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N’oubliez pas les chrétiens de Syrie

Ces jours-ci, le monde entier a les yeux tournés vers la coupe du monde de football. C’est le sujet qui occupe presque toutes les pages des réseaux sociaux. Durant un mois, les chaînes de télévision nous proposent d’assister aux matchs et les médias de les commenter et nous détournent ainsi, comme ils ont l’habitude de faire, de l’essentiel.

Au moment où j’écris cette lettre, C’est le Black Friday qui nous invite à consommer, et à ne cesser de consommer.

Le sommet sur le climat est passé inaperçu, les nouvelles des guerres en Ukraine et en Syrie passent au second plan, la situation économique des pays les plus pauvres n’intéresse personne et pourtant, 200 milliards de dollars américains viennent d’être dépensés pour organiser cette coupe du monde 2022.

Dans moins d’un mois, cette page sera tournée. Et les médias occidentaux se concentreront sur les festivités de Noël et du Nouvel An.

Notre monde progresse-t-il dans une dynamique du provisoire ? Sommes-nous obligés de vivre l’instant présent sans réfléchir et prévoir l’avenir ? Faut-il accepter tout ce que les médias nous proposent sans filtrage ? Qui décide de l’actualité ?

Dans tout cela, notre pays est un grand oublié des médias.

Un des principes que nous avons pour aider les familles, c’est d’établir une relation avec elles. Pour cela, nous commençons par les visiter pour comprendre leur vécu.

Je partage avec vous des exemples concrets que nous venons récemment de découvrir :

Une famille, composée de la grand-mère sans nouvelles de son mari disparu depuis plusieurs années. Dans la même chambre de 9 m2, vivent son fils qui est au chômage et son épouse enceinte, la famille de sa fille dont le mari est chiffonnier avec leurs trois enfants et une fille célibataire. Au total plus de dix personnes âgées de 1 à 65 ans. La jeune fille a dû arrêter ses études universitaires, ne pouvant payer ne serait-ce que le transport vers l’université. Une batterie alimente une lampe LED. Durant la guerre et même après, ils se sont déplacés plusieurs fois. La maison ne leur appartient pas. Des amis la leur ont prêtée. Ils ont besoin de tout : tout ce qui les aiderait à vivre dignement (des habits, des couches et du lait pour le petit, des denrées alimentaires, des médicaments, etc.). Devant cette misère, nous ne pouvons pas rester les bras croisés, nous devons agir.

Une autre famille que nous venons récemment de visiter vit dans un autre quartier très pauvre de la ville. Cette nuit-là, il pleuvait. L’entrée et la cuisine sont couvertes par une bâche qui laisse passer l’eau. Dans la chambre, bien chauffée, un jeune de 17 ans paraplégique, est étendu par terre. À la question de savoir comment il réussit à chauffer, le papa nous montre un gros sac rempli de morceaux de tissus et nous dit :

« Il n’y a pas de fioul. Le gouvernement a promis de distribuer 50 litres par an et par famille mais que peuvent faire 50 litres avec un hiver rigoureux ? Comment se chauffer et chauffer de l’eau pour un bain ? Les familles brûlent du plastique, des morceaux de tissu, n’importe quoi… Les chambres sont humides et froides. Mais tout cela peut causer des problèmes de santé très graves. Nous savons que la pénurie est due aux sanctions imposées au pays et nous nous résignons. »

Devant la situation d’extrême pauvreté rapportée par les agences des Nations unies, beaucoup de nos citoyens vivent dans la résignation. Alors la question devient urgente : « Sommes-nous en train de vivre dans une dynamique du provisoire qui pourrait changer un jour ou sommes-nous en train de vivre une dynamique du statuquo, qui s’éternise ? »

Pourriez-vous être notre voix, voulez-vous parler autour de vous de la situation du peuple syrien oublié ? Nous comptons sur votre appui et sur votre solidarité pour rompre les structures d’injustice qui nous écrasent !

Nous, les Maristes Bleus, nous ne voulons pas rester les bras croisés. Nous agissons, nous nous déplaçons vers la frontière de la misère pour essayer de tendre la main à l’autre, le relever et lui rendre sa dignité. Une jeune fille est venue me voir pour me dire : « C’est vrai que nous sommes des gens simples, abattus et sans espoir mais vous nous aidez à nous relever, à oser et à continuer le chemin. »

Ces mois-ci, nous avons reçu plusieurs amis étrangers ; certains venant au nom de leur organisation et d’autres venant chercher plus de vérité sur la réalité du quotidien du peuple syrien.

De même, nous avons reçu la semaine passée la visite du frère Aureliano Garcia, provincial des frères maristes, accompagné du frère Manuel Jorques. Nous avons eu beaucoup de temps pour discuter et réfléchir sur la réalité des Maristes Bleus et sur l’avenir. Des questions primordiales ont été soulevées. Elles touchent à l’importance de la présence des Maristes à Alep et à la continuité de l’œuvre au service de la population syrienne qui souffre.

Le frère Aureliano vient de publier une lettre envoyée à tous les maristes de la province. Je copie avec son autorisation, ces quelques mots :

« Votre présence est la présence de l’Église à côté de ceux qui souffrent. Votre mission rend visibles les disciples de Jésus sur la terre d’où sont sorties les premières communautés chrétiennes au début de notre histoire. Votre vie quotidienne est aussi, sans aucun doute, un engagement pour le dialogue et la fraternité avec le monde musulman. Merci ! »

À propos de ce dialogue et de fraternité avec le monde musulman, une dame musulmane, bénévole mariste, m’a demandé de prier pour elle et pour sa famille qui passe par un moment difficile. Elle m’a dit : « Je sais que le dimanche tu vas à la messe et tu pries, je t’en prie, tiens-moi présente dans ta prière. »

Nos différents programmes sont bien lancés.

Les jeunes qui distribuent les repas chauds du programme « Pain partagé »continuent à assurer aux 250 personnes âgées et vulnérables une relation qui va beaucoup plus loin que la simple remise d’un plat chaud quotidien. Ces jours-ci, les dames de la cuisine préparent de bons plats pour la fête traditionnelle de la Sainte-Barbe et commencent à prévoir les repas de Noël.

Les enfants du programme éducatif « Je veux apprendre » et ceux des programmes de soutien psychosocial « Lotus et Bamboo », remplissent de vie toute la maison. Ils sont là dès 9 heures du matin. Encadrés par des animateurs bien préparés et formés, ils se sentent heureux de vivre chez nous. Nous avons célébré avec eux la Journée mondiale de l’enfance.

Leurs parents ont déjà eu deux réunions de formation sur des thèmes essentiels pour l’éducation de leurs enfants. La liste d’attente de ces trois programmes est très longue et nous ne pouvons malheureusement pas répondre à toutes les demandes.

« Ghosn » (branche) est un programme de soutien psychologique pour les femmes. Deux fois par semaine, 24 dames réparties en deux groupes se retrouvent pour un temps de parole et de partage.

Le programme « Développement de la femme » réunit, deux fois par semaine, 60 femmes en deux groupes autour de thèmes qui leur sont utiles avec des intervenants de qualité : médecins, psychologue, experts en histoire de notre pays et de notre ville, des formateurs en sciences sociales et religieuses, des formatrices aux arts culinaires et aux travaux d’habiletés manuelles.

Vingt femmes suivent la session de « Coupe et couture ». Elles sont toutes motivées pour apprendre la couture et ainsi pouvoir soutenir leur famille. Durant quatre mois, crayon en main, elles dessinent des modèles puis coupent, taillent et cousent des jupes et des chemises sous la direction d’une experte.

Le centre MIT continue à assurer des formations sur différents thèmes, le dernier étant « Les bases du développement personnel » auquel ont participé 22 jeunes.

Plus de 45 adultes profitent actuellement des deux programmes « Formation professionnelle » et « Micro-Projets ». Apprendre un métier garantit aux jeunes apprentis un avenir de dignité. De même lancer son propre projet est une chance pour ne pas tomber dans la mendicité et la dépendance.

Les couturières de « Heartmade » travaillent avec leur cœur. Les fêtes de Noël et du Nouvel An approchent et c’est l’occasion de participer à des expositions pour vendre le maximum de leur production. Ce sont toujours des pièces uniques, d’une beauté extrême et d’une qualité très fine.

Plus de 800 familles attendent mensuellement le panier alimentaire que nous leur distribuons. C’est une occasion pour raconter combien ce panier leur est essentiel en ces temps de hausse vertigineuse des prix des denrées de base.

Cette année encore et grâce à des amis, nous avons relancé le programme « Soutien scolaire » aux élèves et aux universitaires. Il s’agit d’aider les parents à payer les frais de scolarité qui ont subi une augmentation considérable. Certains parents ne peuvent même pas assurer le coût des fournitures et du transport scolaires. Nous croyons fermement que l’instruction et l’éducation sont le chemin de paix pour l’avenir.

Le prix du lait en poudre ne cesse d’augmenter tout en devenant une denrée rare. Pourtant, il est essentiel pour le développement des enfants. Nous cherchons par tous les moyens à l’assurer à quelques 3 000 enfants de moins de 11 ans à travers le programme « Goutte de lait ».

Et que dire du programme « Médical ». La réalité est catastrophique. Les frais d’hospitalisation ou de traitement s’élèvent à des chiffres inabordables. Nous participons avec d’autres organismes catholiques à soutenir les malades et leurs familles.

En chemin vers Noël, je partage avec vous ce texte de méditation et de prière :

Seigneur, aide-moi à me mettre en route,
La route de l’homme, de tout homme.
La route de l’humanité…

Seigneur, aide-moi à tendre l’oreille,
Aux cris qui montent vers toi,
Les cris des affamés et des sans voix…

Seigneur, aide-moi à sourire,
Un sourire qui vient de mon cœur…
Joyeux Noël et Bonne année

Pour les Maristes Bleus :

Frère Georges Sabé et le Dr Nabil Antaki

L’auteur, le Dr Nabil Antaki, dirige le mouvement des Maristes Bleus en Syrie. Il est l’un des partenaires de longue date de CSI. Le frère de Nabil Antaki a été tué par l’État islamique (EI), le reste de sa famille et la plupart de ses amis ont quitté le pays. Son épouse Leyla et lui sont déterminés à rester dans le pays pour « semer l’espoir ».

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