30 mars 2025Reuters

Le bilan du séisme en Birmanie s’alourdit à 1.700 morts

BANGKOK (Reuters) -L’aide internationale continuait d’arriver au compte-goutte en Birmanie dimanche, en particulier depuis les pays voisins, deux jours après le puissant séisme qui a fait au moins 1.700 morts, 3.400 blessés et plus de 300 disparus, selon le dernier bilan de la junte birmane.

Le séisme, l’un des plus puissants à frapper le pays en un siècle, s’est produit vendredi à une profondeur de 10 kilomètres et l’épicentre a été localisé à 17,2 km de Mandalay, deuxième plus grande ville de Birmanie avec environ 1,5 million d’habitants.

Le bilan du séisme pourrait encore augmenter, a mis en garde le chef de la junte birmane au pouvoir, le général Min Aung Hlaing, cité par les médias d’Etat.

Le séisme a frappé une nation birmane en proie à une guerre civile qui s’est intensifiée depuis le coup d’État militaire de 2021, qui a renversé le gouvernement élu de la prix Nobel Aung San Suu Kyi et déclenché un soulèvement armé à l’échelle nationale.

Les combats ont mis à mal l’économie birmane largement agraire, déplacé plus de 3,5 millions de personnes et dévasté les services essentiels, notamment dans le secteur de la santé.

« Les destructions ont été considérables et les besoins humanitaires augmentent d’heure en heure », a déclaré la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) dans un communiqué.

« Avec la hausse des températures et l’approche de la mousson dans quelques semaines, il est urgent de stabiliser les communautés touchées avant que des crises secondaires n’apparaissent », a mis en garde la FICR.

Dans certaines des zones les plus durement touchées du pays, les habitants ont déclaré à Reuters que l’aide gouvernementale était jusqu’à présent limitée, laissant les habitants dans le dénuement.

« Il est nécessaire de rétablir les voies de transport au plus vite », a déclaré le général Min Aung Hlaing aux autorités locales samedi, selon les médias d’État. « Il est indispensable de réparer les voies ferrées et de rouvrir les aéroports pour que les opérations de secours soient plus efficaces ».

Selon l’Institut d’études géologiques des Etats-Unis (USGS), le nombre de morts pourrait dépasser les 10.000 dans la seule Birmanie et le coût des dégâts pourraient dépasser la production économique annuelle du pays.

« PAS D’AIDE, PAS DE SECOURS »

Les hôpitaux de certaines régions du centre et du nord-ouest de Birmanie, notamment de Mandalay et de Sagaing, ont du mal à faire face à l’afflux de blessés, a indiqué le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies.

Une vidéo filmée par un habitant de Mandalay samedi et envoyée à Reuters montrait des patients dans des lits, certains reliés à des perfusions, sur un terrain situé à l’extérieur d’un hôpital orthopédique de 500 lits dans la ville.

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), des établissements de santé publics et privés de la ville, notamment l’hôpital général de Mandalay et certaines parties de l’université de médecine, ont été endommagés par le séisme.

Le gouvernement d’unité nationale (NUG), un organe d’opposition fondé par d’anciens membres du gouvernement d’Aung San Suu Kyi, a déclaré que les milices anti-junte sous son commandement suspendraient toutes les actions militaires offensives pendant deux semaines à partir de dimanche.

« Le NUG, en collaboration avec les forces de résistance, les organisations alliées et les groupes de la société civile, mènera des opérations de sauvetage », a-t-il déclaré dans un communiqué.

Les dégâts dans certaines zones du nord de la Birmanie, comme dans la ville de Sagaing, près de l’épicentre du séisme, ont été considérables, raconte Han Zin, un habitant.

« Ce que nous voyons ici, c’est une destruction généralisée – de nombreux bâtiments se sont effondrés », a-t-il déclaré par téléphone. Une grande partie de la ville est privée d’électricité depuis la catastrophe et l’eau potable s’épuise.

« Nous n’avons reçu aucune aide et il n’y a aucun secouriste en vue. »

Des sections d’un pont reliant Sagaing à la ville voisine de Mandalay se sont effondrées, montrent des images satellite.

« Avec les ponts détruits, même l’aide en provenance de Mandalay a du mal à arriver », a déploré sur Facebook l’association Sagaing Federal Unit Hluttaw, liée au NUG.

Des dizaines de personnes sont probablement coincées sous des bâtiments en ruine à Mandalay, mais impossible de les secourir sans engins lourds, ont déclaré deux travailleurs humanitaires et deux habitants.

« Mes équipes à Mandalay utilisent des gants de travail, des cordes et des kits de base pour creuser et récupérer les victimes », a raconté l’un des travailleurs humanitaires. Reuters a choisi de ne pas révéler son identité pour des raisons de sécurité.

« D’innombrables personnes sont prises au piège et sont toujours portées disparues. Le bilan des morts est impossible à évaluer pour le moment, compte tenu du nombre de personnes prises au piège et non identifiées, si elles sont encore en vie », a ajouté le travailleur humanitaire.

La Thaïlande voisine a également été touchée par le tremblement de terre, qui a provoqué l’effondrement d’un gratte-ciel en construction et fait 17 morts dans la capitale Bangkok, selon les autorités thaïlandaises. Au moins 76 personnes sont coincées sous les décombres de l’immeuble, où les opérations de secours se poursuivent.

AIDE

Plusieurs pays voisins, dont l’Inde, la Chine, la Thaïlande, la Malaisie et Singapour, ont envoyé du matériel et des équipes de secours.

Des avions militaires indiens ont effectué plusieurs sorties dans le pays samedi, transportant notamment des fournitures et des équipes de recherche et de sauvetage à Naypyidaw, la capitale administrative, dont certaines parties ont été détruites par le tremblement de terre.

L’armée indienne aidera à mettre en place un hôpital de campagne à Mandalay, et deux navires de la marine transportant des fournitures se dirigent vers la capitale commerciale, Rangoun, a déclaré le ministre indien des Affaires étrangères, Subrahmanyam Jaishankar.

La Chine a envoyé plusieurs équipes de secours, dont une est arrivée par voie terrestre depuis la province chinoise du Yunnan, dans le sud-ouest du pays, a fait savoir l’ambassade de Chine en Birmanie sur les réseaux sociaux.

Une équipe singapourienne de 78 membres, accompagnée de chiens de sauvetage, opérait à Mandalay dimanche, ont rapporté les médias d’État birmans.

(Reportage bureau de Bangkok, avec Shoon Naing et Wa Lone, rédigé par Devjyot Ghoshal, version française Kate Entringer)