Les secteurs autoroutier et aérien s’alarment et préparent la riposte
PARIS (Reuters) – Les sociétés de concessions autoroutières et les opérateurs du secteur aérien multiplient les critiques à l’encontre de la nouvelle taxe dévoilée mercredi par le gouvernement sur les infrastructures de transport longue distance, avertissant d’un impact sur leurs bénéfices et de recours devant la justice.
Destinée à financer « le plan d’avenir pour les transports », cette taxe sera principalement imposée sur le chiffre d’affaires des grandes concessions autoroutières, détenues par les groupes Eiffage et Vinci, et les grands aéroports, propriétés d’ADP. Elle devrait générer 600 millions d’euros par an pour l’Etat.
Côté autoroutes, Eiffage a estimé jeudi que sur la base de ses comptes arrêtés fin 2022, le projet de taxe gouvernementale aurait entraîné une diminution d’environ 117 millions d’euros de son résultat opérationnel courant (ROC) consolidé.
Vinci a pour sa part chiffré à 260 millions d’euros l’impact de la taxe.
Les deux groupes ont prévenu qu’ils entendaient utiliser « toutes les voies de recours » pour contester le projet de taxe, contraire selon eux au contrat de concessions qui les lie avec l’Etat.
D’autant que Vinci et Eiffage s’opposent également avec le gouvernement sur la possibilité de répercuter cette taxe sur les prix des péages.
« Les tarifs des péages, c’est nous qui les fixons », a assuré mercredi le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, en s’appuyant sur une décision du Conseil d’Etat.
Mais pour le directeur général de Vinci Autoroutes, Pierre Coppey, « une hausse des taxes, c’est inévitablement une hausse des tarifs des péages ». Le dirigeant s’appuie sur l’article 32 du contrat de concession avec l’Etat qui prévoit des mesures de compensation, notamment tarifaires, en cas de nouvel impôt.
« PAS UNE BONNE NOUVELLE »
Du côté du secteur aérien, la taxe est critiquée par ADP mais aussi par Air France, qui s’inquiète d’une hausse de ses redevances aéroportuaires.
ADP a en effet prévenu mercredi qu’il allait répercuter 75% de la charge financière liée à la taxe sur les tarifs de redevance, qui seront progressivement augmentés sur une période de deux à trois ans.
Le reste à charge pour ADP est estimé à environ 90 millions d’euros sur l’Ebitda pour 2024.
La nouvelle taxe n’est « pas du tout une bonne nouvelle » pour Air France, a déclaré jeudi la directrice générale de la compagnie aérienne, Anne Rigail.
« Ce qui nous pose problème dans ce projet de loi, c’est que seuls les gros aéroports sur lesquels Air France mais aussi l’ensemble des compagnies françaises opèrent majoritairement seront concernés alors qu’un aéroport comme Beauvais sur lequel une low-cost étrangère [Ryanair] opère ne sera pas concerné », a-t-elle expliqué au micro de RTL.
« Donc pour nous, cela induit une nouvelle distorsion de concurrence qui va nous faire du mal », a-t-elle ajouté.
A la Bourse de Paris, l’action Air France-KLM reculait jeudi de plus de 3,5% dans la matinée. ADP perdait 1,5%, Vinci 1% et Eiffage 0,4%.
(Rédigé par Blandine Hénault, édité par Jean-Stéphane Brosse)