La BCE se prépare à une nouvelle ère de rigueur monétaire, selon des sources
par Francesco Canepa et Balazs Koranyi
SINTRA, Portugal (Reuters) – De hauts fonctionnaires de la Banque centrale européenne se réunissent en Finlande cette semaine pour travailler sur un nouveau cadre de pilotage des coûts d’emprunt à court terme, ont rapporté cinq sources à Reuters.
Le comité des opérations de marché, composé de membres du personnel de la BCE et des banques centrales des 20 pays membres de la zone euro, se réunit à Helsinki, au moment même où les grands banquiers centraux se retrouvent pour le forum annuel de Sintra, au Portugal.
Les membres du comité réfléchiront à la stratégie de la BCE dans un environnement d’inflation et de taux d’intérêt élevés alors que les efforts pour freiner la croissance des prix sont entravés par plus de 4.000 milliards d’euros de liquidités excédentaires en circulation dans le système bancaire.
Un porte-parole de la BCE s’est refusé à tout commentaire.
Le comité travaillera notamment sur la façon de rémunérer les réserves obligatoires et les réserves excédentaires des banques, ont indiqué les sources. Les réserves obligatoires sont actuellement rémunérées au taux de dépôt de 3,5%, mais certains responsables estiment que ce taux devrait être fixé à zéro, comme ce fut le cas pendant la majeure partie de la dernière décennie.
CORRIDOR DES TAUX
Le personnel examinera également les possibilités d’ajustement du corridor entre les trois taux directeurs de la BCE, bien que des responsables aient jusqu’à présent jugé toute mesure prématurée, ont déclaré les sources.
L’institution de Francfort verse actuellement aux banques un intérêt de 3,5% sur leurs dépôts. Le taux de refinancement – qui fixe le coût auquel les banques peuvent emprunter de la liquidité auprès de la banque centrale pour une semaine – est de 4% et celui de la facilité de prêt marginal – le taux que les banques paient lorsqu’elles empruntent pour 24 heures – est à 4,25%.
Les possibilités pour remédier à cette asymétrie incluent une augmentation du taux de dépôt pour créer un corridor plus étroit ou une modification du taux au jour le jour pour créer un corridor plus large.
Mais les deux options posent problème, selon les sources. Un corridor trop large pénaliserait les banques emprunteuses par rapport à celles disposant d’un excédent de liquidités à placer auprès de la BCE.
Certains préconisent de fixer le corridor lors de la dernière hausse de taux de la BCE dans le cycle, en ne modifiant uniquement que le taux de dépôt, mais il est peu probable que les responsables seront alors convaincus à ce moment-là qu’il s’agira de l’ultime hausse, ont ajouté les sources. Une décision sur le corridor pourrait être à l’ordre du jour après les vacances d’été, ont-ils ajouté.
REDUIRE LE BILAN
Un autre sujet essentiel porte sur le fonctionnement du bilan, dont la réduction à un niveau significatif pourrait prendre des années, les banques devant régulièrement emprunter des liquidités à la banque centrale, ont déclaré les sources.
Un document présenté cette semaine au forum de Sintra suggère que la BCE pourrait ramener l’excédent de liquidités de 4.100 milliards d’euros à un montant compris entre 521 et 1.400 milliards d’euros. L’institution a déjà réduit son bilan de plus de 1.000 milliards d’euros par rapport au pic atteint l’année dernière.
La grande question est de savoir si ce sont les injections de liquidité de la banque centrale ou la demande réelle des banques lors des adjudications qui doit déterminer la disponibilité du cash et, par conséquent, le taux à court terme.
Isabel Schnabel, membre du directoire de la BCE et responsable des opérations de marché, a semblé préconiser en début d’année un système utilisé par la Banque d’Angleterre, qui permet aux banques de déterminer elles-mêmes le montant des liquidités qu’elles souhaitent détenir.
Ce modèle permettrait à la BCE d’ajouter des liquidités en fonction des besoins, au lieu de maintenir un bilan en permanence excédentaire.
(Version française Laetitia Volga, édité par Kate Entringer)