Nouvelles manifestations contre le coup d’Etat en Birmanie
À l'heure de l'intelligence artificielle, l'accès à des faits vérifiables est crucial. Soutenez le Journal Chrétien en cliquant ici.Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté dimanche pour une deuxième journée consécutive dans plusieurs villes de Birmanie afin de dénoncer le coup d’Etat de l’armée lundi et réclamer la libération de la dirigeante Aung San Suu Kyi.
Ces manifestations sont les plus importantes depuis la « révolution de safran » menée en 2007 par les moines bouddhistes, qui, bien que réprimée, avait abouti à des réformes démocratiques dans le pays.
A Rangoun, la plus grande ville de Birmanie, la foule portait des vêtements, des drapeaux et des ballons rouges, la couleur de la Ligue nationale pour la démocratie (LND), le parti d’Aung San Suu Kyi dont l’écrasante victoire aux élections législatives du 8 novembre a été contestée par l’armée. L’état-major militaire, qui a pris le pouvoir lundi, a dénoncé des fraudes lors du scrutin, des accusations rejetées par la commission électorale.
« Nous ne voulons pas de la dictature militaire! Nous voulons la démocratie! », ont scandé les manifestants.
L’armée a rétabli dimanche après-midi les accès à internet, dont la suspension la veille avait contribué à alimenter la colère d’une partie de la population.
Des cortèges partis de différents quartiers de Rangoun ont convergé vers la pagode Sule, au coeur de la ville, point de ralliement des manifestations de 2007 et de 1988 contre de précédentes juntes militaires.
Les participants ont effectué le geste symbolique de la contestation, trois doigts levés, tandis que des automobilistes klaxonnaient et brandissaient des portraits d’Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix en 1991.
« Nous ne voulons pas d’une dictature pour la prochaine génération », a dit Thaw Zin, 21 ans. « Nous ne terminerons pas cette révolution tant que nous n’aurons pas écrit l’Histoire. Nous nous battrons jusqu’au bout. »
RUMEURS
La junte dirigée par Min Aung Hlaing, installée dans la capitale Naypyidaw, à plus de 350 km au nord de Rangoun, ne s’est pas exprimée dimanche.
D’après une note interne pour le personnel de l’Onu, un millier de personnes ont manifesté à Naypyidaw et 60.000 à Rangoun. Des rassemblements ont aussi été signalés à Mandalay, la deuxième ville du pays, et dans plusieurs autres localités de ce pays de 53 millions d’habitants.
Ces manifestations n’ont pour l’instant entraîné aucune violence, contrairement aux mouvements de 1988 et 2007 réprimés dans le sang.
Des coups de feu ont néanmoins été entendus à Myawaddy, dans le sud-est du pays, lors de l’intervention de policiers contre plusieurs dizaines de manifestants. On ignore s’il y a eu des victimes.
En l’absence d’internet et d’informations officielles, les rumeurs ont circulé samedi sur le sort d’Aung San Suu Kyi et de ses alliés. L’une d’elles voulait que la dirigeante élue ait été libérée, ce qui a provoqué des scènes de liesse, mais son avocat l’a rapidement démentie.
Plus de 160 personnes ont été arrêtées depuis le coup d’Etat, a déclaré Thomas Andrews, rapporteur spécial des Nations unies pour la Birmanie.
« Les généraux s’efforcent désormais de paralyser le mouvement citoyen de résistance – et de maintenir le monde extérieur dans l’obscurité – en coupant quasiment tous les accès internet », a-t-il dénoncé dans un communiqué publié dimanche.
« Nous devons tous nous tenir aux côtés du peuple birman alors qu’il est confronté au danger et au besoin. Il ne mérite rien de moins. »
(Rédaction de Reuters, Poppy McPherson; version française Camille Raynaud et Bertrand Boucey)