BÂTIR LE ROYAUME DE DIEU, NON LE SIEN.
Bonjour Mise en scène ou manifestation de la puissance de Dieu ?
Cette semaine a été marquée par un show en mondovision d’un événement majeur à l’église du Pasteur Alph Lukau en Afrique du Sud.
Événement majeur ?
Oui. Il ne saurait en être dit autrement. Présenter, dimanche dernier, dans un premier temps par l’église comme une résurrection, celle d’Eliot décédé le vendredi précédent, suite à la prière du pasteur Alph Lukau, l’église se ravise quelques jours plus tard par la diffusion d’autres messages. Le gouvernement sud-africain se saisit de l’affaire. De nombreux démentis surgissent de partout. Les pompes funèbres et autres services démentent d’avoir œuvré à préparer le corps du défunt pour son acheminement au Zimbabwé, supposé être le pays natal d’origine de ce dernier. À ces nombreux démentis, s’ajouteront ceux des amis et voisins qui confirment qu’ils n’ont jamais été informés de la mort d’Eliot.
Sur la base de ces informations, je me suis fait mon opinion personnelle et non ambiguë de toute cette situation.
J’ai pu lire nombres de pasteurs et chrétiens sur le sujet. Les avis sont partagés. Certains pensent qu’on ne devrait pas douter de la puissante de Dieu. Tel n’est pas le sujet. Dieu est absolument PUISSANT et digne d’accomplir des actes qui relèvent de Sa seule souveraineté. La question ici est de savoir si l’événement relevait d’une mise en scène ou de la manifestation de la PUISSANCE de Dieu. Pour moi, ce n’était pas la manifestation de la puissance de Dieu. Si je me trompe, ce n’est pas un déluge puisque Dieu se serait manifesté pour Sa gloire et qu’aucun homme n’a à en tirer ni bénéfice, ni gloire, si un quelconque profit.
D’autres pasteurs et chrétiens mettaient en garde ceux et celles qui voudraient juger le serviteur de Dieu. La Bible nous enseigne de ne pas juger (Matthieu 7 :1). On lit également dans la Bible que l’homme spirituel, au contraire, juge de tout, et il n’est lui-même jugé par personne (1 Corinthiens 2 :15). Je ne vais pas me lancer dans les nuances grecques du mot « juger » utiliser dans les deux contextes mais, dans le cas présent, nous nous devons, comme les chrétiens de Bérée (Actes 17 :10-11), d’exercer notre discernement en tant qu’hommes spirituels, examiner la situation et prendre position pour l’intérêt de la communauté chrétienne. Ma position est claire : Le manque de cohérence dans les communications de l’église concernée par l’événement est en elle-même une réponse.
ET SI L’ÉTERNEL DEMEURAIT LE SEUL VRAI DIEU ?
Or, il s’éleva de la part des disciples de Jean une dispute avec un Juif touchant la purification. Ils vinrent trouver Jean, et lui dirent : Rabbi, celui qui était avec toi au-delà du Jourdain, et à qui tu as rendu témoignage, voici, il baptise, et tous vont à lui. Jean répondit : Un homme ne peut recevoir que ce qui lui a été donné du ciel. Vous-mêmes m’êtes témoins que j’ai dit : Je ne suis pas le Christ, mais j’ai été envoyé devant lui. Celui à qui appartient l’épouse, c’est l’époux; mais l’ami de l’époux, qui se tient là et qui l’entend, éprouve une grande joie à cause de la voix de l’époux : aussi cette joie, qui est la mienne, est parfaite. Il faut qu’il croisse, et que je diminue. Celui qui vient d’en haut est au-dessus de tous; celui qui est de la terre est de la terre, et il parle comme étant de la terre. Celui qui vient du ciel est au-dessus de tous. Actes 3 :25-31.
Alors que les foules vont à Jésus Christ, les disciples de Jean-Baptiste le perçoivent comme une menace pour celui qui est ou mieux encore celui qui a été leur maître. Jean les recadre de façon précise : C’est à Lui que vous appartenez et non à moi. Je n’ai été que son précurseur. Je suis à son service peut-on résumer les propos de Jean-Baptiste.
En tant que pasteur, réalisons nous que nous sommes au service du Seigneur ?
Le réalisons-nous vraiment ?
Si oui, laissons-Lui toute la place. Qu’Il soit le seul vrai Dieu. Qu’Il croisse et que nous diminuons.
Que la gloire de Son Royaume soit à Lui et à Lui tout seul. Il ressuscite les morts. Oui, Il agit encore aujourd’hui. Il est Dieu mais Lui seul l’est !
En le réalisant, nous ne voudrons point croitre. Quel intérêt avons-nous à nous offrir un podium, une scène. Nous avons un pupitre pour parler à Son nom, en Son nom, de la gloire de Son nom, pour le salut de tous ceux qui croiront en Lui. Matthieu 28 :19-20, Jean 1 :12.
LE CŒUR DU BERGER
Le cœur du berger avertit les brebis du danger de l’égarement tout en plaidant en faveur des brebis. Ce bout de récit du chapitre 32 du livre d’Exode est fort évocateur du cœur de Moïse en faveur du troupeau que le Seigneur lui a confié. Il plaide en faveur du peuple, contre ses propres intérêts :
L’Éternel dit à Moïse : Va, redescends, car ton peuple que tu as fait sortir d’Égypte se conduit très mal. Ils se sont bien vite détournés de la voie que je leur avais indiquée. Ils se sont fabriqué un veau de métal fondu, ils se sont prosternés devant lui et lui ont offert des sacrifices en disant : « Israël, voici ton dieu, qui t’a fait sortir d’Égypte ! » Puis l’Éternel ajouta : Je constate que ce peuple est un peuple rebelle. Et maintenant, laisse-moi faire : ma colère s’enflammera contre eux et je les exterminerai. Mais je ferai de toi une grande nation. Alors Moïse supplia l’Éternel son Dieu d’avoir pitié en disant : Éternel, pourquoi ta colère s’enflammerait-elle contre ton peuple que tu as fait sortir d’Égypte par un formidable déploiement de force et de puissance ? Pourquoi les Égyptiens diraient-ils que c’est dans de mauvaises intentions que leur Dieu les a fait sortir de leur pays : pour les faire périr dans la région des montagnes et les faire disparaître de la terre ? Laisse ta colère et renonce à envoyer le malheur à ton peuple. Exode 32 :7-12
Le lendemain, Moïse dit au peuple : Vous avez commis un très grand péché. Maintenant je vais remonter auprès de l’Éternel. Peut-être obtiendrai-je le pardon de votre péché. Moïse retourna donc auprès de l’Éternel et dit : Hélas ! Ce peuple s’est rendu coupable d’un très grand péché, il s’est fait un dieu d’or. Mais maintenant, veuille pardonner ce péché. Sinon, efface-moi du livre que tu as écrit. L’Éternel répondit à Moïse : J’effacerai de mon livre celui qui a péché contre moi. Exode 32 :30-33.
Moïse a une belle occasion ici de devenir une grande nation : ma colère s’enflammera contre eux et je les exterminerai. Mais je ferai de toi une grande nation.
Moïse refuse l’offre du Seigneur et se tient sur la brèche, en faveur du peuple que le même Dieu lui a confié. Il plaide pour le peuple. Il va même très loin en acceptant d’être châtié avec ce peuple si la colère de Dieu ne s’estompait pas : Mais maintenant, veuille pardonner ce péché. Sinon, efface-moi du livre que tu as écrit.
Le cœur du berger n’a d’intérêt que pour le troupeau, pour les brebis, pour la communauté et non pour des intérêts égoïstes, égocentriques, pour le one-man-show.
UNE ÉGLISE POUR CHRIST :
L’un des défis de l’Église contemporaine est de demeurer sur les préceptes bibliques malgré des mœurs qui évoluent de façon vertigineuse. La Bible n’a pas à s’inscrire en faux contre ces évolutions. Elle n’a pas à y adhérer non plus. Elle a tout simplement à être ce qu’elle a été, ce qu’elle est, ce qu’elle sera et à payer un prix s’il le faut. Pierre, Paul, Silas et autres disciples ont été prisonniers mais la prison n’a pu diluer ni leur foi, ni leur message évangélique.
La plus grande prison de l’Église aujourd’hui n’est pas les lois ou les institutions étatiques. C’est la foule. Les pasteurs et les églises rêvent du plus grand nombre de membres. Les églises évaluent la portée d’un appel ministériel au nombre de membres. Plus une église a de membres, plus l’appel du berger est grand. C’est une idée qui est très partagée dans les milieux évangéliques. On comprend pourquoi les pasteurs peuvent se targuer d’avoir de grandes assemblées, d’être des milliardaires, propriétaire des Jets privés et autres. Au même moment, les membres croupissent sous la misère. Oui, un berger a droit à une vie décente comme tout être humain dont les membres de l’église devraient en avoir droit.
Quel est le fondement d’avoir des mégas églises au lieu de multiplier des assemblées, permettre aux nombreux bergers appelés par le Seigneur d’œuvrer sur le champ missionnaire, d’implanter des églises tout en bénéficiant du soutien financier nécessaire pour une telle mission. Les églises déjà implantées et disposant d’un bon soutien financier devraient financer ces pasteurs, ces églises en mission d’implantation. Les églises évangéliques ont opté pour le chacun pour soi et Dieu pour tous. Sous cet angle un peu égoïste, il y’a des risques d’égarement, des risques de se livrer à des one-man-shows médiatiques pour attirer plus de membres. Bref, le risque de dérapage est réel. On finit par se bâtir son propre royaume au détriment de celui de Christ. On finit par diluer le message biblique pour garder le plus grand nombre. On finit par s’inventer des miracles pour renforcer son podium, sa notoriété (J’ai un grand appel, il se produit des miracles dans mon église etc.). Diminuons et laissons Christ croitre.
Je termine sur ces propos du pasteur et théologien Paul Washer :
« Parce que nous avons simplifié l’Évangile, parce que nous ne prêchons pas le véritable évangile, et nous usons des moyens charnels pour attirer les gens. Et si nous usons des moyens charnels pour attirer les gens, on attire les gens charnels. Et il faut continuer à user des moyens de plus en plus charnels pour les garder au sein de l’église. Voici ce qui se passe : On a des églises remplies de gens charnels qui n’ont pas été convertis. Mais dans ces églises, on est aussi en présence des petits groupes de gens qui désirent Jésus-Christ sincèrement. Ils désirent sincèrement Sa Parole et ils désirent être transformés. C’est tout ce dont ils ont besoin : Un vrai culte, un vrai Dieu, le prêche des Écritures ainsi qu’une mise en pratique sous leurs yeux. Je vais vous dire le grave péché des pasteurs américains. Ça m’a causé bien des soucis mais c’est la vérité. Ce petit groupe de gens convertis dans cette église, tous ce qu’ils veulent, c’est Jésus. Ils veulent seulement bien faire. Ils veulent la pureté, la vérité, le Christ. Mais le pasteur, afin de conserver la masse des gens non convertis, répond aux besoins de ces derniers. Tandis qu’il alimente ces gens charnels avec des choses temporelles, il laisse les brebis de Dieu mourir de faim. Il affrontera un jour le jugement de Dieu… C’est l’épouse du Christ ! Ce sont des églises et toutes ces églises, nombre d’entre elles même celles qui semblaient hérétiques en certains points, on trouve généralement un groupe qui désire sincèrement Jésus Christ. Mais les leaders s’occupent des gens charnels et laissent l’épouse du Christ mourir de faim, appauvrie. C’est mal. Et un jugement sera rendu. La même chose se passe chez les jeunes. Je connais des jeunes qui me disent : Frère Paul, je vous écoute tout le temps. Et je leur pose la question de savoir : Et dans ton église ? Ils me répondent que ce n’est ce qu’ils prêchent. Au jeune de conclure : Ce n’est pas ce que les autres jeunes veulent donc ils leur donnent ce qu’ils veulent. Je suis affamé ! »
Paul Washer a parlé des pasteurs américains mais on devrait étendre cela à l’ensemble des églises évangéliques. Il y a un travail à faire. Les églises devraient se centrer sur Christ et non sur elles exclusivement. Les églises ayant des fondements spirituelles et financiers solides devraient servir d’appui aux églises en implantation par des supports financiers. Ceci devrait permettre de fonder des églises moyennes et de rapprocher les brebis de leur communauté et du berger tout en évitant de fonder des mégas églises où le suivi des brebis devient très difficile.
Raoul Nguetgna, Pasteur.