Italie: Meloni (FdI) cherche à rassurer sur les finances publiques
par Angelo Amante, Giselda Vagnoni et Crispian Balmer
ROME (Reuters) – Les projets de dépenses publiques de l’alliance des droites italienne respecteront les règles européennes et ne creuseront pas la dette de l’Etat, assure Giorgia Meloni, la cheffe de file du parti Frères d’Italie (FdI), favorite pour prendre la tête du gouvernement après les élections du mois prochain.
Celle qui pourrait ainsi être la première femme à présider le Conseil des ministres a déclaré vouloir privilégier l’investissement pour doper la croissance économique tout en promettant de gérer de manière responsable les finances de l’Etat.
« Je suis très prudente », a-t-elle dit lors d’un entretien accordé à Reuters dans son bureau du Parlement. « Aucune personne responsable ne peut imaginer couler les finances du pays avant de disposer d’un tableau complet des ressources qui peuvent être investies. »
Le scrutin du 25 septembre a été convoqué après la chute du gouvernement d’union nationale dirigé par Mario Draghi, dont les FdI, dirigés par Giorgia Meloni, étaient la principale force d’opposition. Selon les sondages sur les intentions de vote, l’alliance emmenée par le parti nationaliste, qui inclut aussi la Ligue et Forza Italia, devraient l’emporter.
Cette perspective inquiète les marchés financiers, que rassuraient au contraire la figure de Mario Draghi, ex-président de la Banque centrale européenne (BCE). Une inquiétude qui s’est traduite par une forte augmentation des coûts de financement de l’Etat ces dernières semaines.
Le programme de l’alliance des droites inclut d’importantes réductions d’impôts et de taxes, une baisse de l’âge de la retraite et une amnistie fiscale, des mesures qui semblent difficiles à mettre en oeuvre sans dommages dans un pays dont la dette publique représente déjà 147% du produit intérieur brut (PIB).
« Nous avons mis sur le papier quelques sujets qui dépendent des comptes de l’Etat (…) La première chose que nous aurions à faire, ce serait le projet de budget, et nous avons clairement l’intention de le faire en respectant les paramètres requis », a dit Georgia Meloni.
« Nous voulons une attitude différente de l’Italie sur la scène internationale, par exemple dans les relations avec la Commission européenne (mais) cela ne signifie pas que nous voulons détruire l’Europe, que nous voulons quitter l’Europe, que nous voulons faire des choses folles », a ajouté celle dont le parti a défendu par le passé des positions hostiles à l’euro.
« Cela signifie simplement d’expliquer que la défense de l’intérêt national est important pour nous comme elle l’est pour les Français et pour les Allemands. »
POUR UN AMÉNAGEMENT DU PACTE DE STABILITÉ
Elle a refusé de répondre à une question sur la possibilité, évoquée par plusieurs médias, que Fabio Panetta, l’un des membres du directoire de la BCE, intègre un gouvernement de droite, se contentant de le qualifier de personnalité « de la plus haute qualité ».
Pour Georgia Meloni, le Pacte de stabilité et de croissance européen, qui prévoit un plafonnement des déficits publics à 3% du PIB et des dettes publiques à 60% mais qui est suspendu depuis le début de la crise du coronavirus, ne peut pas être de nouveau appliqué sans être aménagé.
Elle a suggéré que les dépenses publiques consacrées à amortir l’impact de la crise de l’énergie sur les ménages et les entreprises soient exclues des calculs sur le déficit et la dette.
« Sur le dossier de l’énergie, les pays confrontés aux difficultés les plus importantes en raison de leur dettes passées pourraient être mieux aidées », a-t-elle dit.
Georgia Meloni a par ailleurs exclu tout projet de nationalisation à 100% du pétrolier Eni et du géant de l’électricité Enel sur le modèle du projet lancé par la France pour EDF, estimant que les deux groupes italiens avaient fait la preuve de leur réussite dans leur configuration actuelle.
Pour elle, il appartient cependant au gouvernement de protéger les activités d’importance stratégique, notamment des convoitises de prédateurs étrangers.
Les FdI souhaitent entre autres que le groupe public Cassa Depositi e Prestiti (CDP) prenne le contrôle de l’ex-monopole des télécommunications Telecom Italia, dont il est déjà actionnaire, et gère son réseau national à haut débit.
« Mon objectif est un réseau intégré non-vertical propriété de l’Etat et des opérateurs privés qui opèrent dans le cadre d’une concurrence libre », a dit Georgia Meloni.
Les FdI s’opposent par ailleurs au projet de vente de la majorité du capital de la compagnie aérienne ITA Airways lancé par le gouvernement Draghi et souhaitent que le dossier soit tranché par le prochain gouvernement.
« J’ai demandé une pause parce qu’il est très important de savoir (…) s’il est possible de conserver une compagnie nationale », a dit Georgia Meloni.
(Reportage Angelo Amante, Giselda Vagnoni et Crispian Balmer à Rome, avec Yoruk Bahceli à Amsterdam, version française Marc Angrand, édité par Kate Entringer)