Londres appelle à une réunion du G7 mardi sur la crise afghane
Le Premier ministre britannique Boris Johnson a appelé à une réunion du G7 mardi pour discuter de la crise en Afghanistan et exhorté la communauté international à trouver les moyens d’éviter une escalade.
Les militants islamistes taliban ont pris le contrôle de la capitale le week-end dernier, provoquant un exode chaotique à l’aéroport de Kaboul de la part de milliers de civils et de collaborateurs de l’ancien pouvoir. Les candidats au départ craignent le retour en Afghanistan d’une interprétation austère de la loi islamique, comme vingt ans plus tôt quand les taliban tenaient les rênes du pays.
« Il est vital que la communauté internationale travaille de concert pour garantir des évacuations en toute sécurité, éviter une crise humanitaire et soutenir le peuple afghan pour maintenir les avancées des vingt dernières années », a dit Boris Johnson dimanche sur Twitter.
La Grande-Bretagne assure actuellement la présidence tournante des pays du G7, qui incluent aussi Iles Etats-Unis, l’Italie, la France, l’Allemagne, le Japon et le Canada.
Sept personnes ont trouvé la mort samedi dans des mouvements de foule aux abords de l’aéroport de Kaboul, a annoncé le ministère britannique de la Défense dans un communiqué.
Un responsable de l’Otan a fait état de son côté d’un bilan d’au moins vingt morts au cours des sept derniers jours dans l’aéroport et aux alentours, durant les opérations d’évacuation.
« La crise à l’extérieur de l’aéroport de Kaboul est malheureuse. Notre priorité est d’évacuer tous les étrangers dès que nous le pouvons », a-t-il ajouté sous couvert d’anonymat.
Selon des témoins, les taliban ont rétabli un certain ordre autour de l’aéroport dimanche, s’assurant que les personnes présentes forment des files d’attente à l’extérieur des accès principaux et interdisant la formation de foules dans le périmètre, ont-ils dit.
Des taliban armés ont tiré des coups de feu en l’air et utilisé des matraques pour forcer les personnes rassemblées à respecter les queues, ont ajouté les témoins, selon lesquels aucun blessé grave n’a été déploré.
Un correspondant de Sky News présent à l’aéroport a indiqué que plusieurs dizaines de milliers d’Afghans étaient rassemblés samedi, et que les personnes situées à l’avant du rassemblement ont été bloqués contre les barricades.
Des images de Sky News ont montré des soldats debout sur un mur tentant de dégager les personnes blessées et arrosant la foule avec un jet d’eau pour la réhydrater.
18 AVIONS AMERICAINS EN RENFORT
Les Etats-Unis et d’autres pays étrangers ont envoyé plusieurs milliers de militaires pour aider aux opérations d’évacuation de leurs ressortissants et des Afghans les plus vulnérables, mais ceux-ci sont cantonnés à l’intérieur de l’aéroport.
« Nos troupes maintiennent actuellement une distance stricte avec les zones extérieures de l’aéroport de Kaboul pour prévenir tout heurt avec les taliban », a ajouté l’officiel de l’Otan.
Un responsable taliban souhaitant garder l’anonymat a déclaré dimanche « réclamer la clarté la plus complète » sur le plan d’évacuation des forces étrangères. « La gestion du chaos à l’extérieur de l’aéroport de Kaboul est une tâche complexe », a-t-il dit.
Les Etats-Unis et l’Allemagne ont conseillé samedi à leurs ressortissants se trouvant en Afghanistan de ne pas se rendre à l’aéroport de la capitale, citant des risques sécuritaires en raison des milliers de personnes s’y sont amassées.
L’administration américaine a annoncé dimanche que des avions cils seraient utilisés pour aider au transport des personnes évacuées d’Afghanistan, autre signe des difficultés rencontrées pour mener à bien les opérations.
Selon un porte-parole du Pentagone, les 18 avions ne se poseront pas à Kaboul mais serviront à acheminer les personnes qui ont déjà quitté l’Afghanistan.
Le président russe Vladimir Poutine a rejeté quant à lui dimanche l’idée que des personnes évacuées puisse être hébergées temporairement dans des pays proches de la Russie car il ne veut pas que « des militants arrivent ici sous couvert du statut de réfugié », ont rapporté des agences de presse russes.
Les Etats-Unis ont tenu des discussions secrètes avec plusieurs États pour qu’ils accueillent provisoirement des Afghans ayant travaillé pour les autorités américaines, des personnes particulièrement à risque dans le contexte actuel.
Vladimir Poutine a critiqué l’idée d’un tel hébergement dans des pays d’Asie centrale limitrophes de l’Afghanistan, en attendant que les réfugiés obtiennent un visa vers les Etats-Unis et l’Europe. « Cela signifie-t-il qu’ils peuvent être envoyés sans visa vers ces pays, vers nos voisins, tandis que (l’Occident) n’en veut pas sans visa », a-t-il ajouté, selon des propos rapportés par l’agence Tass.
La Russie exempte de visa tous les résidents des pays d’Asie centrale de l’ex-Union soviétique pour leurs déplacements.
Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a souligné dans un entretien au Journal du Dimanche que la « responsabilité morale collective » d’évacuer les Afghans menacés pour leur coopération avec les puissances occidentales « s’impose au-delà de tout calendrier ».
Un cinquième vol organisé par la France pour évacuer des ressortissants français et afghans est arrivé samedi soir dans l’Hexagone, en provenance d’Abou Dhabi aux Emirats arabes unis, avec plus de 100 personnes à son bord.
A Paris, plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées dimanche après-midi place de la République à l’appel du collectif « Afghan lives matter » en soutien au peuple afghan. Les manifestants demandent une rencontre avec le ministre des Affaires étrangères sur l’accueil des familles des migrants habitant en France.
(Reportage Andrew MacAskill à Londres, le bureau de Kaboul et Rupam Jain, Idrees Ali à Washington et Maria Tsvetkova à Moscou, Gilles Guillaume pour la version française)