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La vaccination à l’heure d’Alzheimer, une famille vent debout contre le sérum

Alors que la France fait face à une pénurie de vaccins contre le COVID-19, le père de Fabienne Garbo, qui souffre d’une maladie apparentée à Alzheimer, fait partie des personnes prioritaires pour recevoir des injections, mais sa fille, très opposée au vaccin, a refusé de donner son consentement.

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Claude Garbo, 86 ans, souffre d’un trouble cognitif sévère. Il reconnaît sa femme, mais plus sa fille. Il perd ses repères et a de la difficulté à s’exprimer de façon cohérente.

Lorsque sa fille, Fabienne Garbo, 54 ans, qui habite en Moselle, l’appelle en vidéo – lui-même se trouve dans un Ehpad de l’Hérault où sa femme et lui ont déménagé en 2017 -, il ne réagit pas immédiatement à ses propos.

Ce n’est que lorsqu’elle lui dit quelques mots en allemand, la langue que cet ancien mineur a parlée pendant des années avec ses collègues de travail dans le Grand-Est, qu’il s’illumine.

« Auf wiedersehen », dit-il d’une voix claire au moment de dire au revoir à sa fille, émue de voir son père.

L’établissement où vit Claude Garbo recueille en ce moment le consentement des résidents et des familles pour de premières vaccinations, prévues pour le 4 février.

Fabienne Garbo a été l’une des premières à refuser de donner son consentement, en accord avec sa mère.

« Je ne veux pas que mon père soit un cobaye », a-t-elle dit à Reuters installée dans sa cuisine, dans la maison que son père a lui-même construite.

« A priori, on dit qu’il faut environ entre trois et cinq ans pour définir qu’il n’y a pas trop de risque. Et encore, on a eu des antécédents, pas forcément de vaccin, mais de médicaments qui ont donné des suites pas très favorables. »

« Donc les questions qu’on se pose, c’est quelle est la durée d’immunité, quels sont les effets secondaires? Quand je parle effets secondaires, je ne parle pas du bras qui gonfle, la fièvre(…), je parle d’effets secondaires qui pourraient être plus graves », poursuit-elle.

1,24 MILLION DE PREMIÈRE DOSES INJECTÉES

Fabienne Garbo dit douter des informations qui sont diffusées sur les médias traditionnels, « parce que ça devient trop » gros. Elle va chercher ses informations sur internet.

Elle se dit sensible aux propos tenus par des personnalités aujourd’hui très controversées au sein de leur profession, comme la généticienne Alexandra Henrion-Caude, dont la chaîne Youtube a été supprimée, ou encore Henri Joyeux, ex-cancérologue.

« Il y a quand même des professeurs qui parlent aussi, des immunologistes, des épidémiologistes, ce sont des experts. Pourquoi, eux, ne diraient pas la vérité ? »

Au 27 janvier, 1,24 million de personnes avaient reçu au moins une dose de vaccin en France, selon les données officielles. Seulement 10% des résidents d’Ehpad vaccinables n’ont pas souhaité se faire vacciner ou bien leur proche n’ont pas donné leur consentement, selon la Fehap, une fédération des établissements du secteur privé solidaire.

L’éthique voudrait que les familles qui décident pour leur proche se basent sur ce que ce dernier aurait souhaité, dit Matias Louis, directeur d’un Ehpad à Clamart et référent de la Fehap. Mais cela reste un exercice très difficile.

« Rarement les familles disent : ‘je dis non parce que mon parent, quand il pouvait le faire, m’a dit qu’il ne le souhaitait pas. C’est, en général, pour des considérations très personnelles, toujours pour faire du bien à son parent, mais avec des idées préconçues sur la vaccination », dit-il.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS), puis l’Agence européenne du médicament, ont tour à tour assuré que les vaccins Pfizer et Moderna, les deux en circulation en France, répondaient à leurs exigences d’innocuité et d’efficacité.

Et selon les données des laboratoires, révisées par des scientifiques indépendants, les effets indésirables graves de ces vaccins sont quasi-inexistants.

PROBLÈME DE CONSCIENCE

Face aux réticences, une réflexion est en cours au sein des établissements pour savoir si la vie dans les Ehpad pourra reprendre une fois que la campagne de vaccination sera terminée ou bien si des mesures barrière devront être maintenues pour les personnes non vaccinées.

« Ce sera un problème pour nous, un problème de conscience », dit Louis Matias. « Soit on sera obligé de mettre en place un traitement discriminant pour ces personnes et leur famille, soit on prend le risque qu’elles tombent malades ».

Mais les établissements pourraient être tenues responsables si cette deuxième option advenait, ce qui pourrait freiner des réouvertures, précise le directeur.

Pour la Fondation Alzheimer, ce serait une catastrophe.

L’isolement dans lequel ont été tenus les résidents durant les périodes de confinement a été « terrible », dit Geneviève Demoures présidente de la fondation en Dordogne, qui évoque la dégradation de l’état de santé de certaines personnes et le désespoir des familles.

« On s’est sacrifié pour des raisons collectives qui étaient légitimes, pour que tout le monde soit protégé. Il ne serait pas question de ne pas rouvrir les Ehpad après la vaccination. »

Fabienne Garbo, qui croit davantage aux traitements contre le COVID-19 qu’au vaccin, est favorable à cette réouverture.

« Ça fait presque un an qu’on vit au milieu de ce virus, il y a plein de monde qui ne l’ont pas eu, pourquoi on n’essaierait pas de vivre avec ? », dit-elle.

(Caroline Pailliez, édité par Jean-Michel Bélot)

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