Présidentielle 2022: Les Français appelés à choisir entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron
Les Français était appelés aux urnes dimanche pour élire leur président de la République au terme d’une campagne d’entre-deux-tours à la tonalité négative qui, au-delà du président sortant Emmanuel Macron et de la candidate d’extrême droite Marine Le Pen, a opposé « deux France ».
Marine Le Pen s’est déplacée dans sa circonscription d’Hénin-Beaumont, dans le Pas-de-Calais, où elle s’est offert un bain de foule, a serré quelques mains et accordé des autographes au nombreux sympathisants et militants venus la saluer.
Emmanuel Macron s’est quant à lui rendu au Touquet, également dans le Pas-de-Calais, où il a voté en compagnie de son épouse avant de s’octroyer, lui aussi, un bain de foule.
Selon les chiffres communiqués par le ministère de l’Intérieur, la participation était en légère baisse à 17h00 par rapport au premier tour, à 63,23% contre 65% le 11 avril. Elle était aussi plus faible qu’en 2017 à la même heure (65,30%).
Selon les estimations des instituts de sondage, l’abstention atteindrait 28%, soit le plus haut niveau pour un second tour depuis l’élection de 1969 qui avait vu la victoire du gaulliste Georges Pompidou face au centriste Alain Poher.
Pour cette réédition de la « finale » de 2017, la candidate du Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, a su se forger une image moins clivante, affaiblissant le « front républicain » qui a souvent barré la route à l’extrême droite, tout en trouvant dans la question du pouvoir d’achat menacé par l’inflation un angle d’attaque efficace pour réactiver l’image de « président des riches » d’Emmanuel Macron.
Au terme d’un quinquennat marqué par une succession de crises sociales (mouvement des « gilets jaunes » puis opposition à la réforme des retraites), sanitaire (pandémie de COVID-19) et sécuritaires (attentats islamistes et guerre en Ukraine), le chef de l’Etat ne promet plus de « renverser la table » mais au contraire de « protéger » les Français face aux menaces en tout genre.
Mais ni sa politique de « quoi qu’il en coûte » en réponse à la crise sanitaire, ni le début de revalorisation de certains salaires, notamment pour les professionnels de santé, ni la baisse des impôts ou du chômage qu’il a tenté de mettre en avant pendant la campagne, n’ont entamé la profonde défiance voire aversion qu’il suscite chez des millions de Français.
Non seulement chez les électeurs de Marine Le Pen, qui a obtenu 23,15% des suffrages exprimés au premier tour (4,7 points de moins qu’Emmanuel Macron), mais aussi chez ceux des candidats d’extrême gauche Jean-Luc Mélenchon (21,95%), d’extrême droite Eric Zemmour (7,07%) et même de l’écologiste Yannick Jadot (4,63%).
Soit environ la moitié du corps électoral appelé à se prononcer à nouveau ce dimanche, lors de ce que les deux candidats ont présenté comme un « référendum » sur leur personnalité et leurs idées.
« REDIABOLISATION » CONTRE « ARROGANCE »
Dans ce contexte, handicapé par son image, son bilan dans certains domaines, comme la sécurité, et un programme dont les Français ont surtout retenu le projet de report de l’âge de départ à la retraite à 65 ans, le président sortant s’est employé à « rediaboliser » l’extrême droite.
Entré très tardivement en campagne, officiellement en raison de la guerre en Ukraine, Emmanuel Macron a sillonné la France entre les deux tours pour se mettre « à portée d’engueulade » des Français, mais il a surtout martelé la menace que représenterait selon lui une élection de Marine Le Pen.
Menace d’une soumission de la France à la Russie, en raison des liens entre la candidate du RN et Vladimir Poutine et de sa volonté de se mettre en retrait de l’Otan pour se rapprocher de Moscou, menace d’un « Frexit » déguisé du fait de sa volonté de transformer l’Union européenne en « Europe des nations », menace de dérive autoritaire d’une gouvernance par référendum, voire de « guerre civile » en raison de sa volonté d’interdire le port du foulard islamique dans l’espace public.
A ces attaques, Marine Le Pen a répondu dans les derniers jours de campagne par une charge tout aussi virulente contre l' »arrogance » dont aurait fait preuve le président-candidat pendant leur seul débat télévisé, reflet selon elle du « mépris » qu’il a manifesté pendant cinq ans pour « le peuple », des « gilets jaunes » aux opposants au « pass vaccinal », des Français les plus modestes aux habitants des campagnes.
« Il n’aime pas les Français », a-t-elle asséné vendredi sur Europe 1 pour tenter de décourager la reconstitution d’un fragile « front républicain » ce dimanche, alors que l’abstention, attendue entre 25 et 30%, pourrait être la plus élevée au second tour depuis 1969.
« On ne laissera jamais tomber personne », lui a répondu Emmanuel Macron en vantant un projet « idéaliste et réaliste » pendant son dernier meeting vendredi à Figeac (Lot).
En 2017, au terme d’un deuxième tour sans autre suspense que l’ampleur de son score, Emmanuel Macron avait recueilli 66,1% des voix. A la fermeture des derniers bureaux de vote à 20h00, l’ambiance pourrait être plus crispée dans les quartiers généraux du président sortant et de Marine Le Pen.
(Avec Nicolas Delame, édité par Sophie Louet)