Nucléaire: L’Etat envisage un prêt à taux zéro à EDF pour financer les EPR2
À l'heure de l'intelligence artificielle, l'accès à des faits vérifiables est crucial. Soutenez le Journal Chrétien en cliquant ici.par Benjamin Mallet
PARIS (Reuters) – L’Etat français envisage d’accorder à EDF un prêt à taux zéro pour financer une part importante du projet de six réacteurs nucléaires de type EPR2 en phase de construction, ont déclaré deux sources au fait du schéma, qui ouvrirait la voie à l’un des plus grands chantiers industriels du pays.
Le financement envisagé, proche d’une solution retenue par la République tchèque, serait assorti d’un système de prix garantis à long terme sous forme de contrat pour différence (Contract for difference), ont ajouté les sources.
Le coût de construction de six EPR2 a été estimé à 51,7 milliards d’euros en 2022, un montant dont la presse a indiqué en mars qu’EDF l’avait fortement revu à la hausse, à 67,4 milliards. Le groupe, dont l’Etat détient l’intégralité du capital, a depuis travaillé à une « optimisation » du devis, qu’il prévoit de remettre au gouvernement d’ici à la fin de l’année.
L’une des sources, proche du gouvernement, a précisé qu’un accord avec EDF était en bonne voie, mais que la part du financement assurée par un prêt de l’Etat et celle relevant du groupe – sur fond d’envolée du déficit public – n’étaient pas décidées à ce stade et que des paramètres tels que le partage des risques faisaient encore l’objet « d’intenses discussions ».
Des arbitrages ministériels seront rendus une fois qu’EDF aura remis sa nouvelle estimation du coût des EPR2 puis la France devra faire valider son schéma par la Commission européenne, a ajouté la source, évoquant des décisions début 2025, alors que le gouvernement visait précédemment un plan de financement pour la fin de cette année.
Bercy et EDF n’ont pas souhaité commenter ces informations.
Le plan français renforcerait la tendance à recourir à des aides publiques massives pour construire de nouvelles centrales en Europe sur fond de retards et surcoûts des projets en cours – à l’instar de Flamanville en France ou de Hinkley Point en Angleterre -, que des entreprises telles que EDF, lourdement endettée, ne peuvent plus porter seules.
Le schéma envisagé serait proche de celui mis en place par la République tchèque pour un nouveau réacteur à Dukovany, qui prévoit un prêt à taux zéro pendant la construction, puis d’au moins 2% après le début de l’exploitation.
Avec un schéma de ce type, Paris veut faire baisser le coût final des EPR2 en réduisant leur coût de financement, mais aussi faciliter le feu vert de la Commission européenne, qui a validé la solution retenue par Prague pour le projet de Dukovany, confié au sud-coréen KHNP au détriment d’EDF.
Emmanuel Macron a annoncé début 2022 la construction de six EPR2, mais sans préciser le financement de ce chantier qui démarrerait en 2027 et s’étalerait sur près de 25 ans. EDF a pour sa part indiqué qu’il envisageait une décision finale d’investissement vers le début de 2026.
(Reportage Benjamin Mallet ; avec Leigh Thomas, édité par Blandine Hénault)