il aurait donc essentiellement un ministère de formateur au sein d’une Eglise locale pour stimuler les croyants à l’évangélisation et les entraîner à aborder des incroyants pour leur communiquer la Bonne Nouvelle.
En Ac 21.8, Philippe est appelé « l’évangéliste ». Philippe avait été choisi avec les Sept d’Ac 6, et après la persécution d’Étienne, il avait prit une part importante à la prédication de l’Évangile dans des régions non encore évangélisées (cf. p. ex. Ac 8.5, 12, 35, 40). Bien qu’évangéliste, il n’est pas cité parmi les apôtres (Ac 8.14). Une distinction du même ordre est faite entre Timothée et les apôtres en 2Co 1.1 et Col 1.1.
Bien que les apôtres aient été des évangélistes, tous les évangélistes n’étaient donc pas des apôtres. Cette distinction est confirmée en Ep 4.11, où la fonction d’évangéliste est mentionnée après celles d’apôtre et de prophète, et avant celles de pasteur et d’enseignant. Le don d’évangéliste est donc un don distinct au sein de l’Église chrétienne; tous les chrétiens accomplissaient certes cette tâche importante, lorsque l’occasion leur en était donnée, mais certains d’entre eux étaient tout particulièrement appelés et qualifiés par le Saint-Esprit en vue de cette oeuvre.
Par la suite, dans l’histoire de l’Église, le terme « évangéliste » sera utilisé pour désigner les auteurs des quatre évangiles.
Sources: Le CNEF, le journal Réforme, les dictionnaires bibliques de Bible.audio