Chrétiens d’Orient : entre incertitudes et espérance
En Irak et en Syrie, la vie reprend peu à peu son cours pour les chrétiens qui sont retournés chez eux après le départ de l’Etat islamique.
Si la victoire sur le prétendu État islamique (ÉI) annoncée en Irak le 10 décembre 2017 a eu une signification symbolique importante, la situation sécuritaire reste extrêmement précaire en raison du vide de pouvoir dans les territoires reconquis.
L’armée irakienne et les troupes de la zone autonome kurde du nord de l’Irak se sont combattues à plusieurs reprises depuis le référendum sur l’indépendance kurde en septembre 2017. Les personnes déplacées qui étaient retournées dans leurs villages ont dû de nouveau fuir. Parmi elles se trouvent des chrétiens. Un chrétien d’un village de la plaine de Ninive explique: «Nous sommes pris entre les fronts. D’un côté il y a l’armée irakienne, de l’autre les troupes kurdes. Nous, les chrétiens, sommes pris au milieu et méprisés des deux côtés.» De plus, outre l’énorme quantité de mines terrestres, des combattants dispersés de l’ÉI continuent de mener des attaques.
En Syrie, le régime de Bachar el-Assad a repris, début 2017, la ville d’Alep aux rebelles islamistes sunnites. Pour les minorités religieuses, y compris bon nombre de chrétiens, cela signifie le retour d’une certaine sécurité et la possibilité de revenir et de reconstruire. De nombreux chrétiens d’Alep avaient été auparavant contraints de se réfugier dans des régions côtières surpeuplées et des villages de montagne.
Malheureusement les rebelles islamistes, soutenus par la Turquie, continuent de semer l’incertitude dans la région d’Idlib, parce qu’ils souhaitent établir un État régi par la charia bâti sur le modèle de celui de l’ÉI. Ils ont menacé plusieurs colonies chrétiennes dans la province de Hama et, aujourd’hui encore, de violents actes de guerre sont récurrents. Cependant la reconquête fin octobre 2017 de la «capitale de l’ÉI», Raqqa, a donné un espoir supplémentaire au peuple syrien, qui doit maintenant être soutenu par une aide extérieure afin de stabiliser davantage la région et de permettre le retour des réfugiés chez eux.
Dans d’autres zones de combat, dont récemment dans la province d’Afrin sise dans le nord-ouest du pays, les chrétiens se trouvent de nouveau pris entre les fronts des puissances géopolitiques. En particulier à Afrin, jusqu’ici isolé, les communautés locales ont connu une très forte croissance de l’Église. Toutefois les résidents de cette minorité chrétienne sont à présent sérieusement affectés par l’intervention militaire de la Turquie dans le territoire syrien dominé par les Kurdes, alors que jusqu’à présent elle s’était vu offrir un minimum de sécurité par les Kurdes. Cela aggrave encore la situation humanitaire déjà précaire de la population de cette région pauvre, dans laquelle l’Aide aux Eglises dans le Monde apporte une aide depuis le début du conflit.
L’offensive turque amène malheureusement également à Afrin les alliés syriens, les rebelles islamiques radicaux; ils ne sympathisent pas avec les chrétiens locaux, toutefois ils ont été jusqu’à présent tenus à distance par les forces kurdes. L’influence des rebelles de la charia syrienne augmente considérablement dans la région du nord d’Idlib, et c’est là une grande menace pour les chrétiens.
L’économie en faillite
L’économie en Syrie et en Irak est en faillite; il n’y a presque pas de revenus et les gens ne peuvent pas encore survivre grâce à leurs propres ressources. Une famille de déplacés nous dit: «Après trois ans d’ÉI et de fuite, nos dernières économies sont maintenant épuisées et devant nous c’est le néant.» Pour les gens, le plus difficile est d’affronter l’hiver sans approvisionnement suffisant. Au mieux, les rapatriés trouvent leurs villages et leurs villes délaissés et, au pire, détruits.
Entretenir l’espoir
Mais l’espoir d’un nouveau départ est là. Il y a eu des moments émouvants quand diverses confessions chrétiennes ont fêté Noël dans les territoires anciennement occupés, célébrant le culte dans leurs églises dévastées. En cette période sombre, les chrétiens ont pu vivre et ressentir la puissance de l’espérance en Jésus-Christ. Mais, pour eux, c’est un immense défi de garder cet espoir à long terme. Et c’est là qu’intervient le travail de nos partenaires. Leur engagement et leur amour envers leurs semblables, même face à leur propre misère, sont un témoignage extrêmement fort. Dans ce travail, nous voulons continuer à équiper, à encourager et à fournir les ressources nécessaires à nos partenaires locaux. À l’heure actuelle, dans cette phase critique de la transition de la guerre à la reconstruction, nous voulons continuer à les soutenir, à donner au fragile espoir naissant une véritable chance jusqu’à ce que les gens puissent de nouveau subvenir à leurs besoins.