Sécurité renforcée en Chine et à Hong Kong pour l’anniversaire de Tiananmen
PEKIN (Reuters) – Les autorités chinoises ont restreint mardi l’accès à la place Tiananmen à Pékin, au jour du 35e anniversaire de la répression sanglante du mouvement démocratique, et la sécurité a aussi été renforcée à Hong Kong alors que des milliers de personnes entendaient participer à des veillées, à Taïwan et ailleurs.
Le 4 juin 1989, l’armée chinoise est intervenue avec des chars d’assaut contre les milliers d’étudiants qui étaient rassemblés sur la place Tiananmen pour réclamer, entre autres, la liberté d’expression et le droit de manifester.
Trente-cinq ans plus tard, ces événements restent un sujet tabou en Chine, où des activistes estiment que les objectifs du mouvement n’ont toujours pas été atteints. Seul Taïwan, que Pékin considère comme partie intégrante de son territoire, célèbre cet anniversaire.
Pékin n’a jamais communiqué de bilan; des ONG et des témoins parlent de plusieurs milliers de morts.
Dans un communiqué publié mardi matin, le président taïwanais Lai Ching-te, entré en fonction le mois dernier, a déclaré que « la mémoire du 4 juin ne disparaîtra pas dans le torrent de l’histoire ».
Alors que la Chine n’exclut pas de recourir à la force pour ramener dans son giron Taïwan, le dirigeant taïwanais a déclaré que Taipei répondrait « à l’autoritarisme par la liberté ».
A Pékin, la porte-parole du ministère des Affaires étrangères Mao Ning a condamné l’utilisation du (4 juin) comme « prétexte pour interférer avec les affaires intérieures de la Chine ».
La Tour de Tiananmen, qui surplombe la place, a été fermée pour l’ensemble de la journée, selon un message diffusé sur le site officiel du monument.
La station de métro desservant les lieux a été fermée pour plusieurs jours.
Selon des témoins, une route menant à la place Tiananmen a été fermée dès lundi soir aux automobilistes et cyclistes.
INTERPELLATIONS À HONG KONG
Comme c’est régulièrement le cas lors de périodes dites politiquement sensibles, des gardes ont été positionnés sur les ponts piétonniers à Pékin, tandis que des bénévoles de « maintien de la stabilité » – pour beaucoup, des retraités – surveillent depuis plusieurs jours, par petits groupes, des quartiers du centre de Pékin.
Sur des applications de messagerie et réseaux sociaux, comme WeChat et Douyin, il était impossible pour des utilisateurs de modifier leur photo de profil, selon des messages en ligne et des tests effectués par Reuters.
A Hong Kong, la police a renforcé la surveillance autour de Victoria Park, où des veillées se tenaient tous les ans avant l’adoption de nouvelles lois drastiques sur la sécurité ces dernières années.
Les policiers ont interpellé plusieurs individus près du parc, dont un homme âgé brandissant une affiche commémorant les événements du 4 juin 1989.
Une autre militante, Alexandra Wong, âgée de 68 ans, a été embarquée dans un fourgon de police après avoir crié « Le peuple n’oubliera pas ».
Au cours de la semaine écoulée, huit personnes ont été arrêtées dans la ville pour sédition en vertu d’une nouvelle loi de sécurité nationale, parmi lesquelles la militante Chow Hang-tung en raison de messages relatifs au 4 juin postés sur internet, selon les médias.
« Il y a encore des forces qui cherchent à saper la stabilité et la sécurité de Hong Kong », a déclaré à la presse le chef de l’exécutif hongkongais, John Lee, sans mentionner spécifiquement la date anniversaire.
« Trente-cinq années se sont écoulées, et les autorités demeurent silencieuses. Tout ce que l’on peut voir sur internet c’est ‘Une histoire concise du Parti communiste en Chine’, selon laquelle un tragique incident a été causé par le mouvement étudiant en 1989 », ont déploré les Mères de Tiananmen, un groupe composé essentiellement de rescapés chinois et de familles des victimes de la répression de Tiananmen. « Nous ne pouvons accepter ni tolérer des déclarations qui ignorent les faits. »
(Laurie Chen à Pékin, Jessie Pang à Hong Kong, Yimou Lee à Taipei; version française Jean Terzian et Jean-Stéphane Brosse, édité par Kate Entringer)