Mayotte: Les secours s’organisent après le passage dévastateur du cyclone Chido
par Dominique Vidalon et Abdou Moustoifa
PARIS/MORONI (Reuters) – Les secours s’organisaient lundi à Mayotte pour venir en aide à la population après le passage dévastateur du cyclone Chido, avec notamment le renfort de 800 personnels de la Sécurité civile chargés du soutien sanitaire et logistique.
Quelque 1.600 policiers et gendarmes étaient par ailleurs mobilisés « pour répondre aux besoins urgents de la population », a déclaré le ministère de l’Intérieur.
Le bilan humain du cyclone reste difficile à déterminer. Les autorités ont fait état d’au moins 14 morts à ce stade mais les victimes pourraient se chiffrer en centaines, voire milliers.
Les scènes de désolation se succèdent sur l’archipel de l’océan Indien, qui a été balayé par des vents de plus de 200 km/h : villages dévastés, notamment les habitats précaires, téléphone coupé, réseau d’électricité hors d’usage, approvisionnement en eau potable compromis…
Emmanuel Macron devait présider une réunion de crise à 18h00, heure de Paris, a annoncé l’Elysée. Le ministre démissionnaire de l’Intérieur, Bruno Retailleau, s’est rendu sur place.
Il s’est refusé à s’avancer sur un bilan. « En réalité pour le bilan, il va falloir des jours et des jours », a-t-il dit, le préfet François-Xavier Bieuville à ses côtés.
Ce dernier a rappelé qu’il était difficile de « consolider » un bilan en raison notamment de la tradition musulmane voulant que les défunts soient inhumés « dans les 24 heures ».
« Nous devons être en veille sanitaire aiguë. Nous serons vigilants à enrayer toutes les épidémies qui pourraient se développer », a déclaré la ministre démissionnaire de la Santé, Geneviève Darrieussecq, sur France 2.
Les habitants parlent d’une situation « apocalyptique ».
« C’est un désastre. Il n’y a plus rien… Mayotte a été dévastée. Mayotte a besoin de secouristes pour aider les gens dans les bidonvilles qui sont coincés, qui manquent d’eau, qui manquent de nourriture, qui manquent de soins. On a vraiment besoin d’aide », a déclaré Océane, infirmière en réanimation à l’hôpital principal de Mamoudzou, sur BFM TV.
Hamada Ali, un enseignant, a déclaré à Reuters que les rues étaient couvertes de boue et d’arbres, que les habitants se réfugiaient dans les écoles et qu’ils étaient obligés d’utiliser de l’eau minérale pour cuisiner.
« DES POCHES DE SURVIE »
« J’ai vu un blessé par une tôle… Toutes les maisons en tôle ont été détruites. Celles dont les toits étaient en tôle ont été emportées par le cyclone. Il y a des habitations précaires dont on ne voit pas la moindre trace », a-t-il ajouté.
Selon Alexandre Jouassard, porte-parole des services de secours, les prochaines heures seront cruciales pour retrouver des survivants.
« Les prochaines minutes, les prochaines heures sont très importantes. On a l’habitude de travailler dans ces conditions là et plusieurs jours après, vous avez des poches de survie, vous avez des zones dans lesquelles on peut trouver des victimes. C’est notre priorité absolue », a-t-il dit sur France 2.
Les communications par téléphone mobile ont été interrompues dans une grande partie du territoire, la tempête ayant détruit la quasi-totalité des antennes de téléphonie mobile, ce qui a incité de nombreuses personnes à s’organiser en groupes Facebook et Discord pour obtenir des nouvelles de leurs proches.
« Nous avons besoin d’assistance, je croyais que ça allait être la fin pour moi », a dit à Reuters John Balloz, un habitant de la capitale mahoraise.
Geneviève Darrieussecq a précisé que le principal hôpital de Mayotte fonctionnait toujours après l’évacuation des eaux, malgré les conditions très dégradées, et a ajouté qu’un hôpital de campagne serait installé sur l’île et que 100 réservistes sanitaires seraient déployés à Mayotte.
Après Mayotte, Chido a touché terre dans le nord du Mozambique, où il s’est rapidement affaibli et a été reclassé en tempête tropicale dimanche. Il a détruit plusieurs maisons, selon les autorités locales.
Des opérations maritimes et aériennes sont en cours pour acheminer des secours et du matériel à Mayotte, notamment depuis l’île de la Réunion.
« Aujourd’hui comme toujours ce sont les habitants des quartiers eux-mêmes qui sont les premiers aidants et qui sont les premiers à agir. Mais les capacités de réaction avec les ressources propres à l’île sont extrêmement limitées », a dit Julien Bousac, coordinateur général des équipes de Médecins du monde à Mayotte, sur France Inter.
Plus des trois-quarts des 321.000 habitants de Mayotte vivent sous le seuil de pauvreté national. Selon le ministère de l’Intérieur, plus de 100.000 migrants sans papiers vivent à Mayotte, le plus souvent dans des bidonvilles.
(Reportage Aaron Ross et Ammu Kannampilly à Nairobi, Dominique Vidalon à Paris, Custodio Cossa à Maputo; version française Diana Mandiá, édité par Sophie Louet)